PIÈCE [DÉ]MONTÉE Les dossiers pédagogiques « Théâtre » et « Arts du cirque » du réseau Canopé N° 202 - Mars 2015 Les Caprices de Marianne AGIR Les Caprices de Marianne PIÈCE [DÉ]MONTÉE Les dossiers pédagogiques « Théâtre » et « Arts du cirque » du réseau Canopé N° 202 - Mars 2015 Texte d’Alfred de Musset Mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia Création décor de Jacques Gabel assisté de Morgane Baux Création son de Jean-Christophe Bellier Création musicale de Vincent Erdeven Création des lumières de Roberto Venturi Création des costumes de Catherine Leterrier assistée de Élise Cribier-Delande Collaboration artistique de Caroline Gonce Au Nouveau Théâtre d’Angers du 26 février 2015 au 14 mars 205 Tournée nationale jusqu’au 19 avril 2015 Retrouvez sur reseau-canope.fr/crdp-paris/ l’ensemble des dossiers « Pièce (dé)montée » AGIR Directeur de publication Jean-Marc Merriaux Directrice de l’édition transmédia et de la pédagogie Michèle Briziou D irecteur artistique Samuel Baluret Comité de pilotage Bertrand Cocq, directeur du Canopé de Paris Bruno Dairou, délégué aux Arts et à la Culture de Canopé Ludovic Fort, IA-PR Lettres, académie de Versailles Jean-Claude Lallias, professeur agrégé, conseiller Théâtre, délégation aux Arts et à la Culture de Canopé Patrick Laudet, IGEN Lettres-Théâtre Marie-Lucile Milhaud, IA-IPR Lettres-Théâtre honoraire et des représentants des Canopé académiques Auteures de ce dossier Céline Véron-Pierrard et Caroline Séjourné, professeures de lettres Sauf mention contraire, toutes les photos sont © Caroline Séjourné. Directeur de « Pièce (dé) montée » Jean-Claude Lallias, professeur agrégé, conseiller théâtre, département Arts & Culture Secrétariat d’édition Cyril Roy et Marie-Astrid Audo-Leroy, Canopé de l’académie de Nantes M ise en pages Aurélie Jaumouillé, Canopé de l’académie de Nantes Conception graphique DES SIGNES studio Muchir et Desclouds ISSN : 2102-6556 ISBN : 978-2-86628-470-1 © Canopé de l’académie de Nantes-2015 Tous droits de traduction, de reproduction et d’adaptation réservés pour tous pays. Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes des articles L.122-4 et L.122-5, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite ». Cette représentation ou reproduction par quelque procédé que ce soit, sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français de l’exploitation du droit de copie (20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris) constitueraient donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. Remerciements Nos remerciements chaleureux vont à Frédéric BélierGarcia et à toute l’équipe du Nouveau Théâtre d’Angers pour l’aide précieuse qu’ils nous ont apportée dans la préparation de ce dossier. Tout ou partie de ce dossier sont réservés à un usage strictement pédagogique et ne peuvent être reproduits hors de ce cadre sans le consentement de l’auteure et de l’éditeur. La mise en ligne des dossiers sur d’autres sites que ceux autorisés est strictement interdite. SOMMAIRE 6 Édito 7 de voir le spectacle a vant la représentation en appétit! 7 Les Caprices de Marianne pour un metteur en scène d’aujourd’hui 8 Le texte 10 Les personnages : du romantisme du xixe siècle au mal de vivre d’aujourd’hui 12 La scénographie 13 La diffusion : de l’affiche à la bande-annonce du spectacle 15 a près la représentation Pistes de travail 15 Dans la peau du critique de théâtre : des sens au sens 16 Convoquer la mémoire et rendre compte de ses souvenirs 17 Théâtre-image et photo montage : première approche critique du spectacle 18 Analyse du spectacle 22 En guise de synthèse… A nnexes 24 Fiche artistique de Les Caprices de Marianne 25 Grille de scénario 26 Répliques 28 Liste des personnages 29 Les Caprices de Marianne (résumé) 30 Comparaison d’extraits 31 Biographie d’Alfred de Musset 32 Le mal du siècle 33 Les 7 questions aux personnages 34 Entretien avec Frédéric Bélier-Garcia (metteur en scène) 35 Entretiens avec deux acteurs 37 L’affiche 40 Les lieux de l’intrigue chez Musset 41 Les textes ajoutés 42 Le clair obscur (photos du spectacle) 43 Pour pouvoir parler de la lumière et des éclairages d’un spectacle LES CAPRICES DE MARIANNE 4 SOMMAIRE 44 Photos des costumes 45 L’artiste Michaël Borremans 46 Les comédiens 49 Grille de questionnement pour l’analyse du jeu des comédiens LES CAPRICES DE MARIANNE 5 édito Les Caprices de Marianne est une pièce passionnante à plus d’un titre. D’abord parce qu’elle est inclassable : comédie ? drame ? tragédie ? Elle tient du drame