Le repas: de << Les deux jeunes gens >> à << des étendards >> - Une partie de campagne de Maupassant
Publié le 14/09/2018
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Psychologie : des couples menacés
La place réduite réservée à Mlle Dufour appelle deux commentaires. Dans une chronique de 1884, Maupassant note que « la jeune fille [est] un sujet difficile pour des hommes comme Goncourt et Zola >> (qui venaient de publier respectivement Chérie et La Joie de vivre) : comment un écrivain épris de vérité peut-il réussir à connaître cet << être secret, encore voilé, mystérieux >> ? << Comment deviner ces ombres d’idées, ces commencements de passions, ces germes de sentiments, tout ce confus travail d’un caractère qui se forme ? >> Le narrateur réaliste place donc le lecteur devant cette énigme vivante, en lui donnant quelques indices d'une évolution intérieure, secrète et peut-être même inconsciente (ce que suggère l’adverbe << vaguement»). C’est aussi le moyen de ménager son intérêt, Mlle Dufour semblant, en raison de son mystère même, appelée à devenir l'héroïne d’une aventure qui la fera davantage connaître.
Quatre indices trahissent ce début de métamorphose : sa gêne devant les bras nus des canotiers fait place à un premier regard (elle est << émue » par leurs discours), puis à un regard plus long (<< La jeune fille les examinait de côté maintenant ») qui dit à la fois l’intérêt et la pudeur, puis à un éclat du regard et des joues qui est généralement donné comme le signe du désir2. Rien ne la lie, à première lecture, à celui qui doit être bientôt son mari, mais le propre de cette nouvelle est d’impo ser une lecture rétrospective qui donne sens à des faits d’abord perçus comme insignifiants.

«
Action:
vers l'éclatement de la famille Dufour
Le déroulement du repas obéit à deux logiques contraires.
Il est d'abord conforme aux mœurs des petits-bourgeois pour
lesquels une partie de campagne est l'occ asion de quelques
débo rdements contrôlés (excès de soleil, de nourriture, de
boisson, relâchement de la tenue habituelle) ; il conduit logi
quement à une sieste répara trice, d'autant que l'on s'est > (2A).
Mais à ce compor te
ment attendu (et convenu), qui est surtout celui des deux
hommes, s'oppose celui des deux femmes qui se montrent de
plus en plus sensibles à l'élément perturbateur que constitue
la présence des canotiers.
La progression de l'action s'effectue ainsi en quatre mou
vements :
1.
De > à > : la
tension entre les deux comportements est visible dans l'oppo
sition de la mère, dé jà en proie à une certaine excitation, et
de l'apprenti, tout à son repas.
Chez le père et la fille , cette
contradiction prend la forme d'une gêne ou d'u ne mauvaise
humeur.
2.
De à :
Mme Dufour, sous prétexte d'amabilité, engage la conver
sation avec les canotiers, qui prof itent de l'occasion pour
donner d'eux une image poétique.
Chez la grosse dame, le
repas passe au second plan: elle refuse le lapin que lui offre
son mari.
Sa fille commence à s'intéresser aux canotiers.
3.
De à : après l'inter
ruption de son mari, qui a remis le repas au premier plan,
Mme Dufour relance > la conversation avec les
canotiers.
La jeune fille montre de plus en plus son intérêt.
Le mari et l'apprenti sont mis ou restent hors jeu.
4.
De : la logique du repas
champêtre reprend ses droits, la famille semble à nouveau unie
dans un compor tement festif (emploi de > et >).
Mais les excès de table servent le dessein des canotiers, qui
n'a uront pas de mal à briller devant des femmes >
et des hommes ridicules.
La scène du repas a donc précisé et modif ié les relations
entre les couples, les deux femmes ayant maintenant tendance
à s'é loig ner de leurs compa gnons habituels..
»
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