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Le Feu (1916) BARBUSSE

Publié le 14/03/2020

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En 1916, l'œuvre d'Henri Barbusse, Le Feu, obtint le Prix Concourt après avoir été censurée et avoir fait scandale. Sous-titré « Journal d'une escouade », c'était le premier roman à porter un témoignage parfois très réaliste sur la guerre de 1914-18. Écrit à la première personne, il retrace ce qui fut pour son auteur une expérience individuelle au milieu d'innombrables soldats qui vivaient la même situation. L'œuvre mêle ainsi la vision personnelle au témoignage collectif.

C’est le barrage. Il faut passer dans ce tourbillon de flammes et ces horribles nuées verticales. On passe. On est passé, au hasard ; j’ai vu, çà et là, des formes tournoyer, s’enlever et se coucher, éclairées d’un brusque 5 reflet d’au-delà. J’ai entrevu des faces étranges qui poussaient des espèces de cris, qu’on apercevait sans les entendre dans l’anéantissement du vacarme. Un brasier avec d’immenses et furieuses masses rouges et noires tombait autour de moi, creusant la terre, l’ôtant de des-10 sous mes pieds, et me jetant de côté comme un jouet rebondissant. Je me rappelle avoir enjambé un cadavre qui brûlait, tout noir, avec une nappe de sang vermeil qui grésillait sur lui, et je me souviens aussi que les pans de la capote qui se déplaçait près de moi avaient pris feu 15 et laissaient un sillon de fumée. À notre droite, tout au long du boyau 97, on avait le regard attiré et ébloui par une file d’illuminations affreuses, serrées l’une contre l’autre comme des hommes.

- En avant !

20 Maintenant, on court presque. On en voit qui tombent tout d’une pièce, la face en avant, d’autres qui échouent, humblement, comme s’ils s’asseyaient par terre. On fait de brusques écarts pour éviter les morts allongés, sages et raides, ou bien cabrés, et aussi, pièges plus dangereux, 25 les blessés qui se débattent et qui s’accrochent.
Éd. Flammarion.

Le sous-titre du roman, « Journal d'une escouade », indique qu'il s'agit d'un témoignage pris sur le vif et vécu. Il s'agit aussi d'un roman, ce qui implique une ré-écriture. L'expérience individuelle et collective est de ce fait recomposée avec un décalage de temps. Certains indices le rappellent, comme les temps des verbes et la double situation du narrateur.

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« 20 Maintenant, on court presque.

On en voit qui tombent tout d'une pièce, la face en avant, d'autres qui échouent, humblement, comme s'ils s'asseyaient par terre.

On fait de brusques écarts pour éviter les morts allongés, sages et raides, ou bien cabrés, et aussi, pièges plus dangereux, 25 les blessés qui se débattent et qui s'accrochent.

Éd.

Flammarion.

AXES DE LECTURE MÉTHODIQUE INTRODUCTION Extrait du chapitre 20, le passage donné ici retrace un épisode particulièrement difficile, le franchissement d'un bar­ rage de feu.

Tout le texte est marqué par des images de vio­ lence et de destruction, rapportées par le narrateur à la pre­ mière personne.

Acteur et témoin, il joue donc ici un double rôle : retracer une expérience vécue personnellement et col­ lectivement et transformer, par son récit, le témoignage en littérature.

Ces caractéristiques conduisent à étudier le texte selon l is trois axes suivants : - les images de la guerre, - une expérience à la fois individuelle et collective, :-un récit vécu et recomposé.

1.

LES IMAGES DE LA GUERRE Le thème de l'extrait est donné par le développement d'un champ lexical de la destruction et de la confusion avec un élément dominant, le feu.

Le thème du feu Renvoyant au titre du roman, le « feu » est omniprésent dans l'extrait.

On y trouve en effet les« flammes», la lumière et l'image de l'enfer.

Les «flammes» sont évoquées tout 39. »

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