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L'albatros de Charles Baudelaire

Publié le 16/09/2006

Extrait du document

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Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers, Qui suivent, indolents compagnons de voyage, Le navire glissant sur les gouffres amers. A peine les ont-ils déposés sur les planches, Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux, Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches Comme des avirons traîner à côté d'eux. Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule! Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid! L'un agace son bec avec un brûle-gueule, L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait! Le Poète est semblable au prince des nuées Qui hante la tempête et se rit de l'archer; Exilé sur le sol au milieu des huées, Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.
CONDITIONS DE PUBLICATION
Le poème paraît pour la première fois dans la Revue française en 1859. Il est donc absent de la première édition des Fleurs du Mal (1857). Dans l'édition de 1861, comme dans celle de 1868, il constitue la pièce 2 de la première partie. Il figure donc au début de « Spleen et Idéal «, immédiatement après « Bénédiction«.
CONDITIONS D'ÉCRITURE
Le texte a-t-il été écrit par Baudelaire au cours de sa longue traversée de 1841-1842 ou plus tard? Le fait que le poème soit absent de l'édition de 1857 incite à penser qu'il n'a pas été écrit durant le voyage, mais sans que cela puisse constituer une preuve. Cependant, même si « L'Albatros « a été écrit plusieurs années après le voyage, il est probable que l'image centrale a été fournie par un souvenir datant de cette époque.
L'ADJONCTION DE LA TROISIÈME STROPHE
Au directeur de la Revue contemporaine qui souhaitait qu'il modifie légèrement ses textes, Baudelaire écrivit sèchement en 1860: «Je suis désolé de vous faire observer pour la dixième fois qu'on ne retouche pas MES vers. Veuillez les supprimer.«
Mais l'avis des gens compétents l'intéresse. Il lui arrive d'interroger ses amis ou, comme c'est le cas ici, d'écouter leurs suggestions.
« L'Albatros « ne comportait, en effet, à l'origine, que trois strophes. L'ayant lu, Asselineau, un des amis les plus fidèles de Baudelaire, lui fit part de ses remarques :
«La pièce de L'Albatros est un diamant! — Seulement je voudrais une strophe entre la deuxième et la dernière pour insister sur la gaucherie, du moins sur la gêne de l'albatros, pour faire tableau de son embarras. Et il me semble que la dernière strophe rejaillirait plus puissante comme effet.«
 




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« STRUCTURE DU POÈME Quand un candidat commence son explication en disant «Du vers 1 au vers 4, l'auteur...

», puis, «Du vers 5 au vers 8, il montre...», et toujours dans le même style, «Ensuite du vers 9 au vers 11, le poète...», nous avons immédiatement tendance à nous endormir.

Il s'agit, en effet, d'une méthode fâcheuse héritée du collège.

Et s'il nousarrive de sortir de notre torpeur, c'est pour lui dire «Un texte n'est pas un saucisson ! » ou «On ne vous a pasdemandé une nouvelle version de Massacre à la tronçonneuse!» Il n'y a pas de règle absolue, mécaniquement applicable, et il peut arriver qu'un tel découpage en tranchesconvienne, mais la chose est assez rare. Étudier la structure du texte ne consiste pas à en établir le plan dans le sens traditionnel du découpage ensegments.

Il faut trouver la ou les grandes articulations, ce qui n'empêche pas, dans une phase ultérieure, deprocéder à d'autres découpages. On trouvera des exemples de ce que nous entendons par là tout au long de ce livre, mais le cas de « L'Albatros »permet de fournir un premier exemple. Axe et articulation Ce poème est constitué par les deux termes d'une comparaison reliés par une expression servant à faire le lien. Le terme de liaison est « est semblable». Le comparant, c'est-à-dire la partie de la comparaison qui fait image, est l'albatros. Le comparé, c'est-à-dire ce dont on parle et qu'illustre le comparant, est le poète. Dans la phrase «Le poète est semblable au prince des nuées», les éléments sont dans l'ordre (comparé + terme de liaison + comparant).

Mais, le poème est organisé en fonction de l'ordre inverse : c'est d'abord le comparant quiapparaît. Du point de vue du nombre de vers, nous constatons une disproportion entre le comparant (12 vers) et le comparé(4 vers), mais cela s'explique quand on y regarde de plus près.

En effet, dans le dernier tercet, quand il parle dupoète, Baudelaire continue de parler de l'oiseau.

Cela nous conduit à relire le début du poème et à comprendre quelorsqu'il ne parle que de l'oiseau, il parle déjà du poète.

Il établit de fait un parallélisme entre les deux situations. Ces deux situations se caractérisent par une opposition très forte : opposition entre l'oiseau dans les airs et l'oiseauau sol ; opposition entre le poète dans les régions élevées de la création et le poète en proie aux tribulations duquotidien. Dans les airs vastes oiseaux des mers rois de l'azur ce voyageur ailé si beau qui volait prince des nuées qui hante la tempête et se rit de l'archer ailes de géant En opposition à : Au sol maladroits et honteux laissent piteusement traîner à côté d'eux comme il est gauche et veule comique et laid l'infirme exilé l'empêchent de marcher L'étude de cette structure nous a montré que ce poème était de bout en bout une comparaison filée.

Dans le. »

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