Devoir de Philosophie

Le génie, c'est l'enfance retrouvée à volonté (Baudelaire)

Publié le 07/09/2013

Extrait du document

baudelaire

Il s'agit, en fait, de renouveler les moyens d'expression, qu'ils

soient ceux du peintre ou du poète, de façon à purifier et

vivifier le regard que l'on porte sur le monde. C'est pourquoi

Baudelaire, après Edgar Poe, déclare que le beau est forcément

«bizarre«. Cette bizarrerie désigne l'angle de vue insolite

que !'écrivain doit trouver pour montrer la réalité autrement.

Le but recherché n'est pas la surprise gratuite, ni la

provocation, mais la restauration du lien entre l'homme et les

choses dans toute sa vérité, dans la fraîcheur d'une innocence

que les siècles d'usage ont depuis longtemps flétrie. Baudelaire

assimile le génie de la modernité à l'état d'un convalescent

qui soudain redécouvre le monde: «Supposez un artiste

qui serait toujours, spirituellement, à l'état du convalescent, et

vous aurez la clef du caractère de M. G. «

baudelaire

« tin Guys, assimile aussitôt ce regard du convalescent qui retrouve la beauté du monde à l'émerveillement naïf, natif, ingénu, propre à l'enfance.

Alors que la guérison est suivie par l'euphorie d'une renaissance au monde, l'enfance nous fait naître au monde pour la première fois, elle est l'état le plus proche de ce qui devait être le bonheur du premier homme, de plain-pied avec la nature, dans ce passé mythique d'avant la connaissance, d'avant l'histoire, dans ce paradis perdu vers lequel l'imagination de Baudelaire se tourne tou­ jours, comme vers le seul espoir de salut.

Ce passage possède la densité et l'unité d'un poème en prose.

Il illustre la poéti­ que du fragment que Baudelaire expérimentera dans le Spleen de Paris, mais il offre également un exemple de ce que l'on pourrait appeler une disposition en miroir.

On doit, en effet, le lire comme une confession par personne interposée.

Sa résonance dépasse de loin l'objet du propos, car ce texte contient tout simplement, au travers des considérations esthé­ tiques, une clef essentielle de l'univers baudelairien.

C'est pourquoi je ne peux me dispenser de le citer dans son entier: «Or, la convalescence est comme un retour à l'enfance.

Le convalescent jouit au plus haut degré, comme l'en­ fant, de la faculté de s'intéresser vivement aux choses, même les plus triviales en apparence.

Remontons, s'il se peut, par un effort rétrospectif de l'imagination, vers nos plus jeunes et nos plus matinales impressions, et nous reconnaîtrons qu'elles avaient une singulière pa­ renté avec les impressions, si vivement colorées, que nous reçûmes plus tard à la suite d'une maladie physi­ que, pourvu que cette maladie ait laissé pures et intactes nos facultés spirituelles.

L'enfant voit tout en nouveauté; il est toujours ivre.

Rien ne ressemble plus à ce qu'on appelle l'inspiration, que la joie avec laquelle l'enfant absorbe la forme et la couleur.

J'oserai pousser plus loin; j'affirme que l'inspiration a quelque rapport avec la congestion, et que toute pensée sublime est accompa­ gnée d'une secousse nerveuse, plus ou moins forte, qui retentit jusque dans le cervelet.

L'homme de génie a les nerfs solides; l'enfant les a faibles.

Chez l'un, la raison a pris une place considérable; chez l'autre, la sensibilité occupe presque tout l'être.

Mais le génie n'est que l'en­ fance retrouvée à volonté, l'enfance douée maintenant, pour s'exprimer, d'organes virils et de l'esprit analyti-. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles