Lecture Analytique : Molière, Don Juan ou le Festin de Pierre - Acte II, Scène 2; ''Ah ! la belle personne'' jusqu'à ''j'aimerais mieux me voir morte''

« Don Juan joue avec les codes : • Code esthétique : au XVIIe siècle, le critère de la beauté féminine était la blancheur en opposition au noir associé à la saleté et au travail.

On comprend alors l’ironie de Don Juan quant à son éloge des mains noires de Charlotte.

Don Juan prend Sganarelle à témoin avec l’impératif « regarde ces mains ».

Ce procédé comique est renforcé par la remarque de Charlotte (« Fi, elles sont noires comme je ne sais quoi »), ce que DJ nie en poursuivant son discours (hyperbole : « les plus belles du monde »).

• Code religieux : le Ciel est mentionné dans son rôle providentiel (« c’est le ciel qui l’envoie »).

Le ciel est pris pour témoin de la déclaration que DJ qualifie d’authentique.

Preuve d’hypocrisie, d’insolence.

• Jeu sur la promesse de mariage, considérée à l’époque comme preuve décisive de bonne foi.

Au XVII, le mariage est indissoluble et une femme abandonnée est vouée à la honte et au déshonneur (cf.

Elvire).

DJ sait que l a promesse du mariage est un bon moyen de parvenir à ses fins.

D’ailleurs, il s’informe tout de suite sur la situation matrimoniale de Charlotte.

Malgré le fait que les paroles de DJ entraînent Charlotte dans un rêve, celle- ci reste prudente (elle le prévi ent qu’elle préfèrerait mourir plutôt que d’être abandonnée).

II] Les acteurs de la conquête amoureuse : une tragédie de la séduction ? On assiste dans cette scène, à une opposition sociale et moral e peu commune entre deux mondes : • Opposition sociale : Charlotte est paysanne, Don Juan un homme de Cour.

On remarque un mélange des genres et des registres.

La scène se rapproche de la farce avec la présence des paysans mettant en scène des personnages bas.

Le registre de langue pouvant s’apparenter au patois des paysans d’île de France se mêle au beau langage de cour de DJ.

L’utilisation du patois confère un côté réaliste et une couleur locale à cette scène.

Là où Charlotte appelle Don Juan « Monsieur », le noble n’hésite pas à tutoyer la jeune femme.

Cela souligne la soumission de Charlotte.

• Opposition morale : Malgré ses airs nobles, Charlotte reste paysanne.

Elle adhère aux valeurs du mariage, à la fidélité et la dignité et implicitement à la virginité.

Elle a également de l’amour propre et est honnête : elle avoue à DJ qu’elle est déjà promise à Pierrot.

DJ se place du côté de la vérité mais cela alerte Charlotte (« Monsieur, tout cela est bien trop dit pour moi »).

On assiste à un comique grinçant qui montre la cruauté du héros.

On ass iste à une critique des seigneurs qui utilisent leur notoriété pour le libertinage.

DJ s’amuse avec une question de vie ou de mort (« Et j’aimerais mieux mourir que de me voir déshonorée »).

Charlotte est sensible d’abord à l’aspect physique de DJ (on connaît son costume depuis l’A1S2 – costume solaire) puis à son art de la parole.

A l’A2S1, Pierrot raconte qu’il a sauvé deux hommes de la noyade et décrit leur apparence.

Conclusion : Cette scène unique de séduction a une fonction démonstrative dans la pièce de Don Juan.

Elle vaut pour toutes les autres femmes que Don Juan avait conquises jusqu’alors.

Charlotte incarne l’archétype de toutes les femmes qui sont tombées sous le charme de Don Juan avant elles.

Le fait que Don Juan séduise une paysa nne aux « mains noires » souligne son désir et montre bien qu’il ne fait pas dans la nuance.. »