L'engagement politique de La Fontaine
Publié le 12/09/2019
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Son adhésion à la politique de Louis XIV n'empêche pourtant pas La Fontaine de conserver sa liberté de penser. Même lorsqu'il célèbre les exploits militaires de son souverain, le fabuliste forme des vœux pour un retour rapide de la paix. En pleine guerre de Hollande, il suggère à Louis XIV d'œuvrer à la tranquillité des peuples. Comparable au \" premier des Césars, >>• celui-ci devrait s'inspirer d'Auguste, dont le règne fut pour l'Empire romain une période de prospérité. Avec Un animal de la Lune (VIl, 17), le septième livre se clôt d'ailleurs sur un appel à la paix, à cette paix que La Fontaine envie les Anglais de connaître.
Le poète continue en outre de donner une image critique de la condition royale. Le Lion interroge un singe sur ses devoirs de souverain. Faire passer le bien de l’État avant les satisfactions de l'amour-propre et pratiquer la justice, lui répond le Singe. Celui-ci développe amplement le premier point, mais se garde bien d'aborder le second, car il \" regardait le lion comme un terrible sire » (Le Lion, le Singe et les deux Ânes, Xl, 5). Autrement dit, l est impossible, sous peine d'encourir les plus grands risques, d'enseigner l'art de la justice à un roi. De même est-il vain de l'inciter à la clémence, car \" la vengeance est un morceau de roi » (Les Deux Perroquets, le Roi et son Fils, X, 11}. Certes, ces fables ne mentionnent jamais expressément Louis XIV. Mais toute générale et indirecte qu'elle soit, la critique ne l'épargne pas. À quel roi, sinon à Louis XIV, pouvait-on en effet songer à cette époque ?
«
heureux
de Fouquet.
Non sans courage, La Fontaine est l'un des
rares à demeur er fidèle au min istre déchu 1.
Il ne mentionne certes jamais le nom de Fouquet.
Le faire aurait
été trop dangereux ou trop imprudent.
Mais les animaux conna issent
des situations et des sorts comparables à celui du ministre disgracié.
La Fontaine procède donc par allusions et par transpositions.
Ainsi la
Grenouille qui jalouse le Bœuf et qui tente de se faire aussi grosse
que lui, rappelle l'hostilité envieuse de Colbert à l'égar d de Fouquet.
Le rapprochement s'impose d'autant plus que la " mo ralité » de la
fable contient ces deux vers :
Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :
To ut Bourgeois veut bâtir comme les grands Seigneurs.
(La Grenoui lle qui veut se foire aussi grosse que le Bœuf, 1, 3.)
Or Colbert était d'origine bourgeoise.
Le Meunier, son Fils et l'Âne (Ill, 1) se clôt, de son côté, sur cette
remar que:
Prenez femme, Abbaye, Emploi, Gouvernement :
Les gens en parleront, n'en doutez nullement.
Comment, là encore, ne pas songer à Fouque t qui, au faîte de sa
puissance, suscitait bien des comm entaires envieux ?
Deux thèmes majeurs parcourent enfin le premier recueil : celui de
la ruse, des comp lots et des cabales ; et celui de la méchance té
humaine.
Si La Fontaine les orchestre avec tant d'insi stance, c'est
parce qu'il considèr e que son protecteur a été l'objet d'injus tes
manœuvres.
Les attaques
co ntre la po litiq ue coloniale de Colbert
Une série de fables traite du commer ce maritime et de ses dan
gers.
Si les bénéfices que les armateurs en escomptaient pouvaient
être considérables, ils étaient aussi aléatoires.
Il suffisait d'un naufrage
1.
Voir " Repères biographiques "• p.
20..
»
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