« La politique de la littérature n'est pas la politique des écrivains. Elle ne concerne pas leurs engagements personnels dans les luttes politiques et sociales de leur temps. Elle ne concerne pas non plus la manière dont ils représentent dans leurs livres les structures sociales, les mouvements politiques ou les identités diverses. L'expression « politique de la littérature » implique que la littérature fait de la politique en tant que littérature. Elle suppose qu'il n'y a pas à se dem
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
I. La politique dans la littérature I.1. Le discours proprement politique a. Une démarcation perméable b. Le magistère de l'écrivain c. L'oeuvre comme force de proposition « politique « I. 2. L'oeuvre littéraire politiquement « non récupérable « (Sartre) a. La nécessaire décontextualisation b. La double obligation paratopique (le lieu de l'écrivain et celui de l'oeuvre) c. Polyphonie et plurivocité I. 3. Des enjeux spécifiques II. La politique de la littérature II. 1. Les modes d'implication du destinataire lecteur / spectateur II. 2. Vertus herméneutiques et heuristiques de l'éloignement II. 3. Le remodelage des horizons d'attente III. La politicité de la littérature III. 1. La formation des consciences :liberté, lucidité, dignité III. 2. La restauration d'une parole juste III. 3. Un nouveau partage du sensible
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Chercher le « lien essentiel entre la politique comme forme spécifique de la pratique collective et la littératurecomme pratique définie de l'art d'écrire » revient donc à se demander [énoncé de l'axe qui structure la réflexion] cequi, au coeur de la poétique d'une oeuvre littéraire ressortit intimement au politique.
En d'autres termes, si l'onrefuse de séparer l'otium (vie consacrée à l'étude et aux belles lettres) du negotium (les affaires, les échangeshumains), si l'on récuse l'idée d'une autonomie radicale du champ littéraire pensé comme l'envers absolu de l'utile etde l'engagement civique, il convient de définir selon quel régime la littérature, dans l'ordre de l'imaginaire et del'esthétique qui la spécifie comme pratique, s'identifie à la politique.
Précisons : à la politique entendue non pasétroitement comme pratique de pouvoir, mais, ainsi que la définit Rancière, comme possibilité accordée à desindividus et refusée à d'autres de débattre de sujets intéressants la communauté, selon un partage qu'il dénomme «partage du sensible » et qui est justement ce que vise à reconfigurer toute activité politique.
Qu'est-ce qui fait, ensomme, qu'il existe une politique de la littérature irréductible à ce que l'on entend d'ordinaire par une littératurepolitique ?[plan] Pour répondre à cette question on expliquera pourquoi, si l'on ne peut écarter totalement la présence d'uncontenu politique dans la perception d'une littérature politique, un tel critère ne suffit pas à définir ce qui rattacheessentiellement la littérature à la politique.
Par suite on s'attachera à comprendre comment la littérature dit et écritle politique, autrement dit selon quelle politique elle traite du politique.
Restera alors à tenter de cerner ce qui faitsa politicité propre, essentielle, par-delà toute formes d'engagements ou de contenus explicitement politiques.
Plan : version squelette
I.
La politique dans la littératureI.1.
Le discours proprement politiquea.
Une démarcation perméableb.
Le magistère de l'écrivainc.
L'oeuvre comme force de proposition « politique »
I.
2.
L'oeuvre littéraire politiquement « non récupérable » (Sartre)a.
La nécessaire décontextualisationb.
La double obligation paratopique (le lieu de l'écrivain et celui del'oeuvre)c.
Polyphonie et plurivocitéI.
3.
Des enjeux spécifiques
II.
La politique de la littératureII.
1.
Les modes d'implication du destinataire lecteur / spectateurII.
2.
Vertus herméneutiques et heuristiques de l'éloignementII.
3.
Le remodelage des horizons d'attente
III.
La politicité de la littérature
III.
1.
La formation des consciences :liberté, lucidité, dignitéIII.
2.
La restauration d'une parole justeIII.
3.
Un nouveau partage du sensiblePlan : version écorché
I.
La politique dans la littératureAxe : Ce qu'on appelle d'ordinaire une oeuvre politique, engagée ; les limites d'une telle vison de la littératureexplicitement et intentionnellement politique ; ce pourquoi la littérature traite du politique selon des modalités qui luiappartiennent en propre.I.1.
Le discours proprement politiquea.
Une démarcation perméableLa politique de la littérature ne relève pas, affirme Rancière, de tel ou tel contenu ou point de vue politique spécifiésdans l'oeuvre ou proclamés par l'auteur.
Certes, mais il serait absurde de ne les pas prendre en compte.
La «séparation bien claire », pour reprendre le mot de Montaigne, entre le moi écrivain et le moi social, demande malgrétout à être questionnée.
En effet, « Montaigne et le maire ont toujours été deux ...
», mais Montaigne a été maire,et il pose lui-même que ce n'est pas indifférent à son propos.
L'écrivain n'est pas traversé par la politique commepar le souffle d'une Muse.
Elle engage, volens nolens sa vie d'auteur et sa pratique scripturale, outre que sonoeuvre, en retour, produit des effets dont il est comme écrivain et comme citoyen (c'est-à-dire comme n'importequi) pleinement responsable (pénalement, moralement, idéologiquement).
Rousseau le vérifiera avec la république deGenève comme avec celle des Lettres (dont il se trouvera exclu), Flaubert s'est vu intenter un retentissant procès,Sartre a été vilipendé ou encensé pour son supposé anticommunisme…b.
Le magistère de l'écrivainCette implication politique de l'auteur dans son oeuvre et sur la scène publique est une réalité si indubitable quedepuis l'époque des Lumières, et sans doute plus encore à l'âge romantique, est apparu le fantasme d'un magistèrede l'écrivain donneur de leçons politiques .
Ex : Voltaire, Rousseau, Hugo, Chateaubriand,… Et même déjàprésence de ce rêve à la Renaissance.
Du Bellay enviant Ronsard à cet égard : voir le sonnet 8 où il déplore den'être pas comme lui a porté d'être entendu » du prince, soutenu de sa « sainte faveur ».
L'oeuvre littéraire établitun espace propre, certes, mais qui n'est pas sans lien avec l'espace public car il tient du forum ou de l'Agora, parfoisde la scène judiciaire (Le dernier jour d'un condamné, L'affaire Calas …) Rousseau, dans le Second Discours.
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