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Lecture linéaire de Parfum exotique

Publié le 04/12/2023

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« Quelques éléments pour une analyse linéaire du sonnet « Parfum exotique » Introduction Evénement phare dans la production poétique du 19 ème siècle, Les Fleurs du mal offrent au lecteur de nouveaux horizons à explorer.

Le quotidien devient motif poétique même s’il n’est que laideur (« Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or » a d’ailleurs déclaré Baudelaire) mais ce sont aussi de nouvelles odeurs, de nouvelles images venues de lointains pays qui sont ici chantés comme les lieux de l’idéal où « Tout n’est que calme, luxe et volupté » Le sonnet 1« Parfum exotique » fut inspiré à l’auteur par Jeanne Duval, comédienne métisse, qui lui rappelle les beautés entrevues lors de son voyage à La Réunion et à Maurice. Ainsi le poète, motivé par des circonstances particulières, livre-t-il dans ce sonnet, les images d’un paradis, les images de son paradis… Ou Bien Lorsqu’il publie Les Fleurs du Mal en 1857, Baudelaire entend notamment célébrer l’une de ses maîtresses, Jeanne Duval, mulâtresse qu’il avait rencontrée à son retour des Iles Bourbons en 1841.

Il n’est pas étonnant donc que l’on trouve, au seuil du cycle de Jeanne Duval, un sonnet intitulé « Parfum exotique ».

Le poème présente, dans un cadre intime et chaleureux, une rêverie exotique inspirée par le parfum de la femme aimée. Projet de lecture : Par quels moyens le poète parvient-il à livrer son idéal Premier mouvement : correspond aux deux premiers quatrains, c’est-à-dire à une rêverie sensuelle provoquée par la femme - Le 1er quatrain : description placée sous le signe de l’idéal Vers 1 +2 : Ouverture sur une série de circonstances.

Tout d’abord nous sommes confrontés à une subordonnée circonstancielle de temps introduite par la conjonction « quand » et se terminant à « chaleureux », à l’intérieur de laquelle nous trouvons un Participiale « les deux yeux fermés » indiquant la manière et un Groupe Nominal Prépositionnel « en un soir chaud d'automne » renvoyant au temps. Cette structure particulière montre : > combien les circonstances sont importantes pour faire jaillir l’image et plus généralement la poésie (cf « Spleen IV » avec la répétition de « quand…et que ») > met en avant une figure d’enchâssement des compléments ralentissant le rythme et créant un effet de protection, un moment de bien-être. L’atmosphère apparaît calme sereine autant de conditions au surgissement de la rêverie. « les deux yeux fermés » : - Attitude propice à la rêverie (tout comme le moment de la journée « le soir » ou encore la saison « automne », saison de la douceur et éventuellement de la nostalgie.) - L’adjectif numéral inutile pour la compréhension, montre combien le poète se ferme à la réalité qui l’entoure et se laisse aller au bonheur de rêver, de s’évader. - Si le participe passé « fermé » s’oppose au verbe « voir » mis en valeur à l’attaque du vers 3 et verbe de la principale, c’est qu’il est bien ici question d’une vision intérieure. « en un soir chaud d’automne » : L’automne tout comme la chaleur vont participer à la naissance de l’image exotique : en effet l’automne est un déploiement de couleur et la chaleur appelle les tropiques.

Les nombreuses allitérations en « o » créent un effet de douceur. Vers 2 : la présence de la femme et de son parfum 1 Sonnet (< vient de l’italien sonetto et apparaît en France au 16 ème siècle) sa structure classique est la suivante : deux quatrains (abba abba) et deux tercets (ccd eed).

Baudelaire s’attachera à remettre à la mode cette forme oubliée en en proposant des variations.

Il déclare d’ailleurs dans une Lettre à Armand Fraisse de 1860 : « Quel est donc l'imbécile [...] qui traite si légèrement le sonnet et n'en voit pas la beauté pythagorique ? Parce que la forme est contraignante, l'idée jaillit plus intense.

Tout va bien au sonnet : la bouffonnerie, la galanterie, la passion, la rêverie, la méditation philosophique.

Il y a, là, la beauté du métal et du minéral bien travaillés.

Avez-vous observé qu'un morceau de ciel aperçu par un soupirail, ou entre deux cheminées, deux rochers, ou par une arcade, donnait une idée plus profonde de l'infini que le grand panorama vu du haut d'une montagne ?...

Quant aux longs poèmes, nous savons ce qu'il en faut penser : c'est la ressource de ceux qui sont incapables d'en faire de courts.

