Les Conquérants de JOSÉ-MARIA DE HEREDIA (commentaire)
Publié le 12/02/2012
Extrait du document
Les conquérants
«
Get art de la composition harmonieuse est en meme temps francais et
parnassien.
Qn le retrouve constamment dans les sonnets des Trophees.
La richesse, la justesse, la musicalite du vocabulaire attirent aussi, des
l'abord, l'attention du lecteur.
Certains sonnets de Heredia offrent des
termes si techniques, des details si savants - car le Parnasse influence
par le positivisme abhorre PA-peu pres - qu'on ne peut les comprendre
sans recourir aux dictionnaires les plus complets.
Dans celui-ci on ne ren-
contre que quelques-uns de ces mots c rares » affectionnes des Parnas-
siens; mais it est aise de remarquer le souci continuel d'employer le vo-
cable le plus pittoresque, le plus sonore et le mieux approprie a son objet.
Procedons a une revue generale qui confirmera ces impressions initiates.
Le titre d'abord.
Il convient a ces aventuriers.
IN s'en allaient conquerir
des terres, de l'or, des honneurs.
II traduit d'ailleurs le mot espagnol qui
leur fut appliqué des le debut de leurs entreprises : conquistadores, par-
fois francise sous la forme c conquistadors ».
Vol est le mot propre pour designer une bande d'oiseaux fendant les
airs.
Le gerfaut est une sorte de faucon de grande taille.
La comparaison
indique aussitot ce que sont ces « conquerants » :des hommes de proie.
On a parfois proteste contre cette appellation, alleguant que ces conquis-
tadors etaient des apotres allant porter leur foi aux peuples encore patens,
des civilisateurs qui creerent dans PAmerique du Sud l'agriculture et l'in-
dustrie.
On voudrait pouvoir souscrire a ce juqement, mais les etudes les
plus recentes confirment Out& l'opinion du poete.
Christophe Colomb.
lui-
meme n'est pas sorti grandi des enquetes vraiment scientifiques dont it
vient d'etre l'objet.
Chamfer est un terme volontairement realiste et meme
repugnant.
C'est, au sens primitif, le lieu oh.
l'on jette les chairs mortes.
On appelait ainsi les cimeheres.
Il designe ici le nid des gerfauts, plain des
ossements et parfois des restes de chair des bates devorees.
L'epithete natal,
qui sonne si bien, et dont la derniere syllabe eelatante va retentir quatre
fois a nos oreilles, s'applique au nid on naquirent les gerfauts, et a l'Es-
pagne, la patrie oix ces pilleurs, ces detrousseurs de grands chemins ne
mangeaient pas a leur faim.
Fatigues, adroitement place en tete du vers 2, a un sens moral; le verbe
porter fait image : leur misere est un fardeau trop board pour leurs epaules,
pour leur &lie native.
L'expression miseres hautaines definit Fame de ces
hidalgos.
C'est un trait psychologique, situant des le debut la scene a la- quelle nous assistons, avant meme que soit nomme be port d'embarque-
ment.
Notre imagination nous represente ces gueux Espagnols, drapes dans
leur ample manteau, et conservant, dans leur detresse, leur proverbiale
arrogance.
Palos de Moguer est be port d'oA partit Colomb.
II est situe au sad de
l'Andalousie; dans la province de Huelva.
Palos et Moguer sont deux villes
toutes proches.
Comme it existe plusieurs Palos, on associe le nom des
deux localites pour distinguer be port.
Au moyen age on donnait be nom
de routiers aux brigands de grand chemin.
C'est un mot qui date le mor-
ceau.
Peut-titre ne faut-il pas le prendre au pied de la lettre.
Les c con-
querants » n'etaient pas des c routiers » au sens strict, mais la plupart,
sinon tous, etaient des aventuriers sans scrupule.
Its formaient des bandes
organisees et avaient leurs chefs obeis et respectes, leurs capitalizes.
lyres nous montre leur &tat d'esprit au depart.
Its etaient litteralement
orises par les recits des premiers decouvreurs et, l'imagination aidant, its
s'etaient forge an raze chaque jour embelli, qui les entretenait dans cette
exaltation.
Les adjectifs herolque et brutal Wont pas manqué de froisser
ceux qui voient dans ces hommes des idealistes parmi lesquels ont pu se
glisser quelques pillards.
En realite, si ces traits ne conviennent pas exac-
tement a Colomb eta ses premiers compagnons, its definissent parfaite-
meat l'ensemble des c conquerants ».
a Seduite par des recits fabuleux, toute
la Cour bouillonnait de convoitise », a ecrit Las Casas.
Et Washington Irving, historien de la conquete, emploie les termes memes de Heredia :
c Une convoitise heroique et brutale absorbait dans les Ames les autres
passions.
3, Its revent de grands exploits et front, dans la bravoure, jus-
qu'a l'heroisme; its revent de s'enrichir, et n'hesiteront pas devant la bru-
talite et le crime : cela c'est de I'histoire.
