Devoir de Philosophie

MAUPASSANT: Une vie - les sentiments de Jeanne

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

maupassant
Alors plus rien à faire, aujourd'hui, ni demain ni jamais. Elle sentait tout cela vaguement à une certaine désillusion, à un affaissement de ses rêves. Elle se leva et vint coller son front aux vitres froides. Puis, après avoir regardé quelque temps le ciel où roulaient des nuages sombres, elle se décida à sortir. Étaient-ce la même campagne, la même herbe, les mêmes arbres qu'au mois de mai ? Qu'étaient donc devenues la gaieté ensoleillée des feuilles, et la poésie verte du gazon où flambaient les pissenlits, où saignaient les coquelicots, où rayonnaient les marguerites, où frétillaient, comme au bout de fils invisibles, les fantasques papillons jaunes? Et cette griserie de l'air chargé de vie, d'arômes, d'atomes fécondants n'existait plus. Les avenues détrempées par les continuelles averses d'automne s'allongeaient, couvertes d'un épais tapis de feuilles mortes, sous la maigreur grelottante des peupliers presque nus. Les branches grêles tremblaient au vent, agitaient encore quelque feuillage prêt à s'égrener dans l'espace. Et sans cesse, tout le long du jour, comme une pluie incessante et triste à faire pleurer, ces dernières feuilles, toutes jaunes maintenant, pareilles à de larges sous d'or, se détachaient, tournoyaient, voltigeaient et tombaient. Guy de Maupassant, Une Vie, 1883. Maupassant, grand romancier naturaliste de la fin du xix6 siècle, écrit « Une Vie » en 1883 : dans ce roman, il peint l'existence désolante de l'héroïne, Jeanne, qui va de déception en déception ; elle perd un à un tous ses rêves de jeune fille et devient la malheureuse victime de son mari, puis de son fils, avant de sombrer dans une sorte de folie. Dans ce passage, elle rencontre sa première désillusion, lorsqu'elle revient dans sa propriété, Les Peuples, après son voyage de noces. L'évolution des sentiments de Jeanne apparaît en correspondance avec la transformation du paysage. L'héroïne passe par divers sentiments, la perte de l'espoir, Siée à un ennui profond, qui constituent une forme de mal du siècle.

Liens utiles