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Le romantisme en Europe (Exposé – Art & Littérature – Collège/Lycée)

Publié le 14/11/2018

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europe

EN MUSIQUE ET EN PEINTURE C'est dans l'Allemagne de 1800 que commencent à se dessiner des liens entre la musique et la littérature, quand les jeunes amis de Jean-Paul retrouvent dans l'œuvre fougueuse de Beethoven la même fièvre qui anime leurs récits. En 1830, le théâtre de Hugo trouve son pendant dans la Symphonie fantastique de Berlioz et dans les tableaux de Delacroix, pour imposer une esthétique fondée sur l'énergie, le goût des contrastes, une certaine violence. Liszf et Chopin seront eux aussi, dans les années 1830, des artistes emblématiques du romantisme, à la fois pour la mélancolie discrète de leurs œuvres pour piano et pour la dimension folklorique de certains motifs, indissociables des revendications nationalistes portées par le romantisme européen de l'époque : les danses hongroises du premier, les célèbres polkas du second ne sont pas seulement des œuvres à la mode, mais aussi des revendications de fierté nationale.

D'UNE REDECOUVERTE COMMUNE DES IDENTITES. PARTICULIERES

Le classicisme était français, le baroque n'a été identifié comme un mouvement esthétique que deux siècles après sa disparition : on peut considérer le romantisme comme le tout premier mouvement littéraire européen, le premier à avoir été théorisé et développé dans plusieurs pays différents. Certes, c'est en ordre dispersé qu'apparaissent les différentes écoles romantiques, et près de soixante ans séparent les premiers balbutiements du Sturm und Drang allemand et la révolution romantique française de 1830. Mais il existe incontestablement un esprit romantique européen, marqué par le goût du désordre, le culte de l'énergie et de l'originalité individuelle, la volonté de renouveler des formes épuisées, et... l’exaltation du génie national. Toute l'ambiguïté, toute la richesse du romantisme européen gisent dans ce paradoxe d'une redécouverte commune des identités particulières. Là où le classicisme et les Lumières avaient imposé l'idée d'un goût universel - avec pour référence la culture gréco-latine, pour emblème Racine, comme langue le français -, les romantiques retrouvent le goût de l'étrange beauté du folklore, des irrégularités fascinantes et des ressources inépuisables de leurs langues nationales.

STURM UND DRANG OU PRÉROMANTISME?

Le romantisme est une école du Nord, par opposition à une culture classique d'inspiration profondément méditerranéenne. La Grande-Bretagne, l'Allemagne sont ses premiers foyers. C'est dans l'atmosphère universalisante et classique de l'Enlightenment et de l'Aufklârung, les Lumières anglaises et allemandes, qu'apparaissent les premiers germes d'une autre façon de ressentir le monde, de le penser, et de l'écrire.

S'il faut citer un nom, on peut avancer celui de Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832), jeune écrivain qui, avec Les Souffrances du jeune Werther (1774) - une histoire

d’amour malheureuse s’achevant sur un suicide -, fait pleurer une génération entière. D’emblée, le héros romantique se révèle : jeune, ne maîtrisant pas le monde qui l’entoure, débordé par ses sentiments, peinant à trouver sa place dans une société qui ne le comprend pas, voué à une solitude qui est aussi promesse d’introspection, de profondeur, de méditation.

Avec le dramaturge Friedrich von Schiller (1759-1805), Goethe est au centre d’un mouvement littéraire appelé le Sturm und Drang («orage et élan»), du nom d’une tragédie de Klinger. S’il évolue assez vite vers une conception beaucoup plus classique de la littérature et de l’existence, Goethe restera pour les générations suivantes une référence indépassable.

Il faut noter qu’en France la littérature est en plein bouleversement elle aussi ; mais son évolution se joue dans le cadre intellectuel et social des Lumières, sans qu’aucune école ne s'affirme officiellement C'est pour cela que l'histoire littéraire a longtemps parlé de préromantisme pour désigner des écrivains, ce que les critiques préfèrent aujourd'hui appeler les Stürmer français.

