Lecture analytique de Mon rêve familier de Paul Verlaine
Publié le 19/11/2012
Extrait du document
...
Introduction : Verlaine place son premier recueil poétique, poème saturniens de 1866 sous le
signe de la mélancolie et de la rêverie amoureuse. Le sonnet régulier « mon rêve familier «
est l’un des plus connus de l’auteur. Il y reprend le thème romantique de la femme idéale, qui
console le poète de sa solitude et de l’incompréhension. Mais il refuse les épanchements
lyriques des poètes romantiques ; son lyrisme s’exprime avant tout dans la suggestion et la
musicalité des mots et des vers. Nous verrons ce qui fait le charme envoûtant de ce poète
intimiste en nous intéressant d’une part à la représentation ambigüe de la femme rêvée,
d’autre part au lyrisme musical.
«
3) un être placé sous le signe de la mort
Cette figure mystérieuse et ambigüe de la femme aimée est, dans les tercets, associée à la
mort : « comme ceux des aimés que la vie exila » = périphrase pour désigner les défunts ;
« regard pareil à celui des statues » = un être inanimé et figé ; «l’inflexion des voix chères qui
se sont tues » = silence et passé.
Toutefois l’idée de mort n’est jamais explicite, mais
seulement suggérée et atténuée ; soit par la périphrase et l’euphémisme des v.
11 et 14
(euphémismes du départ et du silence), soit par la comparaison des v.11 « comme » et 12
« pareil » de sorte que l’on ne sait si la femme est morte elle-même ou si elle fait songer à une
morte.
Ainsi le rêve de la femme aimée est comme imprégné du souvenir de la morte, mais le
poète maintient tout au long du poème incertitude et ambigüité : paradoxalement c’est dans le
dernier tercet où domine la figure de la femme (le « je » du poète a disparu) que celle-ci
semble définitivement s’éloigner : « lointaine », « se sont tues ».
II Une rêverie lyrique
1) l’implication du poète
Est une marque essentielle du lyrisme , la première personne est omniprésente dans les trois
premières strophes (pronom sujet « je » ou complément « me », adjectif possessif « mon
front », « mon cœur »).
L’ensemble du poème ressemble à un soliloque où le « je » s’adresse
à lui-même, faisant accéder le lecteur à sa voix intérieure, il fait entendre un langage simple
et oral : vocabulaire simple de la prose « je fais souvent » (v.1) ; répétition : « aimer »,
« comprendre », effets de maladresse syntaxiques : répétition de « et », v.2, 3, 4, 13, phrase
commençant par « care » (v.5) ; le lecteur écoute, comme une confidence, la voix
intérieure du poète qui approfondit un souvenir, hésite ou s’interroge « est-elle… », « Son
nom ? » » ; Il est ainsi plongé au cœur de l’intimité du poète.
2) L’expression des sentiments intimes
Si le sentiment d’amour s’exprime dés le v.2, repris au v.4, c’est surtout sur le désir d’être
compris et apaisé qu’insiste le poète.
Le poème est en effet dominé par l’expression lyrique
d’une souffrance intérieure : souffrance d’être incompris exprimée par la rupture de
l’exclamation « hélas » au v.6, souffrance mystérieuse, peut-être celle de la création poétique,
suggérée par « les moiteurs de mon front blême » (v.7).
Le poète meurtri par une forme de
mal être, de spleen cherche dans la femme l’écho de sa propre souffrance : cf.
« en pleurant »
(v.8).
Il rêve d’une transparence intellectuelle et affective exprimée dans les deux
hémistiches du v.5 « comprend » / « transparent » que rapproche l’assonance « en » et dans le
second hémistiche du v.6 avec l’expression « cesse d’être un problème ».
On retrouve ici la
conception romantique de l’amour comme communion affective qui se passe de mots.
3) Une musique incantatoire
La tristesse langoureuse du poète et de son rêve est d’ailleurs suggérée autant par la
musicalité du poème que par les mots.
Les nombreuses répétitions , qui sont comme
d’apparentes maladresses produisent l’effet d’une berceuse rythmique : cf.
la répétition de la
conjonction de coordination « et » : v.2, 3, et 4 ; cf.
les reprises d’un vers à l’autre « ni tout à.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Verlaine, Poèmes saturniens, “Mon rêve familier”, 1866 : Lecture analytique
- Corpus "mon rêve familier" Paul Verlaine, "parfum exotique" Charles Baudelaire et "j'ai tant rêvé de toi" Robert Desnos
- lecture analytique : Mon reve familier de Verlaine
- Lecture analytique Ariettes V Paul Verlaine.
- Analyse de "Mon rêve familier" de Paul Verlaine et biographie d'auteur.