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Le Lac - Alphonse de Lamartine (Commentaire)

Publié le 07/09/2006

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lamartine
AINSI, toujours poussés vers de nouveaux rivages. Dans la nuit éternelle emportés sans retour, Ne pourrons-nous jamais sur l’océan des âges Jeter l’ancre un seul jour? c  O lac! l’année à peine a fini sa carrière, 5 Et près des flots chéris qu’elle degg,vg.c .cv,vait revoir, Regarde! je viens seul m’asseoir sur cette pierre Où tu la vis s’asseoir!  Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes; Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés: 10 Ainsi le vent jetait l’écume de tes ondes Sur ses pieds adorés.  Un soir, t’en souvient-il? nous voguions en silence; On n’entendait au loin, sur l’onde et sous les cieux, Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence 15 Tes flots harmonieux.  Tout à coup des accents inconnus à la terre Du rivage charmé frappèrent les échos; Le flot fut attentif, et la voix qui m’est chère Laissa tomber ces mots: 20  ‘O temps, suspends ton vol! et vous, heures propices, Suspendez votre cours! Laissez-nous savourer les rapides délices Des plus beaux de nos jours!  ‘Assez de malheureux ici-bas vous implorent: 25 Coulez, coulez pour eux; Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent; Oubliez les heureux.  ‘Mais je demande en vain quelques moments encore, Le temps m’échappe et fuit; 30 Je dis à cette nuit: “Sois plus lente”; et l’aurore Va dissiper la nuit.  ‘Aimons donc, aimons donc! de l’heure fugitive, Hâtons-nous, jouissons! L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive; 35 Il coule, et nous passons!’  Temps jaloux, se peut-il que ces moments d’ivresse, Où l’amour à longs flots nous verse le bonheur, S’envolent loin de nous de la même vitesse Que les jours de malheur? 40  Hé quoi! n’en pourrons-nous fixer au moins la trace? Quoi! passés pour jamais? quoi! tout entiers perdus? Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface, Ne nous les rendra plus?  Eternité, néant, passé, sombres abîmes, 45 Que faites-vous des jours que vous engloutissez? Parlez: nous rendrez-vous ces extases sublimes Que vous nous ravissez?  O lac! rochers muets! grottes! forêt obscure! Vous que le temps épargne ou qu’il peut rajeunir, 50 Gardez de cette nuit, gardez, belle nature, Au moins le souvenir!  Qu’il soit dans ton repos, qu’il soit dans tes orages, Beau lac, et dans l’aspect de tes riants coteaux, Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages 55 Qui pendent sur tes eaux!  Qu’il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe, Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés, Dans l’astre au front d’argent qui blanchit ta surface De ses molles clartés! 60  Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire, Que les parfums légers de ton air embaumé, Que tout ce qu’on entend, l’on voit ou l’on respire, Tout dise: ‘Ils ont aimé!’
 
Présentation du Lac de LAMARTINE
— Les Méditations poétiques de Lamartine sont en 1820 le premier recueil du Romantisme et produisent l'effet d'une révolution poétique. — Ce court recueil (vingt-quatre poèmes) est tout imprégné de l'amour malheureux que Lamartine a éprouvé pour une jeune femme, Mme Julie Charles, qui mourut poitrinaire peu après sa rencontre avec le poète. Lamartine la nomme Elvire. — La plupart des Méditations sont donc élégiaques (consacrées au deuil, à la tristesse). La Nature y apparaît souvent comme l'unique consolatrice. — On trouve ces éléments dans celle qui est sans doute la plus célèbre des Méditations poétiques : le Lac.
 
