marivaux ou la structure du double registre
Publié le 24/11/2023
Extrait du document
«
Jean Rosset, « Marivaux ou la structure du double registre », Forme et
signification
Marivaux dit refuser la création, qui pointe trop du côté de la mise en forme, de la structure
ordonnée.
Au contraire, l’auteur se relègue lui-même à une position passive de réception de
l’inspiration passagère, de saisie d’une créativité fulgurante.
Phrasamon, roman de Marivaux où le narrateur met en scène son rôle de narrateur en
s’adressant à son lecteur, en devenant personnage, en faisant le récit non plus seulement de
l’aventure des personnages, mais aussi de sa propre situation, en dissociant temps diégétique et
temps extra-diégétique : le narrateur se fait metteur en scène de son récit en rompant l’illusion
romanesque par l’aveu de la représentation.
Si cette mise en abîme de la représentation correspond
bien aux codes burlesques, elle est aussi témoin de la volonté sans-cesse réaffirmée par l’auteur
d’instaurer un regard critique sur son propre travail, de placer devant lui et les spectateurs un miroir
qui les révèle.
Dans La Marianne, le même principe est observable, mais cette fois le narrateur (Marianne)
est aussi personnage.
Mais cette équivalence ne doit pas nous tromper.
En effet, ce sont deux
Mariannes différentes, ne serait-ce que sur le plan temporel : Marianne narrateur raconte son passé,
qui est le présent de Marianne personnage, elle adopte donc un point de vue surplombant sur sa
propre existence.
Ainsi, le narrateur peut démasquer la comédie qui fait virevolter le cœur de ses
personnages, eux-mêmes incapables de le faire, car plongés dans l’immédiateté des passions.
Le
narrateur est avant-tout une position critique.
Marivaux introduit un décalage fondamental entre un
temps de l’expérience et un temps de la narration, entre celui de l’éprouvement spontané des
passions et celui de la réflexion spectatrice.
Comment cette distance est reproduite au théâtre ? Des personnages sur scène vont en fait
récupérer le rôle du narrateur.
Ce sont les personnages marginaux, entourant souvent l’intrigue
amoureuse centrale (ce sont souvent des valets savants en amour, mais ce n’est pas toujours le cas).
Ces personnages disposent d’avantages par rapport aux amoureux : ils peuvent sonder leur cœur,
découvrir leur amour (alors même que les amoureux, pris dans l’action, ne se rendent compte de
rien), mais aussi anticiper le dénouement de l’intrigue.
Ces personnages latéraux, grâce à
l’expérience qu’ils ont acquise en amour, accèdent à une position de surplomb, tant relationnel (ils
connaissent l’étendue toute entière des sentiments de tous les personnages) que temporel (ils
dominent l’intrigue dont ils prévoient l’issue).
Tel est le rôle de Trivelin et de la fée dans Arlequin
poli par l’amour, ou de Flaminia dans La double inconstance.
Chaque pièce est donc l’entrelacement de deux plans : celui de la jouissance immédiate de
soi par l’amour, et celui du regard critique et réfléchi.
Mais on pourrait déceler une autre dualité
dans les œuvres théâtrales de Marivaux : celle entre une pièce soigneusement orchestrée par
l’auteur, dont la construction est à peu dire géométrique ; et des scènes où les personnages
conservent toute liberté, et semblent presque improviser.
La Dispute en est un exemple marquant :
la pièce n’est que jeux de miroirs entre les....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- DOUBLE INCONSTANCE (La) Marivaux (résumé & analyse)
- DOUBLE INCONSTANCE (La). (résumé) de Pierre de Marivaux
- Double Inconstance (la) de Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux
- La Double Inconstance - Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux (analyse détaillée)
- PRINCE (le) de Marivaux. Personnage de la Double Inconstance