L'importance du thème de la mort – TOUS LES MATINS DU MONDE

« Pleurs le leitmotiv du film , pièce emblématique du sens profond d’une musique née de la douleur et méditant sur le c œur de la condition humaine , la mort. ► Sensible dans la peinture – SC après les apparitions de son épouse commande à son ami le peintre Baugin une nature morte qui « représente »la table à écrire près de laquelle sa femme était apparue »chapitre 7 ; or au chapitre12, quand SC et Marin Marais se rendent à l’atelier du peintre , SC définitla nature morte comme « tous les plaisirs du monde qui se retirent en nous disant adieu.

» ; la nature aux gaufrettes évoque les « oublies » etle vin, rites alimentaires d’un amour partagé , du désir qui dure par-delà la mort et que le tableau sublime .

Le roman comme le film signalentd’ailleurs les objets du tableau comme des objets du quotidien en les intégrant au décor .Ainsi, lors de l’arrivée de marin Marais sur la tablede la grande salle, sont posées bouteille clissée et gaufrettes dans leur plat d’étain, .Nature morte, le tableau fait bien référence à la mort, à cequi est « dans la nuit » mais il dit aussi la force de l’amour au-delà de la mort. Dans le film Yves Angelo (image) use aussi d’une autre référence picturale, le clair-obscur de Georges de la Tour.

Il est en harmonie avec la musique baroque ; plusieurs scènes du film sont éclairées par une chandelle : la descente à la cave avant la 1 èreapparition de Madame de Sainte Colombe, quand SC va chercher la bouteille clissée de vin mais aussi quand il recompose le tableau de Baugin au chapitre15 et que Marin Marais l’accompagne.

Mais la scène la plus intéressante est la dernière : la chandelle éclaire les deux musiciens, puis quandils ont posé leur verre, elle éclaire de sa flamme celui de marin Marais, signalant la transmission du maître à l’élève ; le clair-obscursymbolise l’entre-deux, ce pont entre morts et vivants qu’est la musique baroque : « je crois qu’il faut laisser un verre aux morts » dit MarinMarais , « un petit abreuvoir pour ceux que le langage a désertés»mais aussi un autre entre deux , celui de la transmission , pont entre lemaître qui va mourir , être pris par l’ombre et l’élève qui va poursuivre l’ œuvre avant de la transmettre (prologue et épilogue du film ). « Tout ce que la mort ôtera est dans la nuit » (chapitre 12) ; dans le clair-obscur de la cabane le verre de Marin Marais est éclairé par lachandelle, tandis que celui de SC « est dans la nuit ». On peut ajouter aussi de la part de Corneau le choix du plan fixe qui évacue tout mouvement de caméra, plaçant le récit sous le signe de l’immobilité comme si la vie s’était arrêtée à la mort de l’épouse. 3- Fonction religieuse- La mort est inséparable de la vision du monde janséniste.

Le noir est leur caractéristique dans le roman comme le film.

L’épée de Monsieur de SC porte ciselée sur l’estocade la figure du nocher infernal armé de sa gaffe ; le manche de sa viole , dans le film , est terminépar une sculpture représentant une tête de femme voilée , emblème de la mort.

Monsieur de Sainte Colombe retiré dans sa cabane regarde lamort en face, compose une musique qui n’est pas divertissement mais méditation sur la misère et la condition humaine mortelle.

Proches desjansénistes , le violiste est à l’unisson d’un autre ami des Solitaires de Port-Royal , le philosophe Pascal qui écrit que « tout le malheur del’homme vient de ce qu’il est incapable de rester seul en sa chambre » , de regarder la mort en face . 4- Fonction initiatique- Elle concerne Marin Marais : musicien de cour, à l’opposé de son maître, il prend conscience de la fuite du temps après la mort de Madeleine.

En effet, le chapitre 26 s’ouvre sur une reprise du titre Tous les matins du monde mais avec une suite « sont sans retour » .Marin prend enfin conscience que l’essentiel n’est ni la vie de Cour, ni la musique divertissante, symbolisée dans le film parla Marche pourla cérémonie des Turcs composée par Lully pour la comédie –ballet de Molière Le Bourgeois gentilhomme mais celle de son maître et que samort lui en interdira définitivement l’accès.

Marin a compris que la musique était le langage de ceux que le langage à désertés , les morts , lesjeunes gens à la voix brisée parla mue , mais aussi qu’elle préexiste à la naissance , qu’on l’entend dans le ventre de sa mère .

Le musicienSainte Colombe proche de mourir met au monde le musicien Marin Marais ; l’épilogue du film montre que Marin Marais est devenumusicien puisqu’il peut « réveiller les morts »et faire apparaître Monsieur de sainte Colombe . Le thème de la mort est donc central dans le roman et le film par ses fonctions narrative, esthétique, religieuse.

La fonction initiatique du thème est cependant inséparable de la transmission.

Si l’art sublime la mort et l’amour, il transcende aussi la mort.L’épilogue du film réunit Sainte Colombe qui apparaît au seul Marin Marais, reconnu comme l’élève, dont le maître se dit « fier del’avoir instruit » en présence des élèves de Marin Marais âgé, qui assureront à leur tour la transmission.. »