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Lamartine, en 1857, écrit les vers suivants qui font partie de son poême La Vigne et la Maison, composé« à l'ombre de la maison de son père, en regardant les fenêtres fermées et en pensant aux jours d'autrefois »

Publié le 14/02/2012

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lamartine

Efface ce séjour, ô Dieu ! de ma paupière, Ou rends-le-moi semblable à celui d'autrefois, Quand la maison vibrait comme un grand coeur de pierre De tous ces coeurs joyeux qui battaient sous ses toits. À l'heure où la rosée au soleil s'évapore Tous ces volets fermés s'ouvraient à sa chaleur, Pour y laisser entrer, avec la tiède aurore, Les nocturnes parfums de nos vignes en fleur. On eût dit que ces murs respiraient comme un être Des pampres réjouis la jeune exhalaison; La vie apparaissait rose, à chaque fenêtre, Sous les beaux traits d'enfants nichés dans la maison. Leurs blonds cheveux, épars au vent de la montagne, Les filles se passant leurs deux mains sur les yeux, Jetaient des cris de joie à l'écho des montagnes, Ou sur leurs seins naissants croisaient leurs doigts pieux. La mère, de sa couche à ces doux bruits levée, Sur ces fronts inégaux se penchait tour à tour, Comme la poule heureuse assemble sa couvée, Leur apprenant les mots qui bénissent le jour. Moins de balbutiements sortent du nid sonore, Quand, au rayon d'été qui vient la réveiller, L'hirondelle au plafond qui les abrite encore, À ses petits sans plume apprend à gazouiller. Et les bruits du foyer que l'aube fait renaître, Les pas des serviteurs sur les degrés de bois, Les aboiements du chien qui voit sortir son maître, Le mendiant plaintif qui fait pleurer sa voix, Montaient avec le jour; et, dans les intervalles, Sous des doigts de quinze ans répétant leur leçon, Les claviers résonnaient ainsi que des cigales Qui font tinter l'oreille au temps de la moisson !

En analysant ce texte, sous forme de dissertation suivie, étudiez le sentiment de la nature et de la famille chez Lamartine.

Rien de plus largement humain que cette poésie toute subjective. Les impressions très personnelles de Lamartine en face de la maison familiale veuve des hôtes d autrefois, nous les ressentirions avec une pareille vivacité, mais ce que nous éprouverions confusément il l'exprime, lui, avec une clarté saisissante : « Le vrai poète a des mots qui montrent sa pensée, des pensées qui laissent voir son ame, et une âme où tout se peint distinctement. Il a un esprit plein d'images très claires, tandis que le nôtre n'est rempli que de signalements confus.« (Joubert.) L'analyse de ces vers mettra en lumière cette vérité d'ordre général et nous révélera deux des sources où le poète a puisé avec le plus de bonheur : la nature et la famille...

lamartine

« - des étrangers.

Il y vient chercher, avec le calme champêtre, les suaves émotions de son enfance; quoi de plus humain, que ce retour? Hélas 1 les belles années ont fm, le printemps qu'il espérait retrouver est à jamais évanoui, les hôtes de céans dorment leur dernier somme, et le poète déçu soupire : · Je ne vois en ces .lieux que ceux qui n'y sont pas! ...

Des bonheurs disparus se rappeler la place, .

C'est rouvrir des cercueils pour revoir des trépas/ Le logis est à l'abandon; les salles de la demeure solitaire sont «pleines des silences du temps > ...

La maison, autrefois vivante, n'est plus qu'une défunte, toujours aimée, sans doute, mais incapable de donner à son visiteur ce qu'il est venu lui demander.

Ce « grand cœur de pierre >, vibrant à l'unisson de to11s les cŒurs de chair,.

blottis là, tout près les uns des autres, ce cœur a cessé de battre.

