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Les Châtiments, Livre IV, 2 (texte intégral). CE QUE LE POÈTE SE DISAIT EN 1848 - Lecture méthodique

Publié le 14/03/2015

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Lecture méthodique

CE QUE LE POÈTE SE DISAIT EN 1848

Tu ne dois pas chercher le pouvoir, tu dois faire

Ton oeuvre ailleurs ; tu dois, esprit d'une autre sphère,

Devant l'occasion reculer chastement.

De la pensée en deuil doux et sévère amant,

5            Compris ou dédaigné des hommes, tu dois être Pâtre pour les garder et pour les bénir prêtre. Lorsque les citoyens, par la misère aigris, Fils de la même France et du même Paris, S'égorgent ; quand, sinistre, et soudain apparue,

10         La morne barricade au coin de chaque rue Monte et vomit la mort de partout à la fois, Tu dois y courir seul et désarmé ; tu dois Dans cette guerre impie, abominable, infâme, Présenter ta poitrine et répandre ton âme,

15         Parler, prier, sauver les faibles et les forts,

Sourire à la mitraille et pleurer sur les morts ;

Puis remonter tranquille à ta place isolée,

Et là, défendre, au sein de l'ardente assemblée,

Et ceux qu'on veut proscrire et ceux qu'on croit juger,

20         Renverser l'échafaud, servir et protéger L'ordre et la paix qu'ébranle un parti téméraire, Nos soldats trop aisés à tromper, et ton frère, Le pauvre homme du peuple aux cabanons jeté, Et les lois, et la triste et fière liberté ;

25         Consoler, dans ces jours d'anxiété funeste,

L'art divin qui frissonne et pleure, et pour le reste

Attendre le moment suprême et décisif.

Ton rôle est d'avertir et de rester pensif.

Paris, juillet 1848.

[27/11/1848]

Les Châtiments, Livre IV, 2 (texte intégral).

Dans le désastre des Journées de Juin, les torts sont parta­gés. Ainsi, le « parti téméraire « des extrémistes de gauche est accusé par Hugo d'être à l'origine de la révolte : il a troublé « l'ordre et la paix « (vers 21). De l'autre côté, les partisans de l'ordre se sont discrédités en menant une répression brutale et arbitraire : l'assemblée « croit juger « (vers 19), mais elle ne rend pas une justice équitable. Hugo ne donne donc raison à aucun des deux camps. Il adopte ici une position médiane, pour tenter de récon­cilier les ennemis.

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« --·INTRODUCTION Situation du poème Écrit en 1848, ce poème est le plus ancien des Châtiments.

Son sujet même n'appartient plus à l'actualité: « Ce que le poète se disait en 1848 »se situe en effet avant le coup d'État de 1851, alors que la plupart des textes du recueil évoquent les débuts du Second Empire.

1848, c'est l'année des célèbres« Journées de Juin»: les 23, 24 et 25 juin, Paris connaît une violente révolte des ouvriers.

Durement touchés par le chômage, ceux-ci protestent contre la suppression d'une é3llocation publique qui les préservait jusque­ là de la misère.

Menace contre l'ordre public et contre la République naissantH, cette insurrection est largement désap­ prouvée: par les conservateurs, mais aussi par les démocrates, pour qui l'action politique doit s'exprimer à travers des lois et non par des batailles de rue.

Écrit peu de temps après ces journées troublées, le poème en restitue toute la violence et s'efforce de définir la position du poète par rapport à l'Eivénement.

Axes de lecture Dans un premier temps, nous montrerons que l'évocation des Journées de Juin est pour Hugo /'occasion d'exprimer son refus de la violence.

Pour autant, il n'est pas question de se mettre en retrait par rapport aux événements politiques.

Il faut au contraire y prendre part, mais c'est à travers son art que le poète doit agir.

L'étude de cet engagement du poète sera /'objet de notre second axe de lecture.

1.

LE REFUS DE LA VIOLENCE À l'époque des Journées de Juin, Hugo est membre de /'Assemblée constituante, chambre chargée de donner une consti­ tution à la Deuxième République qui a été officiellement procla­ mée le 4 mai.

Député conservateur, Hugo est avant tout un homme qui doute, troublé à la fois par le caractère anti- 128. »

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