par les classes sociales représentées ou sa structure en trois parties, de la comédie par certains de ses personnages, ses actions vives et le langage parfois proche de la conversation, de la tragédie enfin par l’avancée inexorable vers la mort du personnage de Coelio ainsi que par les thèmes principaux abordés. Ensuite parce que cette pièce n’a pas été écrite pour la scène. En effet, après l’échec de sa première pièce La Nuit vénitienne (1830) Musset décide que désormais ses pièces seront à lire, non à représenter. L’auteur s’est donc libéré des contraintes du théâtre et des effets de mode liés au romantisme. C’est peut-être pour cette raison que le théâtre de Musset et Les Caprices de Marianne en particulier semblent intemporels. «?Ayant renoncé à faire du théâtre pour son temps, Musset a fait du théâtre pour tous les temps?» écrit Léon Lafoscade dans un ouvrage consacré à l’auteur (Le Théâtre d’Alfred de Musset, 1901). Mais si cette pièce n’a pas été écrite pour la scène, comment la mettre en scène ? À quelles difficultés un metteur en scène estil confronté ? Ces difficultés peuvent-elles expliquer que cette pièce soit si peu jouée ? Écrite en 1833, elle est représentée pour la première fois à la Comédie Française en 1851. Ensuite il faut attendre la mise en scène de François Beaulieu à la Comédie Française en 1980, celle de Lambert Wilson au Théâtre Des Bouffes du Nord en 1994, puis celle de Jean-Louis Benoît en 2006 au Théâtre National de La Criée à Marseille. Les Caprices de Marianne est le récit d’une jeunesse qui se fracasse sur son siècle, sur son désœuvrement. Bien avant La Fureur de vivre (Nicholas Ray, 1955), Musset prend le pouls mystérieux de cette fièvre étrange qui s’empare d’une génération orpheline de tout combat, de tout engagement, qui cherche dans le cynisme, la sensualité, le plaisir facile, ou le fanatisme mélancolique, son salut, c’est-à-dire un arrangement avec la vie. En suivant, hors d’haleine et le cœur à nu, les dédales du désir amoureux, les protagonistes perdent leurs convictions par timidité, pulsion, envie, convoitise, jalousie. «?Tout change mais rien n’arrive !?» Écrite au lendemain d’une insurrection avortée, Les Caprices de Marianne est une grande œuvre incandescente du romantisme français. Et les héros de cette fable, partis pour une comédie, ripent dans le drame. Cette pièce est, aujourd’hui comme toujours, le cri, le baroud éclatant d’une jeunesse contre son mal de vivre. Aujourd’hui c’est au tour de Frédéric Bélier-Garcia de nous donner une lecture contemporaine de cette œuvre. « Je suis venu trop tard dans un monde trop vieux… » (Alfred de Musset) LES CAPRICES DE MARIANNE 6 Avant de voir le spectacle La représentation en appétit! LES CAPRICES DE MARIANNE POUR UN MET TEUR EN SCÈNE D’AUJOURD’HUI ÉLABORATION D’UN SCÉNARIO PÉDAGOGIQUE : DANS LA PEAU DU METTEUR EN SCÈNE Il s’agit de proposer aux élèves un scénario pédagogique. Le scénario pédagogique est un fil rouge qui se définit comme une succession d’étapes dans lesquelles les élèves ont des tâches à effectuer et des rôles spécifiques à jouer les plus proches possibles d’une situation concrète. Il s’agit ici de placer les élèves dans la peau d’un metteur en scène de théâtre ayant pour objectif de monter Les Caprices de Marianne aujourd’hui. Par le biais d’activités qui sont des activités transversales, les élèves expérimenteront les différentes étapes du processus de création d’un spectacle. Ces activités qui impliquent la mobilisation de compétences multiples tendent à rendre plus autonomes les élèves dans leurs apprentissages. Plus concrètement, le scénario pédagogique permet de planifier des activités, d’identifier au mieux les objectifs, d’améliorer les pratiques des élèves en matière d’organisation du travail et de travail collaboratif. Il peut être formalisé par l’intermédiaire de la grille de scénario (Annexe 2), grille qui n’est pas un modèle en tant que tel. Cette grille peut être distribuée aux élèves en début de séquence. Photo de répétition. LES CAPRICES DE MARIANNE 7 AVANT DE VOIR LE SPECTACLE, LA REPRÉSENTATION EN APPÉTIT ! LE CARNET DE BORD DU METTEUR EN SCÈNE Demander aux élèves de se procurer un carnet dans lequel ils noteront leurs impressions, recherches, commentaires, doutes, solutions… au fur et à mesure du travail sur la pièce. Chaque phase devra être datée et titrée. Les élèves signaleront le groupe auquel ils appartiennent ainsi que les consignes données. Ils pourront illustrer leur carnet (dessins, collages, photos…) afin