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Louis Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit

Publié le 22/02/2012

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Avec Voyage au bout de la nuit, Céline dénonce les horreurs de la guerre, de la colonisation, de l'exploitation capitaliste. Adepte du « parler vrai », il s'attaque aux représentations idéalisées des combats et aux idéologies. Le protagoniste du roman, Ferdinand Bardamu, incarne, en effet, un individu très ordinaire, qui séduit par une parade militaire, s'engage dans l'armée sur un coup de tête. Il se retrouve confronté aux dures réalités des combats qui se déchaînent dans l'est de la France, durant la Première Guerre mondiale.

« Céline, Voyage au bout de la nuit (1932) Lecture analytique Intro : Louis Ferdinand Céline (1894-1961) a marqué le XX ème Siècle de son œuvre si particulière : la publication de Voyage au bout de la nuit a été un événement.

En rompant avec la tradition romanesque, il a permis le développement du genre en 1950.

En effet, ce premier roman est représentatif d’un style insolite, reposant notamment sur la langue populaire. Cette œuvre évoque les tribulations de Ferdinand Bardamu, le narrateur, qui nous livre, dans une 1 ère partie, ses peines face à la guerre, la détresse, la maladie, ou nous conte, dans la seconde partie, son expérience de médecin. L’extrait suivant relate l’épisode où le personnage est confronté à la guerre, après s’être engagé sur un coup de tête.

Personnageordinaire, Bardamu transmet toutes ses émotions, loin de toute considération héroïque.

On peut donc se demander quellereprésentation de la guerre peut être traduite par un tel narrateur ? Nous verrons tout d’abord que Bardamu, anti-héros, est le 1 er témoin des combats ; ensuite, nous montrerons que ce regard de l’humanité bafouée est un moyen de dénoncer la guerre. I Bardamu :Anti-héros et témoin principal : Ce texte est extrait de la 1 ère partie du roman.

Bardamu s’est engagé sur un coup de tête dans l’armée, simplement parce qu’il avait été séduit par une parade militaire.

Ici, il découvre l’horreur d’être au front et comme il est le narrateur interne, il nous livre sesréflexions.

Ainsi le texte comprend de nombreux modalisateurs : « lâche » (l.1), « fous héroïques et déchaînés » (l.

2), « plusenragés » (l.

5 et 6), « tellement plus vicieux » (l.

7), « croisade apocalyptique » (l.

8), « foireux » (l.21), « crétin » (l.34).

Lenarrateur nous fait part également de ses sentiments : « effroi » (l.1), « perdu » (l.1), « mon frère peureux » (l.

21), « j’étaisdépucelé » (l.

27).

Bardamu se révèle être le contraire du soldat courageux : l’auteur nous expose avec réalisme les émotions d’unêtre humain en proie à l’horreur. L’engagement de Bardamu est absurde, comme le souligne le paratexte, puisqu’il s’est engagé sur un coup de tête.

Absurde aussil’agitation frénétique sur le front que décrit le narrateur au début du passage (l.

2 à 8). De plus, chez Céline, il y a des amitiés ou des amours précaires.

Devant la menace du fort, deux faibles se sentent solidaires : l.

21et 22, le narrateur aurait souhaité sympathiser avec « son frère peureux » mais ils n’ont aucun moyen de s’opposer aux nécessitésqui les séparent.

Dans le choix des pronoms, la solidarité se distingue aussi : « Nous » (l.

7) et « on » (l.9). Bardamu se dit « lâche » dès la première ligne, il préférerait être ailleurs mais ne peut fuir ces lieux où il est insupportable de rester.Il aurait préféré « voler » pour échapper à ça (l.

33 à 36).

Le texte proclame qu’il faut avoir peur de la mort : « de la prison, on ensort vivant, pas de la guerre » (l.36).

Premier témoin, Bardamu nous livre ainsi de nombreuses maximes, avec du présent de véritégénérale, qui relèvent du bon-sens populaire : « Tout le reste, c’est des mots » (l.

36), « Il y a bien des façons d’être condamnés àmort » (l.

36). En outre, la simplicité du narrateur est exprimée aussi par le langage employé, sorte de langue parlée populaire.

Céline a créé unelangue littéraire fondée sur ce qu’on pouvait saisir à l’époque à Paris et sa banlieue.

Ici se mêlent habilement registre familier etlangage plus châtié.

Pour le registre familier, on peut citer : « armés jusqu’aux cheveux » (l.

2), « comploteurs » (l.3), « caracolant »(l.4), « foireux » (l.21), « mariole » (l.30), « carne » (l.31).

On peut y ajouter les formes emphatiques empruntées aussi au langageparlé : « Et il n’était pas près de s’éteindre le charbon ! » (l.29 et 30) ou les phrases raccourcies propres à l’oral: « faut être » (l.27).En ce qui concerne le langage soutenu, on peut relever : « apocalyptique » (l.8), « menu » (l.

15), « abomination » (l.15), « méprise »( l.

17) etc.

Il s’agit de jouer avec la langue, de créer un délire verbal qui rejoint le délire sur le front.

De plus, ça prouve aussi qu’unroman de Céline n’est pas une narration mais un cri : la distance entre l’émotion et le mot est abolie.

On le voit aux points desuspension, éléments d’un dialogue rapporté et signes d’émotion dans le parlé (l.

1, 12, 26). Bardamu se retrouve donc prisonnier sur le front, victime d’une horreur qu’il n’avait pas soupçonnée ; dans sa description, il nousavoue sa peur, ose se présenter en anti-héros, finalement humain et lucide, pour mieux dénoncer l’inacceptable : la guerre.. »

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