L'hermeneutique
Publié le 30/12/2024
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Hans-Georg Gadamer
Francesca Manzari
Publications traduites:
Le Problème de la conscience historique, 1963.
L'Art de comprendre.
Écrits I : herméneutique et tradition philosophique, 1982.
Écrits II: herméneutique et champ de l'expérience humaine, 1991.
Qui suis-je et qui es-tu ? Commentaire de "Cristaux de Souffle" de Paul Celan, 1987.
Années d'apprentissage philosophique.
Une rétrospective, 1992.
L'Actualité du Beau, 1992.
L'Éthique dialectique de Platon, 1994.
L'Idée du bien comme enjeu platonico-aristotélicien, suivi de Le Savoir pratique, 1994.
Langage et vérité, 1995.
La Philosophie herméneutique, 1996.
Vérité et méthode, éd.
intégrale, 1996.
L'Héritage de l'Europe, 1996.
Philosophie de la santé, 1998.
Herméneutique et philosophie, 1999.
Nietzsche l'antipode : le drame de Zarathoustra, 2000.
Les Chemins de Heidegger, 2002.
Esquisses herméneutiques: essais et conférences, 2004.
Au commencement de la philosophie, 2001.
Herméneutique
Plan en 5 concepts définissant l’herméneutique de Gadamer.
1.
Le concept d’expérience (De Begriff des Erlebnisses)
2.
Le concept de jeu (Der Begriff des Spiels)
3.
Notion de préjugé (Vorurteil)
4.
Notion d'expérience herméneutique (die Hermeneutischen Erfahrung)
5.
Concept de conversation herméneutique (traduction)
Ainsi, il est certain qu’il n’existe pas d’entendement qui soit libre
de tout préjugé, pour autant que la volonté de notre connaissance
doive avoir pour objectif de nous en libérer.
De toutes nos
investigations, il émerge que la certitude obtenue en utilisant des
méthodes scientifiques ne suffit pas à garantir la vérité.
Cela est
particulièrement vrai pour les sciences humaines, ce qui ne
signifie pas qu’elles soient moins scientifiques : au contraire, cela
justifie la prétention d’humanité qui a toujours été la leur.
Le fait
que dans un tel savoir celui qui sait entre en jeu montre
certainement les limites de la méthode, mais non de la science.
Plus exactement, ce que l’outil de la méthode n’obtient pas doit
— et en réalité peut — être obtenu par une discipline
d’interrogation et d’enquête, discipline qui garantit ma vérité.
Hans-Georg Gadamer, Wahrheit und Methode, Grundzüge einer philosophischen Hermeneutik, Gesammelte Werke 10,
Hermeneutik I, 1960, Tübingen, Mohr, 1990, p.
494.
Trad.
J.
M.
Le titre d’« herméneutique », [...] recoupe des niveaux de réflexion
très différents.
L’herméneutique désigne en premier lieu une pratique
guidée par un art.
C’est ce qu’évoque déjà la formation du terme qui
vient qualifier une « technè ».
L’art dont il s’agit est celui de
l’annonce, de la traduction, de l’explication et de l’interprétation et il
renferme naturellement l’art de comprendre qui lui sert de
fondement et qui est toujours requis là où le sens de quelque chose
n’apparaît pas ouvertement ou sans équivoque.
Hans-Georg GADAMER, « Herméneutique classique et philosophique », La philosophie herméneutique, Paris, puf («
Épiméthée »), 1996, p.
85.
La tâche de l’herméneutique est d’éclairer cette merveille de la
compréhension qui n’est pas une communication mystérieuse des
âmes, mais une participation à un sens commun.
Hans-Georg Gadamer, « Du cercle de la compréhension », Ibid., p.
74.
2.
La tâche constante de l’interprétation est de risquer des
projections justes et conformes à la chose, c’est-à-dire des
anticipations qui doivent être corroborées « à même les choses ellesmêmes ».
Il n’y a ici d’autre « objectivité » que celle qui résulte de
l’élaboration de l’opinion préalable qui s’est confirmé.
Dès lors,
l’interprète ne se précipitera pas sur son « texte » sur la foi de
l’opinion préalable toute prête qui vit en lui.
