« Les gens ne s'intéressent pas aux héros heureux. Il leur faut du tragique, du mythique, du monstrueux, du terrifiant. »
Publié le 04/01/2013
Extrait du document
«
La souffrance serait un outil pour retenir l’héroïsme.
Le héros incarne une valeur, en fait son
idéal et va jusqu’au bout de son destin pour elle.
D ans la Princesse de Clèves de Madame de La
Fayette, l’héroïne éponyme représente un modèle de vertu.
Bien qu’éprise du duc de Nemour s, elle
va résister à son désir de partager cet amour et rester fidèle à son mari (en actions) jusqu’à sa mort
et même au -delà ; alors qu’elle pourrait se remarier avec le duc, elle refuse, à cause du « devoir »
moral que lui dicte sa raison, restant ainsi éternellement dévouée à son époux .
La fin du roman est
par conséquent tragique, la jeune princesse est seule, malheureuse, se sacrificie au nom de s on
exemplarité.
Dans un monde du paraître, elle est également une des seules à être sincère, mais
payera cher son extrême franchise, car après avoir avoué à son mari ses sentiments pour un autre, ce
dernier passionné, dévoré par la jalousie, mourra de douleur , ce qui l’incite à quitter la cour à se
retirer au couvent sous le poids du remords .
Mais sa décision au-delà de l’enchaînement tragique des
évènements est également influencée par l’éducation de sa mère, protestante.
Elle incarne donc
symboliquement les valeurs jansénistes, prônant la sincérité, la fidélité et l’usage de la raison au
détriment de certaines de ses pulsions.
Le héros favorise donc une réflexion et , malgré lui, enclenche un processus de « catharsis »
chez le lecteur, qui peut purger ses passions.
Cette dernière montre le destin tragique des héros qui
ont cédé à leurs passions, entraînant mort , fatalité ou désespoir.
En vivant ces destins malheureux
par procuration, les lecteurs sont censés prendre en aversion les passions qui les ont provoquées.
Pour que cette catharsis soit possible, il faut que les protagonistes imitent la réalité .
La catharsis fait
donc intervenir une représentation d'un acte réprimé par la morale et c'est cette représentation qui
permet au lecteur de se « défouler ».
Le héros sur qui tous les malheurs s'abattent est digne
d'intérêt, car provoquant chez le lecteur terreur et pitié, il enclenche ce mécanisme afin de le purger
de sa violence.
Dans le roman épistolaire
le s souffrances du jeune Werther de Goethe, le héros
éponyme romantique souffre un amour éconduit.
Wert her est tombé follement amoureux d’une
jeune fille qui décide de rester fidèle à son fiancé.
Le jeune
homme se retire alors, mais son esprit
enchaîné au tourment, ne réussissant à vaincre sa passion, il choisit comme solution le suicide, acte
extrême, témoin de sa douleur et de son désespoir de ne pouvoir être aimé.
Le lecteur connaissant
un chagrin d’amour pourrait donc développer une c atharsis et ne pas tomber dans l’hybris qui
consisterait à se suicider à caused’une « simple peine de cœur » .
Le docteur Frankenstein, dans le
roman éponyme de Marie Shelley, crée un héros monstrueux, fait de plusieurs morceaux de cadavres
humains à l'allure repoussante.
En plus de son apparence physique hideuse et terrifiante, il subit les
conséquences fatales de sa propre création.
Son créateur n’aura de cesse de vouloir le détruire ; la
créature s’insurgera contre lui et lui demandera des comptes .
Il fascine le lecteur par ses capacités
intellectuelles surhumaines, qui se pren dra peu à peu de compassion pour lui : un clone humain
monstrueux qui va vouer sa vie à un enchaînement sans fin d'évènements malheureux.Ce héros
souffre donc du fait que sa vie est soumise à une fatalité monstrueuse et inhumaine (à son image)
contre laquelle il ne peut rien.
C’est terrible ! Il y a ici à la fois une forme de répulsion liée au
caractère monstrueux, terrifiant du personnage et une forme de fascination de la part du lecteur.
Les malheurs du héros révèlent les malheurs des hommes et du monde, par extrapolation.
Dans le Rouge et le Noir de Stendhal, Julien Sorel est un jeune homme ambitieux, paysan au départ,
aspirant à une ascension sociale, sous la France du XIXème siècle.
Y parvenant jusqu’à un certain
point, il connaîtra la désillusion puis la déchéance.
Ce héros est doté d’une importante puissance de
révélation : ses souffrances sont emblématiques des désirs (inassouvis) qui ont pu être ressentis par
certains hommes au XIXème siècle.
Combien de jeunes gens pauvres, dans cette période
d’avène ment de la bourgeoisie, se sont pris pour ou ont rêvé d’imiter Julien Sorel ? Le lecteur porte
de l’intérêt à ce héros, car il a ainsi une visée didactique en donnant un aperçu sur les rêves des
classes sociales les plus basses et du poids des milieux qui peuvent entraver la liberté d’action des
individus, contre lequel le personnage tente de lutter.
Si le lecteur vient à ouvrir un roman, ce n’est
donc pas seulement pour se comparer à un héros parfait et heureux vivant dans le plus beau des
mondes.
Pour réellement se divertir, il lui faut aussi du tragique, du pathétique.
Certes l’homme a
besoin d’envier et de s’identifier au héros, t outefois, il doit trouver dans la vie de ce même héros des
évènements malheureux, des dilemmes, toutes sortes d’obstacles con traignants, qui feront que sa
2.
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