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L'indifférenciation sexuelle dans le Conte de Floire et Blanchefleur

Publié le 06/04/2011

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Au Moyen-âge, le héros était principalement masculin et s’épanouissait dans un contexte guerrier. Toutefois, la tradition narrative prévoit quelques espaces à l’expression de la prouesse féminine. Les romans idylliques ont connu un certain succès à l’époque médiévale. Le Conte de Floire et Blanchefleur figue ainsi parmi les œuvres fondatrices de la littérature narrative sentimentale. Composée par un clerc du XIIème siècle, Robert d’Orbigny, l’œuvre retrace les péripéties d’un couple de très jeunes gens, Foire et Blanchefleure, qui sont épris l’un de l’autre, mais se retrouvent séparés à cause des lois patriarcales et sociales qui régissent la société. En effet, le roi païen Félix n’hésite pas à mettre en péril la vie des héros pour faire respecter les lois et éviter le mariage de son fils avec la fille d’une captive chrétienne. Pourtant, les deux amants se vouent un amour grandissant qui transcende les disparités sociales ou religieuses. Cette relation d’amour réciproque et relativement égalitaire pourrait nous laisser croire qu’hommes et femmes sont susceptibles de partager le renom de leurs aventures. C’est dans cette conception que s’inscrit cette citation de Marion Vuagnoux-Uhlig extraite du livre le couple en herbe : « La représentation indifférenciée de l’échange amoureux, de même que le rôle déterminant des personnages féminins, esquissent les contours d’une relation fondée sur l’équilibre des sexes «.

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« sarrasin permet l'application d'un art pacifique qui élude la différence sexuelle.

En d'autres termes, en ne partant pasdu postulat qu'un sexe est davantage enclin à l'érudition, là où l'autre serait plus disposé à l'apprentissage ducombat, une équité parfaite, un équilibre est établi entre le masculin et le féminin.

En outre, leur ressemblance estencouragée par leur développement commun : ils sont nourris, élevés et couchés ensemble.

Les deux êtres semblentne former plus qu'une seule et unique entité et à la fusion intellectuelle vient s'ajouter également la ressemblance ducorps.En effet, le conte de floire et blancheflore met en évidence l'extrême ressemblance physique des deux jeunesamants.

Déjà l'enfance est une période pendant laquelle la distinction entre garçons et filles n'est pas évidente.Mais entre les deux amants, la ressemblance physique semble aller jusqu'à une symbiose totale entre les deux corps.Les deux amants, au delà de partager la même jeunesse, rayonnent d'une même beauté : « et de biautés'entresambloient » (v220).

Cette ressemblance suscite différents sentiments chez les autres personnages del'œuvre, qui expriment à la fois leur admiration mais aussi leur trouble et leur confusion.

Aussi, la mère deBlancheflore, qui assure la garde des enfants, ne « savoit le quel des deus plus cier avoit » (v 187-188).

Chacundes deux enfants semblent s'approprier physiquement les caractéristiques de l'un et de l'autre ; aussi flore renvoieaux yeux des autres personnages une apparence féminine, en témoigne la confusion de l'émir qui croit voir deuxfemmes s'enlacer, là où en réalité il s'agissait de blancheflore dans les bras de flore.

La cachette dans la corbeilleest la première étape qui tend à féminiser Floire.

Ce-dernier passe pour une jeune fille et est complètementdépourvu des caractéristiques symboliques de la masculinité.

Et cette apparence de jeune fille le rapproche defaçon évidente de sa bien-aimée.

Lors de l'épisode du procès des deux amants, leur ressemblance suscite un certainémoi chez les barons et qui sont presque enclin à faire grâce au couple : « De lor biauté tot s'esbhairent quant upalais entrer les virent.

N'a si felon home en la cort qui de pitié por eus ne plort.

Molt volentiers dont trestornaissentle jugement se il osassent.

Mais li rois fu si fort iriés que d'aus ne li prendoit pitiés » (vers 2925-2930).

Par ailleurs,leur beauté incite l'émir à les épargner et lui-même épouse Gloris pour se conformer au modèle conjugal incarné parFloire et Blancheflore.

Le conte détaille la similitude des enfants et donne à voir leur perfection symétrique.L'indifférenciation des sexes est une valeur positive qui sauve les jeunes gens d'un destin tragique, car la vue deleur beauté identique rend la mise à mort impossible.

