MALESHERBES Chrétien Guillaume de Lamoignon de : sa vie et son oeuvre
Publié le 26/11/2018
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MALESHERBES Chrétien Guillaume de Lamoignon de (1721-1794). Fils du chancelier Guillaume de Lamoignon, Malesherbes fit ses études au collège Louis-le-Grand. Il remplit durant vingt-cinq ans (de 1750 à 1775) les fonctions de premier président de la Cour des aides, cour qui devait statuer sur le contentieux fiscal. Simultanément, il fut nommé directeur de la Librairie jusqu’en 1763. Plus tard, il siégea par deux fois au gouvernement de Louis XVI, d’abord comme ministre de la Maison du roi (1775-1776), puis comme ministre sans portefeuille (1787-1788). Entre-temps, il voyagea beaucoup, devint un botaniste chevronné et réfléchit sur la façon dont le pouvoir devait s’exercer. Ce magistrat mourra guillotiné avec sa fille, son gendre et ses petits-enfants pour avoir été l’avocat du roi devant le tribunal de la Convention. Il fut membre des trois Académies.
L’œuvre de Malesherbes — dont la majeure partie est encore inconnue du public — a pour objets principaux la dénonciation des injustices commises par le pouvoir politique et son administration ainsi que la définition des droits de l’homme. Juriste avant tout, Malesherbes voulait instaurer un nouvel état de droit en France; il sut trouver des accents poignants pour parler de l’oppression de ses concitoyens. Son œuvre, plus politique et philoso-

«
phique
que littéraire, s'organise autour de cinq thèmes,
qui correspondent aux dif fé re n tes étapes de sa vie.
Directeur de la Librairie, Male sh erbes, confronté aux
problèmes posés par la censure, rédige cinq Mémoires
sur la librairie (1758).
Constatant à la fois l'inefficacité
des condamnations du parlement et la complex ité inouïe
de la législation, il prône la plus grande tolérance pour
la publication des écrits (à l'exception des libelles diffa
matoires) et affirme que« le seul moyen de faire exécu
ter des défenses, c'est d'en faire fort peu».
Trente ans
p lu s tard, Malesherbes réaffirmera avec force son libéra
lisme en la matière dans so n Mémoire sur la liberté de
la presse (1788).
Protecteur de l'Encyclopédie, do nt il
partageait gran d nombre d'idées, il su t rester l'ami des
Philosophes, qu'il avait pourtant missio n de censu re r.
Président de la Cour des aides, Malesherbes inspire ou
rédige personnellement une vingtaine de Remontrances
adressées au roi.
Critiq ue s, souvent corrosifs, toujours
courageux, ces textes sont parmi les premiers émanant
d'un magistrat à faire le proc ès des lettres de cachet, de
l'arbitraire royal et du despotisme de l'adm inist ra tion.
Parmi les premiers aussi à parler des droits de la nation
et des devoirs du souverain.
Malesherbes n'hésita pas à
demander, dès 1759, la convocation des états généraux .
Il eut le courage de nier 1 'origi ne divine du pouvoir
royal.
Les remontrances les plus importantes sont celles
de 1771 sur la dissolution du parlement et celles de
1775 sur le système des impôts.
Bien qu'interdites de
publication, ces remontrances furent largement répan
dues et so u lev èren t l' entho usias me de l' op ini on publique
é cl air ée .
Retiré des affaires, Malesherbes rédige, à la demande
de son cousin Lamoignon, un Mémoire sur l'éducation
(1 783) dans le q ue l il fait l'é lo ge de Locke et de
R ous seau.
Tl se consacre ensuite à la botanique, à l' arbo
riculture et à l'agriculture.
Il consigne le fruit de ses
e x pé rie nc es dans les Idées d'un agriculteur patriote
(1786) et un Mémoire sur les moyens d'accélérer les
progrès de l'économie rurale en France (1790), sorte de
test amen t de 1' agronome qu'il était.
A la demande de Louis XVI, Malesherbes trava ille à
la rédaction de deux Mémoires sur le mariage et l'état
civil des pro!estants ( 1785-1786), dans lesquels il
d émo ntre avec habileté l'urgence d'une nouv elle lég isla
tion pour palli er 1' inefficacité et 1' injustice des lois exis
ta nt es .
Ce travail pondéré et convaincant pèsera dans la
décision du roi de rendre un édit de tolérance en faveur
des protestants (29 nov.
1787).
De nouveau aux affaires, Malesherbes ré d ig ea deux
mémoires sur le malaise politique fran çais .
Le Mémoire
sur la néc ess ité de diminuer les dépenses ( 1 7 87 ) est
u ne tragique e1: prophétique mise en g arde, faite au roi.
Malesherbes prévient celui-ci que «le conflit qui l'op
pose à la nation peut précipite r le royaume dans des
troubles dont nul ne peut pré vo ir la fin ».
Le Mémoire
sur la situation présente des affaires (1788) est un texte
capital, qui livre totalement la pensée politique de
Malesherbes au seuil de la Révolution.
Il y déclare
né cess aire s une Assemblée nationale élue et permanente,
une Constitution écrite, une loi qui garantisse la liberté
des citoyens et une répartition générale et pro po rtion
nelle de l'impôt.
Malesherbe� ne fut pas entendu.
Mais cet au the ntiq ue
libéral, partisan d'une monarchie à l'anglaise, peut êtr e
com pté au nombre des grands défenseurs des droits de
l'homme et prendre pla ce dans le panthéon des penseurs
politiques du xvm• siècle.
BIBLIOGRAPHIE Mémoires sur la librairie et la liberté de la presse, publiés
par G.E.
Rodwell, C hap e! Hill, 1979; Malesherbes.
le Pouvoir et
les Lumières, textes réunis par M.
Vyrna, Paris, Éd.
France
E mp ir e , 1989; les Remontrances de Malesherbes, introduction d'Élisabeth
Badinter, Paris, 10118, 1978; 1.-J.
Rousseau
Chrétien-Guillaume de Lamoignon de Malesherbes : correspon
dance, Paris, Flammarion, 1991.
A consulter.
-Boissy d' Angla s, Essai sur la vie et les écrits de
M.
de Malesherbes.
3 vol., 1819-1821; l'admirable thèse de
Pierre Grosclaude, Malesherbes et son temps, 2 vol., Fischba
cher, 1961, ainsi que son Jean-Jacques Rousseau et Malesher
bes.
Fischbacher, 1960; Jean Egret, , dan s Revue d ·histoire
moderne et contemporaine, 1956..
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