Le premier d'entre eux est lean-Jacques Rousseau (1712-1778), qui, avec Julie ou la Nouvelle Héloise (1761), donne le grand roman français de la passion ; Rousseau qui révolutionne le style en imposant la première personne, Rousseau qui est parmi les tout premiers, aussi, à opposer au monde social celui de la nature, plus propice à l'épanouissement du génie personnel, Rousseau enfin qui donne à la solitude droit de cité en littérature (Les Rêveries du promeneur solitaire, 1782) et invente avec Les Confessions (1782) l'autobiographie moderne. Le romantisme se nourrira de cette œuvre que l'on pourrait décrire comme une littérature du moi et de la difficulté de vivre.

À côté de Rousseau, le travail de Denis Diderot (1713-1784) apparaît lui aussi comme une étape décisive, avec la remise en cause de tous les codes esthétiques : le théâtre (Entretiens sur le Fils naturel, 1757), la peinture (Salon de 1765) sont dégagés des règles classiques pour faire place à l'originalité de l'auteur, aux passions et à l’invention ; à l'énergie, en somme, et non plus à l'imitation des modèles antiques. Louis Sébastien Mercier (17401814), d'une génération plus jeune, en tirera le premier les leçons,

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« LA LATINITÉ OUBLIÉE Mouvement du Nord, opposé à un· classicisme dont les grandes références étaient grecques et romaines, le romantisme n'a presque pas pris racine dans le Sud : ni en Espagne ni au Portugal il n'a donné naissance à des œuvres d'envergure.

Il existe en revanche un romantisme italien, avec les figures de Ugo Foscolo.

Alessandro Mauoni et celle, plus discrète, de Giacomo Leopardi.

Le Sud méditerranéen, pourtan� n'est pas absent du romantisme européen, mais il a surtout été «colonisé» par les écrivains du Nord.

Ce sont ses paysages et ses sentiments passionnés qui vont devenir des sujets littéraires, chez Musset.

Dumas.

George Sand.

Byron et Shelley et Goethe s'y promèneront parmi bien d'autres, et Alexandre Dumas ira même dans les années 1850 jusqu'à participer au Risorgimento italien, au côté de Garibaldi.

notamment quand les Allemands réagissent culturelle ment aux invasions napoléoniennes.

IIJII!.!I!J!iii!:i·i·i C'est Napoléon qui réunit paradoxalement les deux grandes figures de ce que l'on nomme quelquefois le premier romantisme français : Mme de Staël et Chateaubriand.

Gennoine de Stoël (1766-1817) incarne pendant quinze ans l'opposition intellectuelle à institutions sociales.

qui pose les principes d'une liberté littéraire bien peu compatible avec les ambitions du Premier consul pour la culture.

Proscrite, exilée en Suisse, elle réunit les esprits les plus brillants de l'Europe, s'essaie à des romans (Delphine.

1802.

et surtout Corinne, 1807), rencontre Goethe et Schiller (en 1803-1804), et A.W.

Schlegel (en 1807).

Son admiration des littératures nordiques se traduira dans un grand livre, un de ceux qui établissent des ponts entre les cultures : De l'Allemagne {1810).

Fronçois-Rrné dr Chotroubriond (1768-1848) a fait ses débuts dans l'émigration, et le Génie du christianisme qull publie en 1802 apparaît signer un concordat avec le pape.

Chateaubriand célèbre dans son livre la beauté du vieux monde chrétien, tout en s'accordant des échappées romanesques avec René et Atala, deux fragments publiés à part.

Entre le «vague des passions» et la beauté nostalgique des clochers de campagne, c'est tout un pan du romantisme français qui se dessine, un romantisme du désenchantement et non de la révolte, le romantisme d'une aristoaatie qui ne s'est pas engagée dans l'épopée napoléonienne, mais qui a renoncé à en contrarier le cours.

Chez Mme de Staël comme chez Chateaubriand, il existe ainsi une posture ambiguë vis-à-vis de l'histoire et de la politique, reconnues comme des dimensions essentielles de l'existence humaine, mais par des écrivains qui, de gré ou de force, s'en tiennent un peu à l'écart.

On retrouve la même distance chez certains poètes anglais comme lord Byron (1788-18 24), qui donne en 1819 un Don Juan au héros un peu fatigué.

Plus virulen� c'est une révolte qu'affirme son ami Percy Bysshe Shelley (1792-18 22), avec un Byron comme Shelley cultivent un certain goût pour l'exotisme.

que l'on trouve aussi chez Chateaubriand : entre l'appel de l'histoire et celui du grand large, les deux Anglais choisissent le grand large.

