Le personnage de roman
Publié le 02/01/2012
Extrait du document
Le concept de « personnage « est apparu à la Renaissance, il désigne l’ensemble des personnalités fictives évoluant dans une œuvre littéraire. C’est au 19ième siècle, lorsque le genre romanesque devient dominant que cette notion de « personnage « est réellement mise en lumière. Le public de l’époque faisait avec le théâtre l’amalgame entre réalité et fiction, entre « personnages « et « personnes «, amalgame d’ailleurs entretenu par la suite avec le cinéma. D’ailleurs dans un entretiens, avec l’écrivain Franck Maubert en avril 1982, le réalisateur François Truffaut affirmait « Qu'on écrive un roman ou un scénario, on organise des rencontres, on vit avec des personnages ; c'est le même plaisir(…) « Ainsi, François Truffaut , rapproche littérature et cinéma, en insistant , sur l’existence d’un microcosme crée par le romancier ou le réalisateur dans lequel évolue le personnage . Le personnage, semble donc évoluer, dans un monde à part, monde de papier, ou de pellicule,, ainsi s’avère t’il intéressant de lire R.Bourneuf et R.Ouellet , lorsqu’ils affirment dans L’Univers du Roman que « Le personnage de roman comme celui de cinéma ou celui de théâtre, est indissociable de l’univers fictif auquel il appartient : hommes et choses. Il ne peut exister dans notre esprit comme une planète isolée : il est lié à une constellation et par elle seule il vit en nous avec toutes ses dimensions. « . Les deux auteurs, semblent donc lier intrinsèquement personnages de roman et monde fictionnel auquel ils appartient. Ainsi instaurent t’ils clairement, une contingence du personnage de roman qui comme au cinéma et au théâtre dépend de « l’univers fictionnel auquel il appartient «. Les deux critiques vont même plus loin en affirmant explicitement, que le personnage de roman n’existe que par la seule présence de cet « univers fictif «, qui lui seul le révèle. Ainsi, le personnage romanesque ; en dehors du microcosme fictionnel, n’aurait pas d’existence propre. On est en droit alors de se demander si les deux auteurs, en affirmant une telle dépendance du personnage romanesque « à l’univers fictif auquel il appartient «, n’omettent t’ils pas tout simplement, la dépendance de l’univers fictif, envers le personnage romanesque. Pour être clair, il est évident, certes, que le personnage de roman dépend de l’univers fictif, mais l’univers fictif, ne dépend pas t’il pas à son tour du personnage romanesque lui-même, qui doit ainsi avoir une certaine liberté, pour apporter de la crédibilité à la fiction et ainsi faire adhérer le lecteur au roman. Pour répondre à cette problématique, nous verrons pour commencer que de nombreux romans, mettent en scène, effectivement, une dépendance du personnage « à l’univers fictif auquel il appartient «, par la suite nous nous intéresseront, au fait que cette dépendance du personnage de roman à l’univers fictif, semble engendrer par la même une autre dépendance celle de l’univers fictif au personnage qui gagne ainsi en liberté pour faire valoir le monde fictionnel ; pour terminer nous montrerons que certains romans, refusent, la dépendance du personnage face à l’univers fictif, au profit d’un individualisme, d’une certaine liberté du personnage.
«
propre évolution sans cela, le personnage est complètement décharné, arraché à son univers c’est ce que diraFlaubert quand il écrira au sujet des personnages de Madame Bovary : « ce qu'ils sont maintenant, ce qu'ils font, ce qu'ils rêvent est le résultat de ce qu'ils ont été, de ce qu'ils ont fait, de ce qu'ils ont rêvé ».
L’univers socialstigmatise alors les personnages de Zola et les dominent un peu.
Le romancier, tente donc d’apporter uneexistence aux personnages, existence qui semble dépendre comme l’affirment Bourneuf et Ouellet, de l’universfictif dans lequel ils sont intégrés.
Il ne faut alors pas confondre « personnes » et « personnages », l’essencemême du personnage pour les deux critiques est de dépendre d’un univers fictif.
D’ailleurs pour Jacques Déridadans le Monde de l’éducation « le secret d'un personnage n'existe pas, il n'a aucune épaisseur en dehors duphénomène littéraire .
», ce qui reprend tout à fait la définition de Bourneuf et Ouellet, c’est « l’univers fictif », ce que Dérida qualifie de « phénomène littéraire » qui donne « l’épaisseur » aupersonnage, c’est donc la fiction qui nourrit le personnage.
Comme l’ont dit les deux critiques, l’univers fictif est à la fois composé « d’hommes et de choses », ainsi lepersonnage, est à la fois en contact avec l’humain et le matériel.
Un objet peut ainsi révéler, tout un mécanismeromanesque dans lequel le personnage est objet littéraire de la fictionnalité.
Ainsi dans les Liaisons Dangereuses de Choderlos de Laclos, les lettres révèlent à la fois le caractère des personnages, mais également, l’évolution de l’intrigue.