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Vue d'ensemble
Dans cette suite de quatrains, Lamartine se livre à une méditation sur la fuite inexorable du Temps. Cette méditation est suscitée par la contemplation solitaire d'un lieu visité naguère en compagnie de la femme aimée et associé depuis dans l'esprit du poète à un souvenir heureux qu'il se plaît à évoquer : puisque l'homme passe et que seule la Nature demeure, qu'elle conserve ce souvenir de l'amour.
Mouvement du texte
Un survol, même rapide, du texte montre que les strophes VI-IX (v. 21 à 36), qui transcrivent les paroles d'Elvire, ne présentent pas la même structure métrique que les autres. Pourtant cette plainte s'intègre dans la méditation puisque les vers 13 à 20 plantent le décor dans lequel elle a été prononcée. Il ne faut donc pas considérer les différentes parties du texte comme trop séparées mais plutôt comme les différents moments d'une même réflexion. On peut diviser ainsi :
A. Premières réflexions du poète (v. 1 à 12) : 1. Premières questions au Temps (v. 1 à 4). 2. Première invocation au Lac (y. 5 à 12). B. La nuit sur le lac avec Elvire (y. 13 à 36) : 1. Les circonstances (y. 13 à 20). 2. La plainte d'Elvire (y. 21 à 36). a) Prière au Temps (y. 21 à 28). b) Constat d'échec (y. 29 à 32). c) Conclusion épicurienne (v. 33 à 36). C. La méditation du poète (y. 37 à 64) : 1. Reprise des questions au Temps (v. 37 à 48). 2. Invocation à la Nature, gardienne du souvenir (v. 49 à 64). On voit que la troisième partie reprend, en les amplifiant et en les développant, les thèmes de la première partie, en y intégrant les apports de la plainte d'Elvire et en particulier sa prière inutile au Temps (B, 2, ab). Ce poème a donc une forte unité autant par la structure métrique employée que-par l'agencement et l'orchestration des thèmes évoqués.
 


lamartine

« Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages,Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux,Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages 55Qui pendent sur tes eaux! Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surfaceDe ses molles clartés! 60 Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,Que les parfums légers de ton air embaumé,Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,Tout dise: ‘Ils ont aimé!' Présentation du Lac de LAMARTINE — Les Méditations poétiques de Lamartine sont en 1820 le premier recueil du Romantisme et produisent l'effet d'unerévolution poétique.— Ce court recueil (vingt-quatre poèmes) est tout imprégné de l'amour malheureux que Lamartine a éprouvé pourune jeune femme, Mme Julie Charles, qui mourut poitrinaire peu après sa rencontre avec le poète.

Lamartine lanomme Elvire.— La plupart des Méditations sont donc élégiaques (consacrées au deuil, à la tristesse).

La Nature y apparaîtsouvent comme l'unique consolatrice.— On trouve ces éléments dans celle qui est sans doute la plus célèbre des Méditations poétiques : le Lac. Vue d'ensemble Dans cette suite de quatrains, Lamartine se livre à une méditation sur la fuite inexorable du Temps.

Cette méditationest suscitée par la contemplation solitaire d'un lieu visité naguère en compagnie de la femme aimée et associédepuis dans l'esprit du poète à un souvenir heureux qu'il se plaît à évoquer : puisque l'homme passe et que seule laNature demeure, qu'elle conserve ce souvenir de l'amour. Mouvement du texte Un survol, même rapide, du texte montre que les strophes VI-IX (v.

21 à 36), qui transcrivent les paroles d'Elvire, neprésentent pas la même structure métrique que les autres.

Pourtant cette plainte s'intègre dans la méditationpuisque les vers 13 à 20 plantent le décor dans lequel elle a été prononcée.

Il ne faut donc pas considérer lesdifférentes parties du texte comme trop séparées mais plutôt comme les différents moments d'une même réflexion.On peut diviser ainsi : A.

Premières réflexions du poète (v.

1 à 12) :1.

Premières questions au Temps (v.

1 à 4).2.

Première invocation au Lac (v.

5 à 12).B.

La nuit sur le lac avec Elvire (v.

13 à 36) :1.

Les circonstances (v.

13 à 20).2.

La plainte d'Elvire (v.

21 à 36).a) Prière au Temps (v.

21 à 28).b) Constat d'échec (v.

29 à 32).c) Conclusion épicurienne (v.

33 à 36).C.

La méditation du poète (v.

37 à 64) :1.

Reprise des questions au Temps (v.

37 à 48).2.

Invocation à la Nature, gardienne du souvenir (v.

49 à 64).On voit que la troisième partie reprend, en les amplifiant et en les développant, les thèmes de la première partie, eny intégrant les apports de la plainte d'Elvire et en particulier sa prière inutile au Temps (B, 2, ab).Ce poème a donc une forte unité autant par la structure métrique employée que-par l'agencement et l'orchestrationdes thèmes évoqués. Éléments pour une analyse de détail — (v.

1) Ainsi.

Lamartine commence par une constatation.— (v.

1 à 4) La première strophe introduit les métaphores liquides que développera Elvire aux vers 26, 35 et 36.. »

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