LANGUE ET REFLEXION LINGUISTIQUE DE 1789 A 1848, OU DE LA LOI AUX REGLES
Publié le 30/03/2012
Extrait du document
1789-1799: LE PROGRES DANS LA LOI
Révolution politique et continuité linguistique. Les bouleversements révolutionnaires n'ont guère secoué la langue et n'ont donné lieu à aucune attaque réelle contre le langage privilégié qui avait d'abord été, du temps de Vaugelas, " la façon de parler de la plus saine partie de la Cour, conformément à la façon d'écrire de la plus saine partie des auteurs du temps "· Le bon usage reste en place. Un bon usage que la bourgeoisie partageait, depuis quelque temps, avec la noblesse et dont elle avait déjà su se faire une arme. On aurait donc tort de supposer une brutale libération de l'expression et un encouragement soudain des tendances laxistes ou familières. Le journal d'Hébert, toujours cité pour sa virulence, ne saurait constituer un contre-exemple : si le Père Duchesne affectionne des mots comme " bougre " et " foutre ", sa syntaxe et une bonne part de son lexique demeurent parfaitement classiques....
«
prononcés devant les Assemblées, les proclama
tions lues aux citoyens, les décrets et les lois rédi
gés par
les instances au pouvoir, se prêtent à
l'évocation des républiques antiques et exigent une
tenue rhétorique.
La même
éloquence à la romaine
est de mise
lors des grandes fêtes révolutionnaires,
se donne libre cours dans les chants patriotiques
et touche donc
bon nombre de Français.
La partici
pation accrue des citoyens
à la vie du pays se fait
bien
plus par une accession ou - à tout le moins -
une
sensibilisation à la langue " noble , que grâce
à une quelconque promotion des formes popu
laires 1
.
Il n'y a d'ailleurs guère à s'étonner de ce phé-
1 ...
Aucune invasion de ce qui serait un langage populaire.
Comme on l'a formulé heu
reusement, l'unification s'est faite par le haut, c'est-à-dire qu'un plus grand nombre de per sonnes ont appris à s'exprimer dans le fran
çais normal " (Marcel COHEN : Histoire d'une langue : le français, réédition de 1967, p.
238).
Dans son Histoire de la langue française, Ferdinand Brunot note bien, dans la presse
ou dans les adresses des communautés loca les (organisations patriotiques.
clubs, etc.) aux assemblées, des recours fréquents à des ex pressions populaires ou provinciales, voire à
de solides jurons, mais il s'agit plutôt d'effets de style recherchés pour leur vigueur ou de
fausses notes involontaires dans un texte au quel on voudrait donner une bonne tenue, que d'un effort conscient et suivi pour ouvrir la langue «officielle ..
à ces nouvelles influences.
Brunot cite par ailleurs (X, 1, pages 3 et 4) des pages fort explicites quant aux intentions pédagogiques et politiques des auteurs de journaux.
Ainsi, cette réponse dans la Feuille villageoise: « On nous a quelquefois demandé pourquoi nous ne donnions jamais nos ins tructions sous cette forme familière et plai sante ...
C'est que sa trivialité, sa popularité même est le signe de l'avilissement dans lequel les anciennes lois avaient placé le peu ple.
Nous qui voulons qu'il se relève, qu'il s'épure, qu'il sente sa dignité, nous lui par lons le langage le plus digne, le plus pur et le plus élevé.
C'est un signe d'inégalité que cette différence choquante entre les pro pos des différentes classes : dès qu'il y a deux idiomes.
il semble qu'il y ait, en effet,
deux espèces d'hommes.
n.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Défense et Illustration de la langue française [Joachim Du Bellay] - Langues et Linguistique.
- langue et langage - Langues et Linguistique.
- Verner, loi de - Langues et Linguistique.
- Trésor de la langue française [Jean Nicot] - Langues et Linguistique.
- niveaux de langue - Langues et Linguistique.