LACRETELLE Jacques de : sa vie et son oeuvre

LACRETELLE Jacques de (1888-1985). Né dans le Méconnais, Jacques de Lacretelle a pris très tôt le goût des voyages, son père étant diplomate. Son éducation aussi élargit son horizon : après avoir fréquenté le lycée Janson-de-Sailly, il poursuivit ses études à l’université de Cambridge. C’est après la Première Guerre mondiale qu’il commença de se faire connaître en littérature, avec un roman, la Vie inquiète de Jean Hermelin (1920), qui reprenait un thème alors à la mode : celui de l’adolescence. A travers l’histoire d’un personnage timide et fier, il trouvait l’occasion de dépasser sa propre jeunesse. Comme ses amis Proust et Rivière, il cherchait aussi à explorer les moyens du récit et à tenir compte des idées nouvelles en psychologie : le roman, écrit à la première personne, se présente comme le carnet tenu par un héros soucieux de comprendre son itinéraire, interrompu à sa mort à la guerre en 1914. La forme choisie imposait presque cette fin au roman, sous peine d’en faire un journal perpétuel de l’auteur.

Mais c’est Silbermann (prix Femina en 1922) qui devait permettre à Lacretelle d’être vraiment connu et reconnu. Comme on colle habituellement sur lui l’étiquette de romancier d'analyse, on présente d’ordinaire Silbermann comme un roman où Lacretelle se penche sur l’« âme juive ». La question était d’ailleurs à la mode depuis l’affaire Dreyfus. En fait, de ce point de vue, même si c’est avec talent, Lacretelle ne fait que reprendre les idées en usage sur les juifs, et il ne se montre guère plus original dans sa peinture de l’antisémitisme. En revanche, la structure même de l’œuvre est beaucoup plus intéressante. Silbermann, personnage principal du roman, n’est pas le personnage central : il est vu de l’extérieur, par un narrateur qui va se rapprocher de lui en s’éloignant de ses anciens amis antisémites. Le récit