Les différents genres de roman ont pris peu à peu, au cours du XIXe siècle, par le goût du public, la première place dans la littérature. Vous essaierez d'en chercher les causes. Vous direz si cette prédilection vous parait justifiée, en choisissant des exemples parmi les grandes écoles littéraires de ce XIXe siècle.
Publié le 18/02/2012
Extrait du document
Le goût des romans ne date pas du xixe siècle. On sait que le Roman de la Rose et le Roman de Renart firent les délices du moyen âge; mais ils n'avaient rien de commun avec le roman de nos jours. C'est aux romans de chevalerie qu'il faut remonter pour trouver des ouvrages approchant de ce que nous appelons romans. Venus d'Espagne, où ils tournèrent la tête de don Quichotte et faillirent séduire Ignace de Loyola et Térèse d'Avila, ils suscitèrent en France, au xvie siècle, un véritable engouement. Le Gargantua et le Pantagruel de « maître Alcofribas Nazier « — alias François Rabelais — sont des romans burlesques, des satires politiques et sociales, des traités de pédagogie, singulier mélange où revit tout le xvie siècle qui ....
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style, « maudit en cent endroits », comme parlait la Marquise de Sevigne,
leur defend l'entree du temple de Memoire.
Its savaient leur métier, sans
quoi on ne les eat pas lus, mats avaient que la technique elementaire
et vulgaire : Hs ignoraient le grand art qui seul assure aux oeuvres la pe-
rennite.
Malgre ce dechet, que de noms ont surnage, les uns plus celebres, les autres moins : tons rappelant des ouvrages de valeur! C'est Fromentin,At artiste qui sait spenser et penseur qui sait voir »; c'est 10/furger, le boheme,
seeretaire ephemere de Tolstoi; qu'on lit encore en depit de ses negligences
et de son humour d'un gout douteux; c'est le « eonnetable des lettres »,
Barbey d'Aurevilly, qui, sur le tard, apres- avoir erre par divers sentiers, se retourne vers sa province natale et compose ce que Pon a nomme « un
cycle normand »; c'est Flaubert, l'ermite de Croisset, le styliste intran-
sigeant, qui suait pendant des jours sur une page de Madame Bovary ou de
Salammbo; c'est le tandem des freres Goncourt, naturalistes, artistes im-
pres.sionnistes an style souvent deconcertant, calque sur la sensation et affranehi de la syntaxa reguliere; c'est Zola, on le « naturalisme integral »,
l'homme de l'Assommoir et de la Terre, la cc bete » de l'honnete Ferdi-
nand Brunetiere; c'est Alphonse Daudet; dont le charmant Petit Chose ren-
ferme tant de lui-meme, dont le Tartarin rejouira eternellement les Francais,
y compris ceux du Midi, dont le pessimisme fon& sur une observation aigue s'accompagne toujourg.
elPhtitnaine sympathie; c'est Edmond About,
qui oublie° clang le Rai des Monti:wiles, l'Homme a l'Oreille eassee et le Nez
d'un Notaire son voltairianisme desuet; c'est Octave Feuillet, qui se survit
pent-etre plus encore par le filter que par le livre (Le Roman.
d'un jeune
homme pauvre); c'est Ferdinand!' Fabre, Ame tourmentee, Apre observateur
et peintre des milieux clerieaux, rest-6 a In porte de l'Academie pour avoir
indispose catholiques et libresTerisenrs avec son Abbe Tigrane; c'est Etck- mann-Chatrian, ou mieux Erckmann.
et Chatrian, &Avant l'un a Phalsbourg,
l'autre a Paris et forniant equipe »,, chantres et ntainteneurs de in fidelite
alsacienne-lorrane dans l'Amz Fritz; c'est le lamentable Guy de Maupassant,
reeve de Flaubert; aussi capable de lire duns lame du paysan normand que
dans cello, dos, salonniers, mais dun amoralisme desolant et qui sombre dans lit folio a 40, ans; c'est Cherbnliez, Suisse francais, « agent de liaison
comme- Mine de Steel entre le monde latin et le monde germanique», peintre
habile des incenrs cosmopolites Bans le Comte Kostia;'c'est Anatole France, snhtit et simple, inquiet et inquietant comme son maitre Renan, humaniste
parfait et humanitaire fumeux, l'auteur du Crime de Sylvestre Bonnard; c'est Pierre Loh, - de son vrai nom- Jitlien Viand, comme A.
