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Lecture analytique d'un extrait du premier chapitre de Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand CELINE

Publié le 13/11/2011

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L'opposition entre les deux personnages est rigoureuse: à chaque assertion d'un personnage, une opinion contraire lui fait face.  La conversation débute sur la notion de érace française «: Arthur y voit de la noblesse, à travers un superlatif agrémenté d'un adverbe intensif: « et même que c'est la plus belle race du monde « (l.12)  A l'opposé, Bardamu nie son existence même: « Elle en a bien besoin la race française, vu qu'elle n'existe pas! « (l.8) → on notera ici la provocation de Bardamu5.  Bardamu renie ensuite l'héritage historique de la France (l.24 à 35) en concluant par le constat désespéré « c'est pas une vie... «.  Arthur lui oppose l'idée sentimentale de « l'amour «, comme vectrice de bonheur.  « l'amour c'est l'infini mis à la portée des caniches «. Cette phrase sans appel, répond directement à l'implicite de la phrase d'Arthur, en lui proposant une définition contradictoire.

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« Malgré cette organisation de l'extrait sous la forme d'un dialogue où deux visions différentes du monde s'opposent,malgré les apparences volontairement caricaturales de ces opinions hyperboliques qui expriment davantage l'enviede jouter que de discuter de façon réfléchie, on observe dans ce début de roman une mise en exergue des parolesde Bardamu II/ LA VISION DU MONDE DE BARDAMU a) Un personnage cynique6 (l.15 à 21) Bardamu s'oppose aux valeurs de la société française de la Troisième République, comme l' identité nationale.

Dansun contexte de guerre, ses propos sont très polémiques.

Une partie de la société française d'alors loue les valeursdu sang, contre les étrangers qui menacent sa pureté.

Elle est à la recherche de valeurs fortes: pour convaincreune population de la nécessité de faire la guerre, il existe deux démarches de propagande essentielles: marteler lesslogans patriotiques et fustiger l'ennemi, incarnation du Mal. Bardamu commence par nier l'existence de la race françaiseIl en donne une définition dépréciative: « la race, ce que tu appelles comme ça, c'est...

» d'emblée, avec l'apposition de cette PSR, il remet en question le mot-même, vide de sens.

Les pronomsdémonstratifs indéfinis « ce » et « ça » sont déjà une forme de dévalorisation du mot.Les adjectifs utilisés pour cette définition sont violents « ce grand ramassis de miteux dans mon genre, chassieux,puceux, transis » (l.17) on observe une allitération en [m] et en [s] qui renforce le lien entre les mots et met envaleur l'énumération dévalorisante de ces adjectifs qualificatifs.Une autre énumération lui succède: « poursuivis par la faim, la peste, les tumeurs et le froid » même procédéd'insistance.

on remarque également une construction passive: les français sont sujets passifs et subissent l'action descompléments d'agent juxtaposés, c'est-à-dire des maladies et du froid. Il y a dans cette tirade deux arguments défendus par Bardamu pour étayer la thèse d'une race françaiseinexistante:Les français sont les vaincus du monde, repoussés du continent jusqu'en France: « venus vaincus des quatre coinsdu monde » (l.19) allusion ironique au « veni vidi vici » prononcé par jules César: « je suis venu, j'ai vu, j'aivaincu ».Leur identité repose sur un pur hasard géographique: « ils ne pouvaient pas aller plus loin à cause de la mer » (l.20) Bardamu revisite l'histoire.( On est loin du glorieux Vercingétorix.) La modalité assertive de la conclusion est d'une solennité exagérée, emphatique: « C'est ça la France et c'est ça lesFrançais ».

La dimension cynique et la tonalité violente des propos de Bardamu est renforcée par la réaction d'ArthurGanate: « gravement et un peu triste » b) La vision d'un peuple asservi. Pour lui les hommes sont de simples pantins dont la condition est ridicule. A nouveau, nous retrouvons le procédé de l'énumération, qui permet d'insister sur la souffrance humaine: « Haineuxet dociles, violés, volés, étripés et couillons toujours » Les trois adjectifs centraux sont d'anciens participes passéspassifs (« sont violés par...

»).

Ils sous-entendent que cette violence leur est infligée par quelqu'un.

La critiquesdes puissants est sous-jacente. C'est bien entendu la guerre qui est ici dénoncée.

D'abord implicitement à travers l'antithèse « haineux et dociles » (cette antithèse ouvre la longue réplique de Bardamu.

Elle introduit le thème de la guerre - « haineux »- ,paradoxalement instrumentalisés - « dociles »), puis explicitement à travers le champ lexical de la guerre et de lamort: « étripés », « crève », « soldats gratuits », « héros ») Le lien entre la docilité aux gouvernants et la mort est sous entendue: « on est nés fidèles, on en crève nousautres » On trouve d'ailleurs, parallèlement à celui de la guerre, un champ lexical de la soumission « « dociles », « fidèles »,« maîtres », « sages », « Roi », « mignons ») Quatre reprises nominales juxtaposées désignent le peuple: « Soldats gratuits, héros pour tout le monde et singesparlants, mots qui souffrent » Les deux premiers GN dénoncent l'absurdité de la guerre et discréditent l'héroïsme.La conjonction de coordination marque une rupture qui introduit une gradation: les hommes deviennent de vulgairesanimaux, puis de simples mots, désincarnés.

Ils n'ont aucune liberté ni aucune identité. c) Une vision pessimiste de l'histoire, des idéaux, de la condition humaine. Il y a une vision pessimiste de l'histoire à travers le retour perpétuel aux mêmes événements.

La violence des propostenus par Bardamu sur les « pères » opère une transition, une assimilation totale entre le passé et le présent.. »

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