La place du drame romantique dans le théâtre français
Publié le 27/03/2015
Extrait du document
«
Le rejet de la bienséance, au nom de la vie réelle.
Selon la théorie clas
sique,
une pièce de théâtre doit respecter la sensibilité du spectateur: on
ne peut montrer de choses dégradantes, ou contredire les convictions du
public (par exemple la haute idée qu'il se fait de la royauté).
Pour les
romantiques, tout ce qui fait partie de la vie réelle doit pouvoir être repré
senté sur scène, y compris la mort et la violence, toutes deux bannies des
scènes classiques.
Ainsi, les scènes romantiques n'hésiteront pas à repré
senter suicides (Chatterton, Hernani, Dona Sol, Ruy Blas), meurtres en
direct (Lorenzaccio exécutant Alexandre de Médicis, Triboulet tuant sa
fille),
morts soudaines (Kitty Bell mourant de saisissement devant le
cadavre de Chatterton).
EJ Le dépassement du vérisme* bourgeois
Les romantiques ne sont pas les premiers à contester l'hégémonie du
théâtre classique.
Dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, dramaturges et
théoriciens du théâtre tels que Beaumarchais, Mercier, ou Diderot, mili
taient en faveur d'une forme intermédiaire entre la tragédie et la comédie:
le drame bourgeois.
Tout en récusant l'esthétique de ces prédécesseurs, les
dramaturges du XIXe siècle reprennent leur démarche de modernisation
du théâtre.
Le genre intermédiaire, ancêtre du mélange des genres.
Pour Diderot
comme pour Beaumarchais, le théâtre doit peindre les «malheurs domes
tiques» propres à toucher le public de son temps, en adoptant un ton
sérieux, comme la tragédie, mais en montrant des personnages quoti
diens,jusque-là réservés à la comédie.
Le drame romantique témoigne du
même rejet d'un théâtre homogène, tout entier tragique ou comique,
mais il refuse l'étroitesse des drames bourgeois, aux personnages et aux
situations médiocres: il préfère, quant à lui, le mélange des genres, qui
accuse les contrastes entre le tragique et le comique, le laid et le beau, afin
de mettre en valeur des actions héroïques.
Oui à la «couleur locale'» non au vérisme naïf.
Les tenants du drame
bourgeois conçoivent le théâtre comme un moment de la vie humaine,
l'imitation parfaite d'un fragment d'existence réelle; ils portent de ce fait
une attention extrême à la fidélité des costumes, décors et gestes des
acteurs.
Dans l'ensemble, les romantiques hériteront de ce goût pour l'as
pect matériel de la représentation, pour la reconstitution de la «couleur
locale», sans pour autant chercher la confusion du réel et de l'art: un Victor
Hugo par exemple insiste sur le sens symbolique de la scénographie*:
objets, décors et gestes doivent rendre sensible l'action représentée
(voir Texte 2, p.
147).
120.
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