- France s'appe-
lait Thibaut - qui deverse dans le roman ses impressions de marin et de
voyageur; peintre d'un Japan asses faux (Madame Chrysantheme) et de
matelots beaucoup plus vram(Peeheur d'Islande); c'est Joris-Karl Fluysmans,
eleve a la fois de Baudelaire et de Zola; pills, converti, auteur de' la Cathe-
drale et des Fouls de: Lourdes; e'est: Pant Bourget, dont la Mean& activite
litteraire debordera sue trente annees du ,ti mole; avec: ses, constructions
massives, : Disaple, PEtape, un Divorce; rEnzigre,
c'est Rene Bazin,
artiste et honnete homme, professeur et apetre social; qui ne fait guere quo
Commencer %nand finit le &Mole (La Terre qui ineurt est de 1899); c'est
Maurice Barres, qui, apreg, eetre confine dans le Culte s'ei evade
pour passer a celui de « la Terre et des Morts » et se consaere a t ftirtun de
l'energie nationale.
D'autres noms pourraient suivre le sien, nous l'avons
reserve pour la fin, car vers 1900 11 n'en kali guere de plus grand dans
les lettrog francaises, encore qtfil n'eerivit pas pour les foules.
Ir
Cette longue enumeration prouve abonclamment que le Roman rut cultive
d'extraordinaire tenon au lux' siècle et dune facon non mediocre.
Elle
prouve aussi, par In qualite des oeuvres mentionnees; que la predilection
des amateurs etait jUstilike; Ajoutons quo le Roman lest developp en se
transformant Sans cesse, (Arrant a Pappetit des lectetirS des Mets varies, con - formes a l'eer's gofits tres divers.
Et c'est IA, eroyons-nous, la raison principale d'un succes, qui depasse
de beaucoup celui de la poesie lyrique, par sa nature rrieme, reservee au
petit nombre e du theAtte, parce qu'irest plus facile de se procurer un
roman que d'assister a la representation d'nne piece de son gout.
Les stecles anterieurs.
s'ils offraient les principaux types de roman, en
style, « maudit en cent endroits », comme parlait la Marquise de Sévigné, leur défend l'entrée du temple de Mémoire.
Ils savaient leur métier, sans
quoi on ne les eût pas lus, mais ils «n'en avaient que la technique élémentaire et vulgaire : ils ignoraient le grand art qui seul assure aux œuvres la pé
rennité.
