L’organisation de l’espace - Thérèse Raquin de Zola
Publié le 14/03/2020
Extrait du document
mêmes faits. La haine et le dégoût que Thérèse et Laurent finissent par éprouver l’un pour l’autre sont le reflet de la haine et du dégoût de Thérèse pour Camille.
Des espaces fermés sur eux-mêmes
Les lieux romanesques sont souvent des espaces confinés. L’appartement des Raquin donne dans le passage du Pont-Neuf par « une allée obscure et étroite ». De la fenêtre de sa chambre, Thérèse ne peut contempler qu’une « grande muraille noire, crépie grossièrement, qui monte et s’étend au-dessus de la galerie » (p. 36). Les trois pièces que les Raquin habitent lui semblent « effrayante de solitude » (p. 48). La chambre que Laurent occupe durant son célibat n’est guère plus avenante : c’est un « trou étroit » (p. 92) dans lequel il étouffe. Placée à l’écart, sur l’île de la Cité, la morgue prend, par définition, les dimensions d’un vaste tombeau, avec tous ses cadavres étendus sur les dalles (p. 125). Les lieux du roman évoquent toujours plus ou moins une prison ou un cercueil.
LA DRAMATISATION DE L’ESPACE
La description des lieux concourt à la mise en place d’une atmosphère tragique. Ces lieux sont funèbres, étouffants, nauséeux et circonscrivent en définitive un espace tragique.
Des lieux funèbres
Le passage du Pont-Neuf invite au crime. Zola le décrit comme une « galerie souterraine vaguement éclairée par trois lampes funéraires » (p. 33). À la nuit tombante, c’est un « coupe-gorge » (p. 33). La mercerie revêt, de son côté, l’apparence d’un « caveau » (p. 55). Quand Thérèse la découvre pour la première fois, elle a l’impression de descendre dans « la terre grasse d’une fosse » (p. 47). Après la mort de Camille, l’étalage de la mercerie, « jauni par la poussière », semble « porter le deuil de la maison » (p. 131).
Le jour du crime, la Seine et ses berges offrent les mêmes particularités. Le ciel, les arbres, pourraient constituer un paysage souriant, mais c’est l’époque où la campagne « sent la mort venir avec
«
D'a,tres ocdcolts soot meotioooés o" dépelats.
Cortalas symbo7
sent un passé révolu : le chapitre Il évoque ainsi l'existence des
Raquin à Vernon,
avant leur installation à Paris.
D'autres sont de
vagues
« ailleurs ,, : Thérèse rêve par exemple de quitter Camille pour
aller vivre
avec Laurent (p.
91).
D'autres enfin se réduisent à de
simples indications topographiques :
« Arrivé à la barrière de Clichy,
il [Laurent] prit un fiacre,
il se fit conduire chez le vieux Michaud, rue
de Seine » (p.
1115).
Mais ces lieux secondaires ne structurent pas le
roman.
1 La distribution des espaces
Les trois principaux lieux sont en rapport étroit avec l'organisation
du récit.
La morgue fonctionne paradoxalement comme un lieu de transi
tion.
Tout
s'y ac:hève et tout y recommence.
L'identification du
cadavre de Camille marque officiellement son décès 1 et, avec lui, la
fin
de l'emprisonnement conjugal de Thérèse.
C'est, en même
temps,
la possibilité pour elle et Laurent de se marier, de vivre le bon
heur auquel ils aspiraient et pour lequel ils ont tué.
L'action se
déroule donc dans l'appartement des Raquin
avant et après l'épi
sode de
la morgue {chap.
XIII).
La symétrie spatiale est parfaite.
La symétrie des espaces reprend la symétrie de l'intrigue.
Si Thé
rèse et Laurent clécident de ne pas changer d'appartement, c'est
pour ne pas abandonner Mme Raquin et ne pas
la laisser s'occuper
seule
de la boutique, mais aussi parce que le remariage de Thérèse
fait écho à sa première union
avec Camille.
Le parallélisme est d'au
tant plus saisissant que
le spectre de Camille revient hanter leurs
nuits :
« Thérèse n'était pas veuve, Laurent se trouvait être l'époux
d'une femme qui avait déjà pour mari un noyé
» (p.
207).
L'étude du dispositif spatial montre ainsi que l'action de
Thérèse
Raquin est construite autour de la reprise des mêmes gestes et des
1.
A l'époque de Zola comme de nos jours, aucune personne n'est officiellement décla
rée décédée tant qu'on n'a pas retrouvé son corps.
Elle est jusqu'alors considérée
comme disparue,
78 PROBLÉMATIQUES ESSENTIELLES.
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