Les figures féminines dans la pièce : Le Misanthrope ou l'atrabilaire amoureux de Molière
Publié le 05/01/2013
Extrait du document
Madame, j'ai beaucoup de grâces à vous rendre : un tel avis m'oblige, et loin de le mal prendre, j'en
prétends reconnaître, à l'instant, la faveur, par un avis aussi qui touche votre honneur ; et comme je
vous vois vous montrer mon amie en m'apprenant les bruits que de moi l'on publie, je veux suivre, à
mon tour, un exemple si doux, en vous avertissant de ce qu'on dit de vous. En un lieu, l'autre jour, où je
faisais visite, je trouvai quelques gens d'un très-rare mérite, qui, parlant des vrais soins d'une âme qui
vit bien, firent tomber sur vous, madame, l'entretien. Là, votre pruderie et vos éclats de zèle ne furent
pas cités comme un fort bon modèle : cette affectation d'un
grave extérieur, vos discours éternels de sagesse et d'honneur, vos mines et vos cris aux ombres
d'indécence que d'un mot ambigu peut avoir l'innocence, cette hauteur d'estime où vous êtes de
vous, et ces yeux de pitié que vous jetez sur tous, vos fréquentes leçons, et vos aigres censures sur
des choses qui sont innocentes et pures, tout cela, si je puis vous parler franchement, madame, fut
blâmé d'un commun sentiment.
«
que de plus que vous on en pourrait avoirN’est pas un si grand cas pour s’en tant prévaloir; Et je ne
sais pourquoi votre âme ainsi s’emporte,Madame, à me pousser3 de cette étrange sorte.
CÉLIMÈNE
Et moi, je ne sais pas, Madame, aussi pourquoi On vous voit, en tous lieux, vous déchaîner sur
moi.
Faut -il de vos chagrins, sans cesse, à moi vous prendre ? Et puis-je mais4 des soins qu’on ne va
pas vous rendre? Si ma personne aux gens inspire de l’amour, Et si l’on continue à m’offrir chaque
jour Des vœux que votre cœur peut souhaiter qu’on m’ôte, Je n’y saurais que faire, et ce n’est pas ma
faute: Vous avez le champ libre, et je n’empêche pas Que
pour les attirer vous n’ayez des appas.
Cet extrait se situe au centre de la pièce, dans le nœud de l’action.
Il y a une certaine ironie dans l’extrait: ni Arsinoé ni Célimène ne sont très franches.
Le discours de
Célimène n’est à aucun moment sincère.
C’est la cas aussi pour Arsinoé → elles sont toutes les deux
hypocrites, bien qu’elles se défendent du contraire.
Sous l’apparence de propos amicaux, des propos blessants sont prononcés dans cette scène.
b- Le portrait d'Arsinoé par Célimène.
Célimène :
Madame, j'ai beaucoup de grâces à vous rendre : un tel avis m'oblige, et loin de le mal prendre,j'en
prétends reconnaître, à l'instant, la faveur, par un avis aussi qui touche votre honneur ; et comme je
vous vois vous montrer mon amie en m'apprenant les bruits que de moi l'on publie, je veux suivre, à
mon tour, un exemple si doux, en vous avertissant de ce qu'on dit de vous.
En un lieu, l'autre jour, où je
faisais visite, je trouvai quelques gens d'un très-rare mérite, qui, parlant des vrais soins d'une âme qui
vit bien, firent tomber sur vous, madame, l'entretien.
Là, votre pruderie et vos éclats de zèlene furent
pas cités comme un fort bon modèle : cette affectation d'un
grave extérieur, vos discours éternels de sagesse et d'honneur, vos mines et vos cris aux ombres
d'indécence que d'un mot ambigu peut avoir l'innocence, cette hauteur d'estime où vous êtes de
vous, et ces yeux de pitié que vous jetez sur tous, vos fréquentes leçons, et vos aigres censures sur
des choses qui sont innocentes et pures, tout cela, si je puis vous parler franchement, madame, fut
blâmé d'un commun sentiment.
à quoi bon, disaient -ils, cette mine modeste, et ce sage dehors que
dément tout le reste ? Elle est à bien prier exacte au dernier point ; mais elle bat ses gens, et ne les
paye point.
Dans tous les lieux dévots elle étale un grand zèle ; mais elle met du blanc et veut paraître
belle.
Elle fait des tableaux couvrir les nudités ; mais elle a de l'amour pour les réalités.Pour moi,
contre chacun je pris votre défense, et leur assurai fort que c'était médisance ; mais tous les
sentiments combattirent le mien ; et leur conclusion fut que vous feriez bien de prendre moins de soin
des actions des autres, et de vous mettre un peu plus en peine des vôtres ; qu'on doit se regarder soi-
même un fort long temps, avant que de songer à condamner les gens ; qu'il faut mettre le poids d'une
vie exemplaire dans
les corrections qu'aux autres on veut faire ; et qu'encore vaut-il mieux s'en remettre, au besoin, à ceux
à qui le ciel en a commis le soin.
Madame, je vous crois aussi trop raisonnable, pour ne pas prendre
bien cet avis profitable, et pour l'attribuer qu'aux mouvements secrets d'un zèle qui m'attache à tous
vos intérêts.
Cette tirade est composée de trois parties: l’introduction dans laquelle Célimène montre une intention
amicale à Arsinoé.
Célimène fait ressortir les traits pittoresques d’Arsinoé avec un procédé d’antithèse qui
crée un contraste: «Elle fait des tableaux pour couvrir les nudités; Mais elle a de l’amour pour les
réalités.».- Énumération des défauts d’Arsinoé.
Il y a donc une insistance sur le nombre de défauts qu’elle.
»
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