Malgré ce déchet, que de noms ont surnagé, les uns plus célèbres, les autres moins : tous rappelant des ouvrages de valeur! C'est Fromentin, « artiste qui sait penser et penseur qui sait voir » ; c'est Mùrger, le bohème,
secrétaire éphémère d& Tolstoï^ qu'on lit encore en dépit de ses négligences et de son humour d'un goût douteux; c'est le « connétable des lettres », Barbey d'Aurevilly, qui, sur le tard, après avoir erré par divers sentiers,
se retourne vers sa province natale et compose ce cpe l'on a nommé « un cycle normand » ; c'est Flaubert, l'ermite de Croisset, le styliste intran sigeant, qui suait pendant des jours sur une page de Madame Bovary ou de
Salammbô; c'est le tandem des frères Goncourt, naturalistes, artistes im pressionnistes au style souvent déconcertant, calqué sur la sensation et affranchi de la syntaxe régulière; c'est Zola, ou le « naturalisme intégral », l'homme de l'Assommoir et de la Terre, la « bête » de l'honnête Ferdi nand Brunetière; c'est Alphonse Daudet, dont le charmant Petit Chose ren ferme tant de lui-même, dont le Tartarin réjouira éternellement les Français, y compris ceux du Midi, dont le pessimisme fondé sur une observation aiguë s'accompagne toujours d'humaine sympathie; c'est Edmond About, qui oublie dans le Roi des Montagnes, VHomme à VOreille cassée et le Nez d'un Notaire son voltairiànisme désuet; c'est Octave Feuillet, qui se survit peut-être plus encore par le film que par le livre (Le Roman d'un jeune homme pauvre); c'est Ferdinand Fabre, âme tourmentée, âpre observateur
et peintre des milieux cléricaux, resté à la porte de l'Académie pour avoir indisposé catholiques et libres-penseurs avec son Abbé Tigrahe; c'est Erck- mann-Chatrian, ou mieux Erckmann et Chatrian, écrivant l'un à Phalsbourg, l'autre à Paris et formant « équipe », chantres et mainteneurs de la fidélité alsacienne-lorraine dans l'Ami Fritz; c'est le lamentable Guy de Maupassant, l'élève de Flaubert; aussi capable de lire dans Fâme du paysan normand que dans celle des salonniers, mais d'un amoralisme désolant et qui sombre
dans là folie à 4fr ans; c'est Cherbuliez, Suisse français, « agent de liaison comme Mme de Staël entre le monde latin et le monde germanique », peintre
habile des m^œurs cosmopolites dans le Comte Kostia; c'est Anatole France, subtil et simple, inquiet et inquiétant comme son maître Renan, humaniste parfait et humanitaire fumeux, l'auteur du Crime de Sylvestre Bonnard;
c'est Pierre Loti, — de son vrai nom Julien Viaud, comme A. France s'appe lait Thibaut — qui déverse dans le roman ses impressions de marin et de voyageur, peintre d'un Japon assez faux (Madame Chrysanthème) et de matelots beaucoup plus vrais (Pêcheur dislande); c'est Joris-Karl Huysmans* élève à kl fois de Baudelaire et de Zola; puis, converti, auteur de la Cathé drale et des Foulés de Lourdes; c'est Paul 1 Bourget, dont la féconde activité
littéraire débordera sur trente années du xx'3 siècle; avec ses constructions
massives : Disciple, lŒtape, un Divorce, l'Emigré, etc...; c'est René Bazin, artiste et honnête homme, professeur et apôtre social, qui lie fait guère que commencer quand finit le siècle (La Terre qui meurt est de 1899); c'est
Maurice Barrés, qui, après s'être confiné dans le Culte du Moi, s'en évade pour passer à celui de « la Terre et des Morts » et se consacre" au Roman de
l'énergie nationale.
D'autres noms pourraient suivre le sien, nous l'avons réservé pour la fin, car vers 1900 il n'en était guère de plus grand dans tes» lettres fràfiÇ:àis"ês,- encore qu?il n'écrivît* pas pôvit- les foules.
Cette longue
énuméraMon prouve abondamment que le Roman fut cultivé d'extraordinaire façon* m xixe siècle et dfune façon non médiocre. Elle prouva aussi, par là qualité des œuvres mentionnées* que là prédilection des amateurs était justifiée. Ajoutons que le Roman s?est développé- en se transformant sans eesse; offrant à Fâppetit des lecteurs des^ mets variés^ con
formes à leufs goûts très divers.
Et c'est- lôv croyons-nous^ la ràiso# principale d'un succès, qui dépasse de beaucoup celui de la poésie lyrique, par sa nature même, réservée au petit nombre et du théâtre, parce qu'il ^st plus facile de se procurer un roman efue d^assister à la représentation d'une pièce de son goût.
Les siècles antérieurs, s'ils offraient les principaux types de roman, en.
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