« Le personnage doit posséder un caractère, un visage qui le reflète, un passé qui a modelé celui-ci et celui-là. Son caractère dicte ses actions, le fait réagir de façon déterminée à chaque événement. Son caractère permet au lecteur de le juger, de l'aimer, de le haïr. » Telle est, d'après un auteur contemporain, la place primordiale accordée au personnage par les romanciers du XIXe siècle.
Publié le 03/03/2011
Extrait du document
Vous commenterez ce jugement, et vous vous demanderez, en recourant à des œuvres précises, si le roman de cette époque ne présente pas d'autres caractères essentiels. Le libellé du sujet met en lumière le problème posé, celui de savoir si le caractère essentiel du roman du XIXe siècle, c'est d'avoir accordé une place primordiale au personnage. On vous demande expressément une discussion : le roman du XIXe siècle n a-t-il pas d'autres caractères essentiels, c'est-à-dire d'autres buts, d'autres intérêts, que de donner une place primordiale au personnage?
«
d) Aux traits moraux se joignent des traits sociaux : ceux du boutiquier enrichi doué d'un certain sens pratique desaffaires.
FEUILLE 2 : a) Le visage reflète : 1 une certaine inintelligence; 2 une concentration de pensée sur un objet unique.
b) L'habit est celui d'un riche commerçant en retraite, puis il se dégrade en même temps que s'opère une déchéancephysique coïncidant avec les ravages de la passion (qui, dans ses accès, donne au.
héros une force gigantesque).
c) Le langage est tantôt celui d'un bourgeois peu cultivé, tantôt celui d'un passionné lyrique.
FEUILLE 3 : Le passé du boutiquier en un temps de spéculation explique sa situation sociale et la forme de sonintelligence; cette médiocrité et l'abondance de ses moyens financiers provoquent, chez un veuf, seul avec sesfilles, l'idée fixe de rendre celles-ci extrêmement heureuses.
FEUILLE 4 : Les principaux événements du roman se succèdent rapidement, en une crise, au moment où le PèreGoriot arrivé au bout de ses ressources constate que ses filles ne l'aimaient que pour son argent.
Il est en partie lacause de ces événements, puisque c'est lui qui a mis aveuglément ses filles dans la position sociale qu'ellesoccupent, a encouragé leurs défauts et les a habituées à compter sur lui sans discussion.
Il n'a pas les qualitésintellectuelles et morales nécessaires pour dominer la situation et la subit, en réagissant selon sa passion : humilitédu père éconduit; amitié pour Rastignac afin de se rapprocher de sa fille, ce qui l'implique dans d'autres difficultésfinancières, d'où, malgré ses nouveaux sacrifices, la terrible scène entre les deux sœurs qui provoquera sa mort.
FEUILLE 5 : Vous noterez vos réactions (admiration? pitié? horreur devant la cruauté des deux filles?) et lepathétique des grandes scènes : dispute des sœurs; mort du Père Goriot, etc.
FEUILLE 6 : Vous chercherez d'autres sources d'intérêt que l'étude des caractères, par exemple : a) desdescriptions de choses (salles, maisons, quartiers, Paris, etc.); b) la mise en œuvre d'une certaine philosophie (parexemple l'arrivisme); c) des éléments de mystère romanesque (ex.
Vautrin); d) une sorte d'éclairage métaphysique :le châtiment du ciel s'abattant sur la fille la plus odieuse.
Les caractères eux-mêmes ne se limitent pas à une simplepsychologie, il s'agit aussi de types sociaux déterminés par un milieu (cf.
M., XIXe s., pp.
156-157 : Balzacvisionnaire, réaliste).
FEUILLE 7 : Vous trouverez aussi, dans les romans choisis comme exemples, au-delà de la simple peinture decaractères : a) dans La Chartreuse de Parme : une attitude devant la vie, un art de chercher le bonheur; b) dansLes Misérables : un roman social; un roman épique; c) dans Madame Bovary: une confession personnelletransposée; une philosophie pessimiste de la vie; d) dans Germinal: un déterminisme biologique et social qui diminuel'intérêt des caractères et ramène les personnages soit à des types de diverses espèces, soit à des symboles; unroman social; une œuvre épique dans laquelle les choses vivent autant que les hommes..
»
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