Un autre écrivain, à la même époque, vit lui aussi une expérience d'exil :le Polonais Adom Mickiewicz 1855), qui, dans une Pologne sans territoire, donne une Ode à la jeunesse (1820) partagée entre espoir et mélancolie.

L'histoire, dans ce cas, rattrapera finalement la littérature, quand l'ode du poète devient le chant des insurgés polonais lors de la tentative de révolution de 1830.

L'ÉCOLE DU DÉSENCHANTEMENT Les années 1820 sont marquées par un engagement de plus en plus net des écrivains romantiques dans les luttes politiques.

Parallèlement se dessine un mouvement qui voit l'école française occuper peu à peu le centre de la scène romantique européenne.

Alphonse de Lomorline (1790-1869) donne avec les Méditations poétiques (1820) l'un des premiers manifestes du de figurer llntériorité par divers moyens : reflets d'un paysage, histoire, mythe.

L'individu isolé jusqu'à la solitude, cultivant un certain mal-être face au monde.

Alfred de Vigny (1797-1863) traite ainsi les thèmes du silence de Dieu et des noirceurs de l'histoire.

auxquels s'oppose la solitude morale du grand homme, quelquefois figuré sous des traits animaux, comme dans la célèbre «Mort du loup».

Le roman Cinq-Mars (1826) montre un héros masqué et isolé, dont l'échec est aussi une méditation sur l'histoire et ses pièges.

On a parlé, pour désigner cet état d'�me commun à divers écrivains, d'une école du désenchantement Mais, en ce début des années 1820, le romantisme commence à slmposer en France comme un mouvement littéraire organisé, sous l'impulsion de deux hommes a priori très différents.

Le premier est Charles Nodier (1780.

1844), qui à partir de 1824 ouvre son salon à un groupe de jeunes écrivains désireux d'imposer une manière Parmi eux.

Vidor 1885) très vite le chef de Orientales (1822) et compose des Ballades échevelées, avant de se tourner vers le thé�tre.

La préface de Cromwell {1827) dame haut et fort la liberté absolue de l'art, promeut l'alliance du sublime et du grotesque, affirme le goût de la reconstitution historique, dans la lignée des romans de l'Écossais Wolter Scott (lm -1832; La Fiancée de Lammermoor, 1819).

Le terme de «romantisme» (utilisé en concurrence avec celui de HOmanticisme ») entre peu à peu dans toutes les conversations.

et un certain Henri Beyle (1783-1842), dit Stendhol, donne en 1823 un manifeste éclatant : Racine et Shakespeare, affirmant haut et romantisme, il ne sera d'aucune école, franc-tireur emblématique de la capacité du mouvement à nourrir le génie individuel.

lE ROMANTISME EUROPÉEN DE 18JO le romantisme désenchanté des années 1820 est volontiers conservateur.

«ultra" dit-on alors.

Mais, au fil des années, Hugo et ses jeunes amis se tournent vers un libéralisme politique plus en accord avec leur revendication esthétique majeure : la liberté.

La révolution politique de 1830 se double ainsi d'une révolution esthétique, avec la célèbre bataille d'Hernani, une pièce de Vidor Hugo prenant de sérieuses libertés avec les règles du thé�tre et de la prosodie classiques.

Notre-Dame de Paris, un an auparavant, avait déjà consacré le génie d'un écrivain de tout premier plan, voué à incarner le mouvement presque à lui seul.

Sensible aux harmonies secrètes du monde spirituel (Les Feuilles d'automne, 1831, Les Voix intérieures, 1837), il est aussi convaincu d'une mission du poète, ce qui va l'amener, à partir des années 1840, à se détourner de la littérature pour passer à la politique.

D'autres s'en tiendront aux délices secrètes de la solitude et de la retraite, comme Marceline Desbordes­ Valmore (1786-1859) :avec les poèmes de Pleurs (1833), elle offre à la sensibilité de l'époque un miroir fidèle.

L'Italien AleSSIIndro Mtmzoni (1785- 1873), en 1827, a donné des Fiancés - 1 •• �"' ..

·: populaire qui ne se démentira plus, mais l'éloignera d'une école romantique vouée dès la fin des années 1830 à se dissoudre au profrt du génie individuel des uns et des autres.