Conquerir est le verbe essentiel du sonnet; it repond au titre.
Fabuleux
Cet art de la composition harmonieuse est en mê~p.e temps français et parnassien.
qn le retrouve constamment dans les sonnets des Trophées.
* ..
La richesse, la justesse, la musicalité du vocabulaire attirent aussi, dès l'abord, l'attention du lecteur.
Certains sonnets de Heredia offrent des termes si techniques, des détails si savants - car le Parnasse influencé par le positivisme abhorre l'à-peu près - qu'on ne peut les comprendre sans recourir aux dictionnaires les plus complets.
Dans celui-ci on ne ren contre que quelques-uns de ces mots «rares» affectionnés des Parnas siens; mais il est aisé de remarquer le souci continuel d'employer le vo cable le plùs pittoresque, ~e plus son.ore et le mieux appropri~ à s?n.
?bjet.
Procédons à une revue generale qm confirmera ces 1mpresswns 1mhales.
Le titre d'abord.
Il convient à ces aventuriers.
Ils s'en allaient conquérir des terres, de l'or, des honneurs.
Il traduit d'ailleurs le mot espagnol qui leur fut appliqué dès le début de leurs entreprises ; conquistadores, par fois francisé sous la forme « conquistadors ».
Vol est le mot propre pour désigner une bande d'oiseaux fendant les airs.
Le gerfaut est une sorte de faucon de grande taille.
La comparaison indique aussitôt ce que sont ces « conquérants » : des hommes de proie.
On a parfois protesté contre cette appellation, alléguant que ces conquis tadors étaient des apôtres allant porter leur foi aux peuples encore païens, des civilisateurs qui créèrent dans l'Amérique du Sud l'agriculture et l'in dustrie.
On voudrait pouvoir souscrire à ce jugement, mais les études les plus récentes confirment plutôt l'opinion du poète.
Christophe Colomb.
lui même n'est pas sorti grandi des enquêtes vraiment scientifiques dont il vient d'être l'objet.
Charnier est un terme volontairement réaliste et même répugnant.
C'est, au sens primitif, le lieu où l'on jette les chairs mortes.
On appelait ainsi les cimetières.
Il désigne ici le nid des gerfauts, plein des ossements et parfois des restes de chair des bêtes dévorées.
L'épithète natal, qui sonne si bien, et dont la dernière syllabe éclatante va retentir quatre fois à nos oreilles, s'applique au nid où naquirent les gerfauts, et à l'Es pagne, la patrie où ces pilleurs, ces détrousseurs de grands chemins ne .
mangeaient pas à leur faim.
Fatigués, adroitement placé en tête du vers 2, a un sens moral; le verbe porter fait image : leur misère est un fardeau trop lourd pour leurs épaules, pour leur fierté native.
L'expression misères hautaines définit l'âme de ces hidalgos.
C'est un trait psychologique, situant dès le début la scène à la quelle nous assistons, avant même que soit nommé le port d'embarque ment.
Notre imagination nous représente ces gueux Espagnols, drapés dans leur ample manteau, et conservant, dans leur détresse, leur proverbiale arrogance.
Palos de Moguer est le port d'où partit Colomb.
Il est situé au sud de l'Andalousie; dans la province de Huelva.
Palos et Moguer sont deux villes toutes proches.
Comme il existe plusieurs Palos, on associe le nom des deux localités pour distinguer le port.
Au moyen âge on donnait le nom de routiers aux brigands de grand chemin.
C'est un mot qui.
date le mor- ceau.
Peut-être ne faut-il pas le prendre au pied de la lettre.
Les « con- quérants » n'étaient pas des « routiers » au sens strict, mais la plupart, sinon tous, étaient des aventuriers sans scrupule.
Ils formaient des bandes organisées et avaient leurs chefs obéis et respectés, leurs capitaines.
Ivres nous montre leur état d'esprit au départ.
Ils étaient littéralement grisés par les récits des premiers découvreurs et, l'imagination aidant, ils s'étaient forgé un rêve chaque jour embelli, ~i les entretenait dans cette exaltation.
Les adjectifs héroïque et brutal n ont pas manqué de froisser ceux qui voient dans ces hommes des idéalistes parmi lesquels ont pu se glisser quelques pillards.
En réalité, si ces traits ne conviennent pas exac tement à Colomb et à ses premiers compagnons, ils définissent parfaite ment l'ensemble des « conquérants ».
« Séduite par des récits fabuleux, toute la ~our ;houi!lonnait de con':_oitise », a.
écrit Las Casas.
Ét Washington Irvmg, historien de la conquete, emploie les termes mêmes de Heredia : «Une convoitise héroïque et brutale absorbait dans les âmes les autres passions.
» Ils rêvent de grands exploits et iront, dans.
la bravoure jus qu'à l'héroïsme; ils rêvent de s'enrichir, et n'hésiteront pas devant l; bru talité et le crime : cela c'est de l'histoire.
Conquérir est le verbe es.'lentiel du sonnet; il répond au titre.
Fabuleux.
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