Tout ce qui dépasse la longueur de l'attention que l'être humain peut prêter à la forme poétique n'est pas un poème.

» Si la femme n’apparaît qu’aux vers 2 et 9, et de façon métonymique (une partie d’elle l’évoque tout entière), elle est indispensable à la vision, telle une muse.

C’est elle qui fait naître la vision : « quand je respire l’odeur de ton sein… je vois » et « Guidé par ton odeur ».

Le climat sensuel de cette douce étreinte se double de l’image maternelle : la femme est donc l’amante mais aussi la mère qui rassure, protège, nourrit, réchauffe.

(Baudelaire privilégie l’enfance car c’est le seul lieu possible du bonheur : cf.

poème « Moesta et errabunda »). Notons la proximité entre les deux personnages, marquée par le jeu du pronom « je » répondant au déterminant possessif « ton ». Le parfum est lui aussi essentiel : c’est tout d’abord le titre du sonnet, mais il est aussi mis en valeur par la répétition du mot « odeur » et par sa place à l’hémistiche.

Notons aussi que « je respire l’odeur » est presque une expression pléonastique, redondante, soulignant l’importance capitale du parfum dans l’esthétique baudelairienne : c’est en effet lui qui motive les sens et qui permet de découvrir de nouveaux horizons (voir le grand nombre de poèmes dans les Fleurs du mal qui sont consacrés au parfum2) Vers 3 et 4 : le surgissement de l’image - Le lien étroit qui unit l’odorat et la vue est souligné par la conjonction « quand » qui traduit la simultanéité et par le parallélisme en début de vers : « je respire… » / « je vois ».

La magie suggestive du parfum provoque le déploiement de la vision. - « se dérouler » verbe qui implique l’idée d’un déploiement, d’un défilement infini d’images (notons que Baudelaire présente 5 images successives dans ce poème toutes COD du verbe voir : les rivages, l’ile, les fruits, les habitants et le port dans un mouvement général de grande fluidité ! ) un peu à la manière d’un film.

Notons aussi que les vers miment ce déroulement par le jeu de l’enjambement : il faut en effet lire d’un souffle ces deux vers. - « des rivages heureux qu’éblouissent les feux d’un soleil monotone » : > le motif des rivages heureux renvoie à l’idée d’un espace béni des dieux, et annonce l’image de l’île.

Notons que l'épithète "heureux" personnifie les rivages et leur confère une dimension allégorique : ce ne sont pas les rivages qui sont heureux, mais leurs habitants et le poète lui-même quand il s'y transporte en imagination.

Ce procédé revient à plusieurs reprises dans le sonnet : "sein chaleureux", "rivages heureux", "île paresseuse" : il s’agit d’une hypallage3 accentuant la grande fluidité entre les différentes images évoquées. > Le verbe « éblouissent », mis en relief au début du vers, insiste sur l’intensité de la lumière.

Le pluriel « les feux » évoque une lumière fécondée de ses multiples reflets sur l’eau. Le soleil et la mer inaugurent donc la vision d’un univers paradisiaque : le soleil est symbole de vie et la mer de liberté et d’infini 4.

Notons encore que le verbe « éblouir » peut quelque étonner puisque le soleil est qualifié de « monotone », un adjectif qui implique plutôt l’idée d’ennui.

Il semble que l’on puisse revenir au sens premier de l’adjectif pour comprendre ici l’idée émise : monotone signifie : qui est uniforme, régulier dans ses intonations et donc sécurisant.

On peut compter sur lui… il est toujours présent.

La monotonie n’est donc plus à fuir mais plutôt à rechercher pour ce qu’elle apporte d’assurance.

Cette monotonie implique aussi l’idée d’un temps suspendu, de l’éternité… Cette monotonie nous la retrouvons d’ailleurs d’une certaine façon, dans le poème qui ne propose presque que des rimes riches sans que pour autant celles-ci soient désagréables, au contraire. - Le 2ème quatrain : L’île idyllique Vers 4 : 2 3 Pour mémoire : « Le Parfum » (XXXVIII) : Lecteur, as-tu quelque fois respiré Charme profond, magique, dont nous grise Avec ivresse et lente gourmandise Dans le présent le passé restauré ! Ce grain d’encens qui remplit une église, Ainsi l’amant sur un corps adoré Ou d’un sachet le musc invétéré ? Du souvenir cueille la fleur exquise. Hypallage (mot féminin) : On parle d’hypallage lorsqu’on attribue à certains mots d'une phrase ce qui appartient à d'autres mots de cette phrase, sans qu'il soit possible de se méprendre sur le.... »

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