Au contraire il
interrogera expressément l’opinion préalable qui vit en lui quant à sa
légitimation, cela veut dire quant à son origine et à sa validité.
(…).
Ibid., p.
77-78.
1.
Le concept d’expérience (De Begriff des Erlebnisses)
L’expérience esthétique n’est pas juste une sorte d’expérience parmi d’autres,
mais représente l’essence de l’expérience per se.
De même que l’œuvre d’art en
tant que telle est un monde pour soi, de même également ce dont on fait
esthétiquement l’expérience, c’est-à-dire en tant qu’expérience vécue (Erlebnis),
indépendamment de toute connexion avec l’actuel.
L’œuvre d’art semblerait
presque être par définition une expérience esthétique : autrement dit, quoi qu’il
en soit, la puissance de l’œuvre d’art arrache soudain la personne qui en fait
l’expérience à son contexte de sa vie, et pourtant le met en relation avec le tout
de son existence.
Dans l’expérience de l’art est présente une plénitude de sens
qui appartient non seulement à ce contenu ou cet objet particulier, mais vaut
plutôt pour le tout du sens de la vie.
Une expérience (Erlebnis) esthétique
contient toujours l’expérience d’un tout infini.
Précisément parce qu’elle ne se
combine pas avec d’autres expériences pour former un flux d’expérience
ouvert, mais représente immédiatement le tout, sa signification est infinie.
Ibidem, p.
75-76.
Trad.
J.M.
2.
Le concept de jeu (Der Begriff des Spiels)
Si nous examinons comment le mot « jeu » est utilisé en nous
concentrant sur ses sens soi-disant métaphoriques, on entend parler
du jeu de la lumière, du jeu des vagues, du jeu des engrenages et des
pièces d’une machine, du jeu des membres entre eux, du jeu des
forces, du jeu des moucherons, et même de jeux de mots.
Dans tous
les cas, ce qu’on entend par là est un mouvement de va-et-vient qui
n’est pas lié à un but particulier qui le porterait à une fin.
Corrélativement, le mot « Spiel » (jeu, jouer) signifie originairement
« dance », comme cela se retrouve dans de nombreuses formes (p.
ex.
Spielman, le jongleur).
Le mouvement du jeu n’a pas de but qui le
porte à une fin : bien plutôt, il se renouvelle par une répétition
constante.
[…] le mouvement du jeu en tant que tel n’a pas de
substrat.
C’est le jeu qui est joué — peu importe qu’il y ait ou non un
sujet qui le joue.
Le jeu est une occurrence de mouvement en tant
que tel.
Dans notre concept de jeu, la différence entre croire et faire semblant se
dissout.
Ici, la primauté du jeu sur la conscience du joueur est
fondamentalement reconnue […] Il est caractéristique du jeu que le
mouvement n’est pas seulement sans but ni propos, mais aussi sans
effort.
Il se produit, pour ainsi dire, tout seul.
[…] La structure du jeu
absorbe le joueur, et le libère ainsi du fardeau de la prise d’initiative, qui
constitue la véritable difficulté de l’existence.
Le fait que le mode d’être du jeu soit si proche des formes mobiles de la
nature nous permet de tirer une conclusion importante.
Il n’est
évidemment pas correct de dire que les animaux jouent aussi, ni,
métaphoriquement, que l’eau et la lumière jouent aussi.
Bien plutôt, au
contraire, nous pouvons dire que l’homme joue aussi.
Son jeu aussi est un
processus naturel.
Le sens de son jeu aussi, précisément parce que — et
dans la mesure où — il fait partie de la nature, est une pure autoprésentation.
Ainsi, dans cette sphère, il devient finalement opportun de
distinguer entre sens littéral et sens métaphorique.
Mais plus encore, l’essence de l’œuvre d’art est connectée avec le
sens médian de jeu (Spiel au sens de jeu dramatique de théâtre).
Tout comme la nature est sans but et sans intention, de même
elle est sans effort, un jeu qui se renouvelle lui-même
constamment, et peut donc apparaître comme le modèle de l’art.
Ainsi Friedrich Schlegel écrit....
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