Le personnage de TARTARIN DE TARASCON

« capitale et le Sud de la France, qu'il chanta de façon simple et émouvante dans Les Lettres de mon moulin (1866).Tartarin de Tarascon est l'archétype du Provençal hâbleur tel qu'on se l'imagine dans le reste de la France.Sympathique, ridicule et attachant, il réalise une étonnante synthèse entre la soif velléitaire d'aventure et le goûtbourgeois du confort et de la sécurité.En fait, et c'est un vrai coup de génie de la part de Daudet, Tartarin réunit dans un même corps les espritscomplémentaires de don Quichotte et de Sancho Pança.Du premier, il a les rêves de grandeur, l'imagination délirante et l'esprit empoisonné par la lecture de romansd'aventures.

Comme don Quichotte, Tartarin transfigure la réalité; comme lui il connaît sans cesse la déception dene pas se trouver conforme à ses rêves.

En cela, Tartarin est un idéaliste et cet aspect nous le rend sympathique :c'est un chercheur d'absolu.

On pourra d'ailleurs le comparer, de ce point de vue, à un autre personnage, tragiquecelui-là, victime de sa vision « romanesque » des choses : madame Bovary.Mais derrière ce Tartarin fougueux et emporté veille son double tranquille.

De Sancho, Tartarin possède le bon sens,la naïveté bonhomme, l'amour des bonnes choses et le goût du confort.

A chaque nouvelle mésaventure causée parl'esprit d'aventure, Tartarin se frotte les côtes et s'adresse à lui-même des reproches pleins de lucidité.Il n'y a donc aucune vérité psychologique dans le personnage de Tartarin.

C'est un type, le type du mythomane,poussé jusqu'à la caricature.

Mais c'est un personnage épique, démesuré, comique par sa grandiloquence; cettedimension « hénaurme » expliquant le succès qu'il a connu.Sur le plan historique, les aventures de Tartarin reproduisent assez fidèlement l'actualité de l'époque. Ainsi le premier roman de la trilogie nous décrit, derrière les élucubrations du héros, une Afrique où l'administrationcoloniale achève de faire régner l'ordre et la discipline occidentaux, tandis que la Cochinchine et le Cambodge sonten voie de conquête.Tartarin sur les Alpes évoque de façon comique les ascensions alpines, dont la mode commença à se répandre auxenvirons de 1850 (la Compagnie des guides de Chamonix date de 1823, le Club alpin suisse de 1857) mais aussi lesattentats anarchistes qui ensanglantèrent l'Europe à partir de 1865.

Enfin, on a déjà évoqué l'arrière-plan politiquede Port-Tarascon, qui renvoie aussi au développement économique de la Polynésie (Papeete, la capitaleadministrative de Tahiti, est fondée en 1890).Cette actualité de Tartarin s'explique par le fait que Daudet, soucieux de donner une suite aux aventures de sonhéros, a dû chercher chaque fois un cadre susceptible de fournir des péripéties en assez grand nombre.

Le dernierroman est d'ailleurs, de ce point de vue, le plus faible des trois.

Mais Tartarin, collant à l'actualité, se trouve ainsienrichi d'une dimension supplémentaire.

Il est en recherche constante de nouveauté dans l'aventure, curieuxd'expériences et prompt à s'enthousiasmer pour toute épopée nouvelle.

Il se rapproche par là de ces découvreursmalheureux quesont Bouvard et Pécuchet. Succès et avatars Le succès de Tartarin de Tarascon fut tel que Daudet écrivit une véritable saga autour de son personnage.

En fait,aujourd'hui, seul le premier roman est vraiment connu.

Il est devenu un classique de la littérature enfantine.En 1934, le cinéaste Raymond Bernard a porté à l'écran Tartarin de Tarascon, sur un scénario de Marcel Pagnol,avec Raimu dans le rôle principal.. »