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le théâtre est-il seulement artifice et conventions, qui, paradoxalement, créent l'illusion théâtrale à laquelle le spectateur aime se laisser prendre ? Ou dévoile-t-il la vérité ?

Publié le 13/03/2014

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illusion
Introduction Le théâtre, dans son texte et dans sa représentation, est peut-être le genre littéraire le plus conventionnel et semble, par ses artifices matériels et ses conventions, nous écarter du réel et de la vérité. Les termes métaphoriques « jeu « et « jouer « qui font partie du vocabulaire dramatique, indiquent bien ce côté factice et illusoire. Problématique : mais le théâtre est-il seulement artifice et conventions, qui, paradoxalement, créent l'illusion théâtrale à laquelle le spectateur aime se laisser prendre ? Ou dévoile-t-il la vérité ? Annonce du plan : s'il n'est pas, comme le dit Hugo, « le pays du réel «, ne dépasse-t-il pas l'artifice pour viser une authenticité humaine et nous reconduire, par des détours, à ce que Hugo appelle le « vrai « ?   I. Le théâtre, art de l'artifice et de l'illusion : un univers de faux-semblants Le théâtre est essentiellement « représentation «. Le verbe implique la notion d'illusion. Et, de fait, rien n'est vrai au théâtre. Tout ce qui fait la réalité de notre vie – le lieu, l'espace et le temps, mais aussi la parole – y est transformé. Diderot note : « On se rend au spectacle avec la persuasion que c'est l'imitation d'un événement et non l'événement même qu'on y verra « (Les Bijoux indiscrets). 1. Sur scène, le lieu n'est pas le lieu : un univers factice de carton La mise en scène – avec les ressources de la scénographie – a une matérialité factice, aisément visible. Le lieu n'est pas le lieu Au théâtre, le lieu est illusion : le spectateur admet que la scène présente comme réel un lieu en réalité factice et que la scène représentent une forêt dans le deuxième acte de Dom Juan, un champ de bataille dans Cyrano de Bergerac. Un décor de carton Victor Hugo, dramaturge lui-même, explique très concrètement : « Le théâtre n'est pas le pays du réel : il y a des arbres en carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous la terre. « « Toutes les réalités de la scène, […] le jeu de l'acteur, l'éclairage sont des réalités qui représentent d'autres réalités […] La scène représente le lieu de l'action (une ogive gothique représente un château), la lumière blanche représente le jour, la lumière bleue la nuit, la musique représente un événement (cri de guerre) […]. « Les masques de l'Antiquité amplifient et déforment voix et visages pour mieux souligner l'identité du personnage : une bouche au rire largement ouvert signale le personnage comique… De même, les costumes, aux couleurs souvent tranchées, prennent une valeur symbolique : le traître de mélodrame est vêtu de noir et porte un large chapeau qui lui couvre le visage pour mieux montrer sa vilenie (on peut penser au manteau noir de Don Salluste de Hugo et à la livrée qui trahit en Ruy Blas le valet). Ainsi, dans La Comédie du langage, de Jean Tardieu, une branche d'arbre en fleur donne l'illusion d'un « beau soir de printemps «. Les épées ne tuent pas, le sang n'est que de la peinture rouge et le poison ne tue pas vraiment Hernani, Doña Sol et le vieux Ruy Gomes…   2. Le temps n'est pas le temps Le lever et de le baisser de rideau, les jeux d'éclairage – l'alternance lumière et noir – sont autant de signes conventionnels qui marquent les limites du spectacle et coupent le théâtre du réel. Le temps lui aussi est illusion : le spectateur admet que deux heures de spectacle équivalent à une journée réelle, voire à plus de dix ans dans Cyrano de Bergerac… Le temps du spectacle raccourcit étrangement le temps de la fiction et l'auteur, pour faire admettre cette étrange égalité (24 heures ou 10 ans = 2 heures) et créer l'illusion. 3. Une action recomposée et souvent invraisemblable En recomposant le temps, en laissant des trous temporels dans le texte théâtral, en admettant des vides ou des ruptures, l'auteur résume de t...
illusion

« et que la scène représentent une forêt dans le deuxième acte de Dom Juan, un champ de bataille dans Cyrano de Bergerac. Un décor de carton Victor Hugo, dramaturge lui-même, explique très concrètement : « Le théâtre n'est pas le pays du réel : il y a des arbres en carton, des palais de toile, un ciel de haillons, des diamants de verre, de l'or de clinquant, du fard sur la pêche, du rouge sur la joue, un soleil qui sort de dessous la terre. » « Toutes les réalités de la scène, [...] le jeu de l'acteur, l'éclairage sont des réalités qui représentent d'autres réalités [...] La scène représente le lieu de l'action (une ogive gothique représente un château), la lumière blanche représente le jour, la lumière bleue la nuit, la musique représente un événement (cri de guerre) [...]. » Les masques de l'Antiquité amplifient et déforment voix et visages pour mieux souligner l'identité du personnage : une bouche au rire largement ouvert signale le personnage comique...

De même, les costumes, aux couleurs souvent tranchées, prennent une valeur symbolique : le traître de mélodrame est vêtu de noir et porte un large chapeau qui lui couvre le visage pour mieux montrer sa vilenie (on peut penser au manteau noir de Don Salluste de Hugo et à la livrée qui trahit en Ruy Blas le valet).

Ainsi, dans La Comédie du langage, de Jean Tardieu, une branche d'arbre en fleur donne l'illusion d'un « beau soir de printemps ».

Les épées ne tuent pas, le sang n'est que de la peinture rouge et le poison ne tue pas vraiment Hernani, Doña Sol et le vieux Ruy Gomes...   2. Le temps n'est pas le temps Le lever et de le baisser de rideau, les jeux d'éclairage - l'alternance lumière et noir - sont autant de signes conventionnels qui marquent les limites du spectacle et coupent le théâtre du réel. Le temps lui aussi est illusion : le spectateur admet que deux heures de spectacle équivalent à une journée réelle, voire à plus de dix ans dans Cyrano de Bergerac...

Le temps du spectacle raccourcit étrangement le temps de la fiction et l'auteur, pour faire admettre cette étrange égalité (24 heures ou 10 ans = 2 heures) et créer l'illusion.. »

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