Et ·l'âme religieuse de Lamartine s'élève vers Dieu, sollicitant ou un miracle ou un service : lui rendre le logis des jours heureux, ou ôter de sa vue ce séjour funèbre: Nous en sommés tous là : Jiv.rés à notre impuissance, nous recourons spontanément à plus fort que nous.

Dans l'épreuve, l'homme a besoin de Dieri.

Après cette strophe synthétique, .

embrassant tout le cher passé familial, Lamartine s'arrête à une scène particulière.

Il la choisit logiquement et habilement.

Logiquement, parce qu'il va peindre le réveil de la maison, et donc commencer par le commencement; habilement, parce que le matin est - avec le soir - le moment poétique par excellence, parce que ce mélange où entrent la nature et la famille est tout à fait exqms.

N'exigeons pas du poète de trop ~igoureuses précisions.

Pas plus que .les images ne se forment sur la «paupière>, la «rosée> ne s' «évapore> à l' «aurore>, même « tiède :.

.

Celle-ci, à l'ordinaire, est plutôt fraiche.

Ce « flou », cette im.Précision est partie intégrante de la poésie lamartinienne.

Ne nous privons pas d'une pure jouissance pour le plaisir mes9uin d'avoir raison contre un grand poète.

Savourons plutôt chacun des details où une image heureuse enchâsse une sensation délicate, Heure unique et très douce, celle où le soleil, assez fort pour absorber la rosée, ne l'est.pas assez pour brûler! Moment délicieux que celui où les volets fermés s'ouvrent à la lumière, à la chaleur, à l'haleine attiédie d'un beau matin! Choix heureux que celui des «nocturnes parfums> qu'exhalent les «vignes en fleurs».

Et ce ne sont pas de quelconques vignes, mais celles de la famille :.

«nos vignes»! Jusqu'alors l'élément humain ne nous est ar.paru que sous une forme vague : « ces cœurs joyeux > ; la vie non plus n a point encore frémi autre­ ment que dans ·les verbes « vibrait » et « battaient>.

Tout s'animé avec la troisième strophe.

Les « objets inanimés », les murs, « respirent comme un être>, la jeune exhalaison ~es pampres ré~o~is >.

(Qui donc aurait.l.e courage de reprocher à Lamartme l'abus des eptthètes? Comment suppr1 7 mer celles-ci sans mutiler indignement ce merveilleux alexandrin?} Les pampres se réjouissent sous la caresse du soleil et dans l'enivrement de leurs parfums capiteux.

Quelle richesse de poésie! quel sentiment de la: naturel Mais si beaux que soient c.es vers 9 et 10, ils pâlissent devant cette apparition de la « vie rose ~ - encore une épithète irremplaÇable - qui surgit, « à chaque fenêtre >, .

Sous les beaux traits d'enfants nichés dans la maison!.;.

La nature n'a rien de comparable au frais minois de l'enfant, ni les premiers rayons du soleil, ni les pampres fleuris.

Une concordance existe néanmoins entre ces images gracieuses et celle des enfants que la lumière naissante et les parfums printaniers se!Db,lent saluer à le'!r réveil.

L'en~ant, c'est l'homme dans sa fleur, c'est la vie a son aurore.

VIctor Hugo qut l'a chanté, lui aussi, en dès vers immortels, ne conçoit pas « la cage sans oiseaux.> «la maison sans enfants».

Rien d'étonnant qrie Lamartine regarde 1~ logis paternel com!De un nid, et se représent~ Milly peup~é sans enfants:· Ses sœurs ne formaient-elles pas, comme on 1 a souvent dit, une charmante « nichée de colombes >, nourrie par la plus tendre dès· mères? Et l'image du nid se développe dans.

!a quatrième· strophe.

Une scène de nature se superpose au ~ableau--famihal.

Ce nt; sont pas les .~I.anches tourterelles que le poè~es evoque'- ce sont les huon.delles fam1heres et fidèles; dont les générations se succèdent- dans la maison abandonnée.

Il. »

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