MARIVAUX - LA COLONIE « On nous traite de charmantes... »
Publié le 12/11/2013
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«
Commentaire composé
Introduction
Sur les 18 scènes que comporte la pièce La Colonie, la scène 9 est
certainement la plus longue.
Elle met en présence toutes les femmes qui
participent à l'action : révoltées contre la condition qui leur est réservée
depuis toujours, elles analysent avec une ironie parfois bien acerbe ce
qu'un monde fait pour et par les hommes attend d'elles.
Deux images
s'opposent ainsi tout au long du dialogue, mené par Arthénice sur le ton
d'un véritable plaidoyer féministe : l'image que les hommes imposent des
femmes aux femmes et celle qu'elles ont d'elles -mêmes .
Il y a entre ces
deux images une assez nette différence.
Mais tout serait sans doute trop
simple si l'on en restait là.
Avec une lucidité qui leur fait honneur et
révèle encore une de leurs qualités, les femmes soulignent à quel point
elles se prêtent pa rfois au jeu qu'on leur impose et s'adaptent à l'image
du miroir que leur tendent les hommes.
L'ironie est en ce sens
extrêmement ambiguë et la tonalité de certaines répliques plus
révélatrice encore que leur contenu de la conscience d'une condition
comple xe.
On peut montrer comment la double image qui est donnée des
femmes traduit la complexité de leur condition.
Les femmes telles qu 'elles se sentent jugées et traitées par
les hommes
Par la voix d'Arthénice, les femmes dressent ici un tableau de leur
condi tion en précisant bien qu'elle leur est imposée par les hommes.
Cette condition est perçue sur trois plans : l'économie domestique dans
ce qu'elle a de plus dévalorisant, le divertissement dans ce qu'il a de plus
léger et la célébration lyrique, dévaluée p ar une tonalité ironique.
Un rôle dans l'économie domestique
Le premier statut envisagé conduit à une image « domestique » de
la femme réduite à des activités dégradantes.
L'insistance sur l'aspect
manuel des tâches (« filer », « quenouille », « faire des nœuds ») a pour
objectif d'en souligner le côté matériel, l'absence de réflexion.
Des
formulations de caractère nettement dépréciatif mettent en relief le
mépris qui accompagne ce genre d'activités subalternes, dépourvues de
toute noblesse.
C'est ce que ma rque une expression comme « misérable
tracas d'un ménage ».
La reprise du présentatif « c'est » (cinq fois), dans
une énumération quelque peu rageuse dont la colère est marquée aussi
par l'emploi des adjectifs possessifs et démonstratifs (« leur maison », «
ces messieurs »), souligne l'exaspération de celle qui voit dans la
condition féminine une condition de victimes.
Le choix du verbe «
condamner » pose d'emblée le problème sur un plan conflictuel de
relation dominant/dominé..
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