Entre lettres d’amour candides et missives destructrices, l’auteur met enexergue, un mécanisme de trahison, même Madame de Rosemonde apparaissant comme la femme la plusrespectable du roman, devient dépositaire de la correspondance de Valmont et Merteuil et alors complice indirecteaux ravages de l’écriture.
La lettre devient objet littéraire, et parfois arme de destruction.
Ainsi, sans les lettres,les personnages de Laclos sont complètement stoppés dans leur intrigue, dans le sens ou tout dépenduniquement, de ces lettres, sans cela, l’action est vide, les personnages sans intérêt.
Il est alors difficiled’extraire le personnage de son univers romanesque, comme dans la Princesse de Clèves , le regard de Madame de Clèves sur Nemours, révèle l’amour passionné qu’elle à pour lui dans la deuxième partie du roman.
Sans ce regard,sans ce tissage romanesque présent dans « l’univers fictif », les personnages semblent vidés de tout leur sens, detout leur intérêt.
Ce jeu du regard, qui selon Freud, est un puissant révélateur de l’amour, révèle au sein mêmede l’univers fictif, toute la « consistance » de l’amour de la Princesse.
Le personnage semble donc avoir besoind’un univers particulier, entre matérialité et relations humaines, qui lui confère un caractère, des sentiments, bref,une existence.
Comme au cinéma et au théâtre le personnage semble, jouer un rôle, il est le porte étendard desidées de l’auteur d’ailleurs en latin , persona designe « le masque de l’ acteur » et le suffixe « -age » provient du verbe agere : signifiant « agir »., étymologiquement le personnage semble donc agir dans un univers de représentation, il est l’outil de la fiction.
Il y a donc nettement une dépendance du personnage face à l’universfictif, mais l’univers fictif, peut lui aussi, avoir besoin du personnage comme moteur à la fictionnalité, on peutpostuler alors l’existence d’une double dépendance, celle du personnage envers l’univers fictif, mais aussi celle del’univers fictif envers le personnage.
En effet, sans personnage, la fiction n’a plus d’intérêt, ce caractèreindispensable du personnage lui confère une certaine liberté c’est que nous tenterons de voir dans une secondepartie.
Bourneuf, et Ouellet semblent avoir bien cerné cette dépendance du personnage envers ce qu’ilsqualifient « d’univers fictif », mais ont peut légèrement nuancer cette définition du personnage romanesque.
Lepersonnage romanesque est ancré dans la fiction, mais doit également, s’en éloigner et acquérir une certaineliberté face à cette « constellation fictive » pour reprendre l’expression des deux critiques.
Ainsi, il y a unedépendance du personnage au microcosme romanesque, mais il peut également y avoir, une dépendance inverse :celle du microcosme romanesque face au personnage.
Le 19 ième siècle en est la parfaite démonstration.
En effet, en 1835 et par le biais du Père Goriot de Balzac, on note la présence de personnages que l’on pourrait qualifier de « reparaissant ».
Pour vulgariser cette idée on peut dire que Balzac, met en scène le retour de sespersonnages qui ne se bornent plus à un seul univers littéraire, mais qui traversent plusieurs œuvres, c’est ce quifera l’objet de la Comédie Humaine .
C’est le principe même du « roman feuilleton », apparu lui aussi au 19ième siècle, le personnage est ancré dans la durée, et évolue dans une suite littéraire, dans plusieurs ouvrages : donc sans le personnage , la fiction ne fonctionne pas.
Par exemple chez Zola le cycle des Rougons Macquard en vingt romans, présentent l’évolution des personnages sur quatre générations.
Ainsi, l’Assomoir dont il est fait allusion dans notre première partie est le septième volume de cette série littéraire à succès.
Gervaise,est comme nous l’avons dit ancrée dans son univers fictionnel mais sa fille Nana, elle, fera l’objet d’une suitelittéraire et s’inscrira alors dans une certaine synchronie littéraire.
Le personnage, est alors bel et bien dans unecertaine dépendance face à l’univers fictif, comme l’affirmait Bourneuf, et Ouellet Nana, en effet, n’est pasmaîtresse de son destin, elle est une victime certaine de l’hérédité et reste influencée par le milieu dans lequelelle à été élevée mais l’univers fictif, à son tour dépend en quelques sorte du personnage lui-même : car sans lespersonnages, il est impossible, d’établir cette série littéraire, et le roman Nana n’aurait jamais vu le jour sans la présence du personnage, ont peut aller plus loin, en affirmant que le personnage est le noyau structural de.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Princesse de Clèves: Le personnage face à l’histoire au XIXe Siècle, en quoi la construction du personnage du roman au fil des siècles nous permet-elle de mieux comprendre le monde ?
- Le personnage de roman
- un personnage mediocre peut il etre un heros de roman
- ÉDOUARD (Mylord). Personnage du roman de Jean-Jacques Rousseau Julie ou la Nouvelle Héloise
- FALK Arvid. Personnage du roman de Strindberg la Chambre rouge