@,]JM!ijà)iJif:l Théophile Gautier (1811-1872) est l'exemple même de cette dérive.

Si le gilet rouge qull arbore lors de la «bataille d'Hernani» est resté célèbre, il participe à infléchir le romantisme vers d'autres esthétiques.

Avec la préface de son roman Mademoiselle de Maupin (1835), il défend des principes romantiques : pureté et liberté; mais cela l'amènera à défendre l'art pour l'art, dont la véritable traduction esthétique sera le mouvement du Parnasse, dans les années 1850 (tmaux et Camées, 1852).

De la même façon, George Sond - - , : .

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f-e- f : .

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(Aurore Dupin, 1804-1876) exaltation du choix individuel pouvant aller jusqu'à la révolte.

Un individu en marge, révolté ou abattu, ayant du mal à s'accorder à son époque : dans toute l'Europe, cette figure s'impose comme le miroir de toute une génération.

Peu sensible au modèle du guide prophétique et à la mission sociale de l'écrivain, Alfred de Musset (1810- 1857) est de ceux qui inventent le langage d'une époque.

Il publie à vingt ans ses Cantes d'Espagne et d'Italie: violence, passion, couleur locale assurent au jeune poète une réputation qui fait de lui une des principales figures du romantisme de 1830.

Il trouve dans une certaine fragilité, exaltée par les bouleversements amoureux.

la source d'un lyrisme visant à l'authenticité, modulant la plainte d'une �me déchirée (Les Nuits, 1835- 1837).

La figure de la muse.

qui hante nombre de ses poèmes.

rappelle l'importance pour les romantiques d'une inspiration qu'ils préfèrent de très loin au travail.

à l'art.

à la technique.

De là, sans doute.

leur penchant pour les formes libres : autobiographie, drame.

Chez Musset, l'affirmation de la liberté est très vite associée au sentiment d'un échec : La Confession d'un enfant du siécle {1836) est le roman du ratage d'une génération, qui va trouver son miroir dans la pièce longtemps réputée injouable de Lorenzaccio (1834).

Un thé�tre novateur sur les ratés de la politique : outre-Rhin, le jeune Georg Büchner {1813-1837) donne la même année 1834 une Mort de Danton aussi bouleversante que Lorenzaccio et qui sera suivie d'un autre chef-d'œuvre : Wayzeck (1836).

Alexondre Dumos (1802-1870) débute r--- =�-.., lui aussi sous la cour, 1829; Tour de Nesle, 1832), mais il délaisse bientôt le drame pour le roman :Le Comte de Monte-Cristo (1845) lui vaut un succès ; •� :.:.

puis trouve sa voie dans l'exploration conjointe d'un certain idéalisme socialiste et d'une veine champêtre (La Mare au diable, 18 46), qui, bien qu'empreintes de désenchantement, appartiennent bien davantage à son œuvre propre qu'à une quelconque école.

Gérard de Nerval (1808-1855), marqué par l'explosio n romantique de 1830, ne trouve véritablement ses marques que dans des récits au ton très personnel, où la crainte de la folie et le voisinage du merveilleux vont de pair avec l'évocation de figures féminines tour à tour inquiétantes et salvatrices (Les Filles du feu, 1854; Aurélia, 1855), bien loin de la muse éthérée qui apparaissait dans les Nuits de Musset.

Face à ces auteurs français qui occupent alors la scène littéraire européenne.

quelques étrangers i mp osen t des œuvres associées au romantisme, sans obtenir la même attention.

Mikhaillourievitch Lermontov (1814-1841).

avec Un héros de notre temps {1840), explore une veine ironique reliant l'histoire littéraire russe à celle de l'Europe.

D'autres auteurs.

pendant quelques décennies, continueront à se réclamer du romantisme, dont celui que l'on associe pourtant généralement au énergie, désordre, aspiration désespérée ou nostalgique à l'unité de l'idéal sont des motifs romantiques que l'on retrouve chez l'un comme chez l'autre.

Mais le romantisme français et européen, en tant que mouvemen� s'éteint à l'aube des années 1840.l.'échec des Burgraves (Victor Hugo, 1843) signe ainsi la fin du thé�tre romantique.

Le roman obéit à ses propres lois, et la poésie lyrique continue son évolution, frayant la voie de l'intériorité et de la quête de l'idéal, sans plus se référer au romantisme.. »

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