Le conte détaille la similitude des enfants et donne à voir leurperfection symétrique.

La figure de la mère, en ce sens, se veut clémente en assurant la protection des jeunesenfants contre un père qui marque l'autorité et l'interdit. En effet, l'analyse du couple parental dans l'œuvre révèle que ce-dernier marque la détermination des rôles sociauxdes sexes.

Cette distribution des rôles sociaux des sexes s'inscrit dans une logique traditionnelle.

A commencer parle père qui jouit d'un pouvoir distribué et défini par les normes sociales médiévales traditionnelles.En effet, le père, le roi païen félix, est dès le début du conte de flore et blancheflore associé à la violence et àl'affirmation de valeurs guerrières.

Le père exprime son opposition à l'idylle de floire et blancheflore car il craint queson fils abandonne sa carrière prédestinée de chevalier au profit de sa relation d'amour avec blancheflore.

De puis ladifférence religieuse entre les deux enfants est un motif du refus du père de les voir mariés, puisqu'en effet floire estpaïen alors que blancheflore est chrétienne.

Et c'est en ce sens une opposition fondamentale de la culturemédiévale.

Le conte de flore et blancheflore donne à voir l'image d'un père tout puissant qui formule l'interdit et meten péril l'idylle amoureuse des deux jeunes gens.

L'autorité patriarcale est donc ici bien assumée et représentéedans le conte.

La mésalliance permet de mettre en évidence le pouvoir du père.La mère, à l'inverse du père, manifeste davantage d'empathie, et les caractères se compensent.

La mère de Floireapparait comme une conseillère, plus que comme quelqu'un qui condamne et exprime la prohibition.

Elle ne veut pasagir au détriment du bien-être de ces enfants, et elle tente d'y satisfaire tout en répondant aux exigences dulignage.

Elle se fait non seulement la conseillère avisée des enfants mais encore celle de son époux : par exemple,elle empêche son époux d'exécuter son projet de trancher la tête de la jeune chrétienne, et suggère la vente de lajeune fille à des marchands en route pour Babylone, proposition qu'accepte le roi felix : « Sire, fait el, por Dieu,merchi ! A cest port a molt marcean de Babilone, bien manans.

Au port le fai mener et vendre, grant avoir puésilloesques prendre.

» (v410-114).

La mère, tout en préservant les jeunes amants, ménage les intérêts lignagers.

Enplus de formuler des recommandations qu'elle adresse tant aux enfants qu'à son époux et de jouer un rôleprotecteur important, ce qui la place sous le paradigme de la maternité, la reine se montre également rusée enélaborant des stratégies.

Aussi, elle use d'un leurre en érigeant un tombeau décoré en l'honneur de Blancheflorecensé soulager la peine de son fils aux vers 557-564 : « Cele piere qui sus gisoit de tres fin marbre faite estoit, inde,vert et gausme, vermel ; molt reluisoit contre solel, si fu entaillie environ de la trifoire Salemon.

Entremis i sont acristal d'or et d'argent tot li esmal.

» Toutefois, le dessein du stratagème n'est pas atteint, car devant la peine deson fils et son désir de suicide, elle avoue la supercherie.

Félix n'a pas d'autre choix que de laisser son fils partir à larecherche de blancheflore.

Les agissements de la mère donnent à penser d'une façon générale la faculté de lafemme à concevoir des stratagèmes en vue de satisfaire des intérêts.

C'est une vision particulière que le conte meten exergue de la femme et des capacités dont elle jouit.

Toutefois, cet équilibre des sexes est ébranlé par desstructures sociales et un héritage familial conséquent, et la figure féminine s'efface progressivement pour laisserplace à une prédominance de la figure masculine. Bien que le roman donne à voir dans l'échange amoureux des deux amants et dans la présence importante de lafigure féminine une indifférenciation sexuelle, l'équilibre des sexes n'est pas absolue.En effet, l'idylle des deux jeunes gens s'épanouissant dans un contexte d'indifférenciation culturelle, mais après sonmariage avec Blancheflore, Floire devient un roi chrétien et un jeune cavalier.

Les jeunes héros doivent à présentrespecter les codes traditionnels qui fondent la société médiévale.

Floire acquière progressivement les traits propresà la masculinité, effaçant les caractéristiques d'une féminité passée.

Quand le jeune chevalier devient un roi. »

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