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L'OEUVRE DE SAINT-ÉVREMOND

Publié le 28/03/2012

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SAINT -ÉVREMOND (1614-1703)
La vie et l'oeuvre de Saint-Evremond attestent la permanence et la vivacité de l'esprit de liberté tout au long du XVIIe siècle. Encore enfant au moment du procès de Théophile, il est un vieillard illustre et écouté dans le temps que paraissent les oeuvres de Fontenelle et de Bayle: il s'émerveille alors de constater que <>. Sa vie jette comme un pont entre le libertinage de l'époque de Richelieu et de la Fronde et le premier âge des Lumières. Vie étonnante que celle de ce gentilhomme normand, militaire philosophe, qui, après avoir été embastillé deux fois, dut quitter la France à 48 ans pour n'y plus revenir. Charles de Marquetel, seigneur de Saint-Evremond, était issu d'une famille noble du Cotentin et son père commandait la compagnie des gendarmes de Henri de Bourbon, gouverneur de Normandie. Après avoir reçu l'éducation des Jésuites à Paris, et commencé des études de droit à Caen, le jeune Charles prend un brevet d'officier, se distingue au :siège d'Arras en 1640, devient peu après lieutenant des Gardes du Grand Condé et, au service de cet illustre prince, il combat à Rocroi, à Fribourg, à Nordlingen où il est blessé. La guerre ne lui avait pas ôté le goût des lettres (il avait, en 1738, brocardé la naissante Académie française par une Comédie des Académistes) et, au témoignage de son biographe,

« 430 MANUEL D'HISTOIRE LITTERAIRE DE LA FRANCE hardis et volontiers irrévérencieux à l'égard des valeurs reli­ gieuses.

Ayant pris la liberté de railler Condé, il quitte son armée.

Il trouve, dans les événements de la Fronde de quoi exercer sa verve ironique .

.Tout en étant du parti de Mazarin, il est mis à la Bastille par le cardinal.

Devenu maréchal de camp en 1651, il aurait pu toutefois continuer une 'brillante carrière.

Malheureusement, il eut l'audace .·d'écrire dans une lettre à son ami Créqui sur la Paix des· Pyrénées, tout le mal qu'il pensait de Mazarin.

La lettre fut découverte deux ans plus tard dqns une perquisition pour l'affaire Foucquet.

Suffit-elle à provoquer la colère du jeune roi? Colbert n'avait-il pas vu dans cet ami de ses adversaires un -esprit indépendant et bril­ lant, donc dangereux, et cette lettre ne fut-elle pas un bon prétexte pour écarter un sujet trop indocile?, .

· Saint-Evremond s'exila.

Après un passage en Hollande,· il s'installait à Londres où une pension du roi d'Angleterre assurait son ·existènce.

Là il rencontre Hobbes.

Un nouveau séjour en Hollande (1665-1670) lui permet de mieux connaître Vossius et Spinoza.

De retour en Angleterre, il est l'écrivain le plus remar­ qué de la petite èolonie française qui s'accroit par la venue des émigrés et que visitent des voyageurs de plus en plus nombreux.

Saint-Evremond ·est un sage de bonne compagnie: · · « il avait les yeux bleus, vifs et· plein de feu, une physionomie spirituelle, un souris malin ».

· En correspondance àvec ses amis parisiens (comme La Fontaine), le gentilhomme exilé donne à ses compatriotes, bien avant Voltaire, le goût.

de l'Angleterre libérale.

Il devient le familier de la duchesse de Mazarin qui s'est fixée à Londres, il goûte une vieil·lesse paisible (en 1698, on le nomme gouver­ neur du Parc de Saint James).

Le gouvernement français l'avait; ·en 1689,.

invité à revenir dans· son pays.

Saint-Evremond refusa.

Ses dernières années fu'rent celles d'une retraite solitaire parmi les chats, les chiens et les oiseaux dont il avait peuplé sa maison et _qui lui donnaient le spectacle de la vie.

Marquant une indifférence réfléchie à l'égard des choses de la religion, il meurt en refusant le secours des cultes.

Il eut l'honn-eur unique ppur un Français d'être inhumé dans l'abbaye de West- minster.

· « Un oracle· qu'on consultait de.

toutes parts sur toutes les matières qui regardent les belles~lettres et les ouvrages de l'esprit.» Tel apparaissait Saint-Ëvremond à l'auteur de la notice nécrologique publiée en 1703 dans le Mercure galant.

Si l'on ajoute que l'écrivain fai-. »

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