de mieux visualiser et mémoriser les étapes du travail. Ce support pourra éventuellement être évalué en fin de séquence ou bien confronté aux autres carnets et exposé au CDI. Il est possible d’imaginer la tenue d’un carnet de bord virtuel ou la création d’un blog sur le site de l’établissement. LE TEXTE LE TITRE Demander aux élèves ce qu’ils imaginent de la pièce en lisant son titre. Que signifie «?Caprice?» pour eux Demander ensuite aux élèves de rechercher l’étymologie du mot «?caprice?» afin de ? mieux cerner le sens du titre de la pièce à l’époque de Musset. Caprice, n.m. est l’adaptation de l’italien capriccio, dérivé de capo «?tête?» par une forme caporiccio «?tête frisée, hérissée?», qui a signifié «?frisson d’horreur, de peur?» (xiiie?siècle) avant de prendre au xvie?siècle le sens de «?désir soudain et bizarre qui monte à la tête?», «?idée fantasque?», et de devenir un terme d’esthétique. Caprice recouvre à la fois la disposition d’esprit à des changements fréquents et l’effet de cette disposition. Considéré négativement par l’idéologie classique qui y voit un dérèglement d’esprit (1690), le caprice est valorisé à l’époque romantique qui remet à l’honneur l’acceptation esthétique du mot entendu comme «?œuvre d’art inspirée par le génie et s’écartant des règles ordinaires?». La forme italienne a été reprise telle quelle dans le domaine musical où CAPRICCIO (n. m.) désigne une pièce pleine de fantaisie. (Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, 1998) Procéder à de nouvelles hypothèses de sens en fonction des recherches des élèves. LE TEXTE EN HYPOTHÈSES Scinder la classe en deux et distribuer à chaque élève une réplique de la pièce (Annexe 3). La moitié de la classe est assise, éventuellement les yeux fermés. L’autre moitié vient chuchoter sa réplique (distribuée de façon aléatoire) à l’oreille de chaque auditeur. Lorsque toutes les répliques ont été proférées, on entend les impressions des auditeurs sur le genre de la pièce, la langue, les thèmes abordés, l’histoire. Ensuite, on inverse les rôles avec l’autre moitié de la classe. Les auditeurs deviennent émetteurs et font entendre leur réplique à l’autre partie de la classe. On va ainsi plus loin dans les hypothèses que l’on peut formuler sur la pièce certaines sont confirmées, ; d’autres infirmées. Les élèves sont alors invités à noter ce qu’ils ont appris ou compris de la pièce sur leur carnet du metteur en scène. Pour aller plus loin Constituer des groupes et proposer aux élèves d’imager une situation dans laquelle ils pourraient dire leur réplique. À chaque groupe de s’interroger sur qui parle ? À qui ? Et de quoi ? On montre ensuite chaque proposition que l’on confrontera plus tard à la réalité du texte et/ou à la représentation. Pour cet exercice, il est possible de mettre à disposition la liste des personnages (Annexe 4) afin d’aider les élèves à faire des hypothèses sur l’émetteur de leur réplique. Constituer des duos et demander à chaque binôme d’imaginer la réplique qui précède leur réplique et celle qui suit. Ils réfléchissent à deux et font une proposition qu’ils montreront aux autres et justifieront. LES CAPRICES DE MARIANNE 8 AVANT DE VOIR LE SPECTACLE, LA REPRÉSENTATION EN APPÉTIT ! LES DIFFÉRENTES ÉTAPES DE L’HISTOIRE : LE THÉÂTRE-IMAGE Introduction à la notion de théâtre-image en trois étapes Première étape Un court échauffement peut faire comprendre rapidement la notion de théâtreimage aux élèves. Il s’agit de faire marcher les élèves à un rythme assez soutenu et de leur demander au « top » de l’enseignant, qui frappera dans ses mains par exemple, de s’immobiliser afin d’incarner une émotion ou un sentiment (la peur, la joie, la surprise, l’amour, la jalousie...). Entre chaque nouvelle proposition les élèves se remettent à marcher. Ne pas hésiter à leur rappeler comme point de comparaison un jeu bien connu de leur petite enfance « 1, 2, 3 soleil ». En effet la qualité de l’image tient pour beaucoup à sa stabilité et à la précision des gestes et du regard. On peut également proposer des inducteurs liés aux personnages types du théâtre (le mari trompé, l’amant, le bouffon, le serviteur modèle...). Deuxième étape Proposer aux élèves répartis en groupes de trois de réaliser une image à partir du tableau de Jean-Dominique Ingres Paolo et Francesca (huile sur toile du Musée des Beaux-Arts d’Angers que les élèves peuvent facilement trouver sur internet). Il s’agit pour les élèves de camper physiquement le plus précisément possible et de fa&cced...