LaMartine - Le Lac Commentaire Littéraire
Publié le 20/10/2013
Extrait du document
«
au maximum des moments les plus beaux de leur relation amoureuse.
Ce sont des délices
« rapides », car ils sont destinés à finir inexorablement.
Dans la strophe successive Julie demande au temps une chose impossible.
Elle voudrait qu’il ait un
double rythme : un très rapide pour les malheureux et un très lent pour les heureux (ou mieux
encore qu’il ne passe pas).
Le temps, nous le savons, passe de la même façon pour les uns et pour
les autres.
Dans la strophe VIII, Julie prend conscience que sa demande précédente est absurde, car le temps
s’échappe, et avec l’utilisation d’un enjambement, (« …l’aurore/Va dissiper la nuit.
»), elle nous
dit que le jour met fait à la nuit d’amour : le temps des plaisirs, représenté par la nuit, est fini.
Strophe IX : elle termine son discours par une invitation qu’elle s’adresse et qu’elle adresse à son
amant , et par extension à toute l’humanité : il faut profiter du moment présent.
« Aimons donc » est
répété pour lui donner une plus grande force et à travers l’inversion et la rupture de la phrase
successive « de l’heure fugitive, Hâtons-nous, jouissons ! » c’est le verbe « jouir » qui est mis en
relief.
La fameuse expression d’Horace, « Carpe diem » trouve dans cette composition de
Lamartine une force expressive toute particulière.
On y ressent la soif de vivre (bien illusoire si on
sait que Julie mourra quelques mois plus tard), des accents nostalgiques de la part de l’auteur, car
maintenant il est seul et ne peut donc plus « jouir » de cet amour.
Les deux vers finals « L'homme n'a
point de port, le temps n'a point de rive ;/Il coule, et nous passons ! » reprennent la réflexion philosophique
de la première strophe.
A noter la présence du chiasme « L’homme … / Le temps …/ il ….
/ nous …).
Rien
dans la vie ne peut se fixer : tout passe, tout est transitoire, éphémère.
Dans la strophe X, Lamartine reprend le thème initial du discours de Julie et avec une question
rhétorique, il se rend compte, avec indignation, avec révolte, que le temps, « jaloux » du bonheur de
l’homme, lui vole « ces moments d’ivresse », c’est-à-dire ses moments de plaisir.
La strophe XI nous montre un poète très indigné, qui avec une série d’exclamations (« quoi ! »
répété par trois fois), se rend compte que le temps ne nous rend plus ce qu’il nous a volé.
Dans la strophe successive, Lamartine s’adresse en les apostrophant à trois entités, « Eternité,
néant, passé », caractérisés par l’apposition « sombres abîmes » et leur demande, avec une question
de nouveau rhétorique, si elles rendront à l’homme les moments qu’elles lui ont volés.
Au début de la quatrième partie, le poète change d’apostrophe.
Maintenant il va parler de nouveau
au lac, et mieux encore, à toute la nature « lac », « rochers », « grottes », « forêt » : la nature est
éternelle, peut rajeunir (par le cycle des saisons) et belle.
Lamartine lui demande de garder le
souvenir de cette nuit d’amour.
La nature est continuellement personnifiée : on lui parle, comme on
parle à une personne et elle a des caractéristiques humaines, comme la mémoire, le souvenir.
Le thème du souvenir que le poète veut conserver imprègne toute la partie finale, avec l’exclamatif
« qu’il soit ! » répété plusieurs fois dans les strophes XIV et XV comme pour que la nature toute
entière soit impliquée directement par l’appel martelant du poète.
Même la lune « l'astre au front
d'argent qui blanchit ta surface/De ses molles clartés » - qui a accompagné la promenade des deux
amants l’année précédente et qui embellit le paysage lacustre au moment où parle le poète – doit
garder le souvenir de cet amour.
L’appel à la nature trouve son point culminant dans la toute dernière strophe, avec l’emploi de
l’anaphore « que » utilisé pour introduire un subjonctif d’exhortation : « Que [….
] /Tout dise : Ils
ont aimé.
» Le passage à l’emploi de la troisième personne du pluriel pour parler de lui et de Julie et
l’emploi du passé composé illustre le thème du temps qui passe, qui a passé inéluctablement : c’est
déjà une histoire qui est filtrée par le souvenir dans un futur plus ou moins lointain.
Et ici
probablement Lamartine est bien conscient de son art : il sait qu’il est en train d’immortaliser cet
amour et l’artifice de l’appel au lac, gardien du souvenir, ne doit pas nous faire oublier que le
véritable moyen que l’auteur possède pour rendre éternel cet amour est avant tout la création
poétique.
Aujourd’hui, nous pouvons certainement l’affirmer (par le succès de cette composition
depuis sa publication) : c’est « Le lac » en tant que poème qui va conserver la souvenir de cet amour
entre le poète et Julie Charles.
L.Diprossimo.
2.
»
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