MAULNIER Thierry : sa vie et son oeuvre
Publié le 24/11/2018
Extrait du document
«
est
d'abord élève des lycées d'Alès et de Nice, puis du
lycée Louis-le-Grand, à Paris; il entre ensuite à l'É cole
normale supérieure, où il sera le condisciple de Robert
Brasillach et de Roger Vailland.
Il s'oriente vers le jour
nalisme et devient chroniqueur à la Revue universelle
d'Henri Massis et Jacques Bainville, à l'Actionfrançaise
de Charles Maurras, et au Figaro.
De 1932 à 1939, il fait
paraître ses premiers essais: La crise est dans l'homme,
1932; Nietzsche, 1933; Racine, 1936 (essai auquel il faut
joindre Lecture de « Phèdre », 1943).
Mais en 1944, au
sortir de la Libération, il prend ses distances à l'égard
de l'engagement politique, sans pour autant cesser ses
activités de journaliste; collaborant à Combat, à la Revue
de Paris, il fonde en 1950, avec François Mauriac, la
revue la Table Ronde; c'est aussi à cette époque qu'après
quelques adaptations scéniques il entreprend une carrière
dramatique personnelle : Jeanne et ses juges, 1949,
publié en 1951; le Profanateur (publié en 1952, avec la
Révolte et le Sacré); la Défaite d'Annibal, la Ville au
fond de la mer, 1960; le Soir du conquérant et Celui qui
n'avait rien fait, 1983.
Thierry Maulnier a été élu à
l'Académie française en 1964.
De ses liens avec l'Action française, Maulnier a
conservé un extrême attachement au classicisme fran
çais, à la société aristocratique du xvuc siècle, et une
certaine conception de l'hellénisme.
Ces références
majeures ont dirigé ses réactions politiques et ses partis
pris littéraires; après avoir fortement critiqué l'esprit et
les pratiques de la démocratie libérale, Thierry Maulnier
a tenté, depuis la Seconde Guerre mondiale, de nuancer
ses positions : à partir de Violence et Conscience (1945),
reprenant les thèses de Marx et de quelques économistes,
il a cherché une « voie moyenne >> qui concilie la critique
marxiste du capitalisme et le refus du collectivisme, qui
privilégie l'individu contre la société, tout en s'opposant
fortement au communisme (la Face de Méduse du Com
munisme, 1952).
Ses essais, très denses, au terme d'exa
mens minutieux aboutissent souvent à des renversements
dialectiques ou à des synthèses spectaculaires : « Les
moyens de production, arrachés au monopole d'une
caste, peuvent être rendus à la masse des producteurs,
non par le collectivisme, mais par la généralisation de la
propriété individuelle dans une économie collective»
(Violence et Conscience).
Il a encore publié Lettre aux
Américains, 1968; l'Honneur d'être juif, 1970, et les
quatre tomes des Vaches sacrées (t.
1, 1977; t.
Il, l' étran
geté d'être, 1982; t.
III, le Dieu masqué, 80-84, 1985;
t.
IV, Les matins que tu ne verras pas, posth., 1989).
A travers ces problématiques parfois sinueuses, des
certitudes demeurent : l'homme -le moi - a raison
contre l'Histoire, et il est des valeurs qui ne doivent pas
être mêlées aux problèmes de société tels la culture et
l'art : «Il n'y a de grand art que du fondamental, et Je
fondamental humain est d'en appeler du temps et de la
mort à une instance inaccessible >> (Cette Grèce où nous
sommes nés, 1965).
Cet humanisme traditionaliste est
directement illustré par le théâtre de l'écrivain : théâtre
« à thèse >>, qui respecte autant que possible les principes
classiques; la prose de Maulnier, souvent aphoristique,
reflète.
volontiers les tournures raciniennes.
Les héros du
dramaturge illustrent les hésitations théoriques de 1' es
sayiste : se sentant, comme le Wilfrid du Profanateur,
profondément isolés dans un contexte historique qu'ils
veulent ignorer(« Je n'aime pas être engagé.
Je ne me
sens pas engagé»), ils ne renoncent cependant pas à se
soumettre à la loi collective pour assurer la survie d'un
ordre politique.
Les valeurs morales sont alors convo
quées, qui viennent consacrer l'humanisme tout-puissant
et un peu naïf du personnage : «L'homme n'est pas fait
pour être immobile.
L'homme n'est pas fait pour atten
dre.
Il est fait pour conquérir.
Pour conquérir son huma
nité» (la Ville au fond de la mer).
L'œuvre de Maulnier apparaît
comme le témoignage d'un écrivain soucieux
d' affirmer les valeurs auxquelles il n'a cessé d'être fidèle.
BIBLIOGRAPHIE Sur Maulnier, peu étudié par la critique moderne, on pourra
consulter : Gaétan Picon, Panorama de la nouvelle littérature
f r anç aise , Paris, Gallimard, 1949.
J.-P.
DAMOUR.
»
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