La mort de l'héroïne (Acte V, sc. 7, vers 1622-1644) - Phèdre de Racine
Publié le 30/07/2014
Extrait du document
La mort de l'héroïne
(Acte V, se. 7, vers 1622-1644)
(SITUATION)
Dernière scène de la pièce, dernières paroles de Phèdre.
On a vu Phèdre entraînée par la fureur de la jalousie
(TEXTE 7) et souhaitant la mort des amants heureux, Hippolyte et
Aricie. Mais l'horreur même du crime ainsi envisagé a réveillé le
sens moral qui subsiste en elle. En cela réside, on le sait, l'efficacité
tragique de ce personnage, pas tout à fait coupable, méchant et
malheureux en même temps. Ainsi ramenée à la conscience du
bien, Phèdre a répudié sa confidente et mauvaise conseillère
OEnone. On est alors à la fin de l'acte IV.
On a appris au début de l'acte V la mort d'OEnone, puis
Théramène nous a pompeusement conté la fin dramatique
d'Hippolyte. De Phèdre on n'a rien appris d'autre que son
extrême agitation. Elle se présente alors face à Thésée, et malgré
ses soupçons, Thésée ne l'accuse pas. Son fils est mort, il préfère
ne rien savoir de la vérité, il n'interrogera pas Phèdre :
Je consens que mes yeux soient toujours abusés.
Je le crois criminel, puisque vous l'accusez.
(v. 1599-1600)
Voilà donc l'amnistie offerte à la coupable, Phèdre peut échapper
au châtiment. Va-t-elle saisir cette offre de se sauver ? Écoutons-la.
(TEXTE)
PHÈDRE
Les moments me sont chers, écoutez-moi, Thésée.
C'est moi qui sur ce fils chaste et respectueux
Osai jeter un oeil profane, incestueux.
1625 Le Ciel mit dans mon sein une flamme funeste ;
La détestable OEnone a conduit tout le reste.
Elle a craint qu'Hippolyte, instruit de ma fureur,
Ne découvrît un feu qui lui faisait horreur.
La perfide, abusant de ma faiblesse extrême,
1630 S'est hâtée à vos yeux de l'accuser lui-même.
Elle s'en est punie, et, fuyant mon courroux,
A cherché dans les flots un supplice trop doux.
Le fer aurait déjà tranché ma destinée ;
Mais je laissais gémir la vertu soupçonnée.
1635 J'ai voulu, devant vous exposant mes remords,
Par un chemin plus lent descendre chez les morts.
J'ai pris, j'ai fait couler dans mes brûlantes veines
Un poison que Médée apporta dans Athènes.
Déjà jusqu'à mon coeur le venin parvenu
1640 Dans ce coeur expirant jette un froid inconnu;
Déjàje ne vois plus qu'à travers un nuage
Et le ciel et !'époux que ma présence outrage ;
Et la mort à mes yeux dérobant la clarté,
Rend au jour, qu'ils souillaient, toute sa pureté.
(THÈMES DE COMMENTAIRE)
L'enjeu du texte
Scène de dénouement, la dernière de la pièce, ce moment revêt
une importance majeure dans la structure tragique parce qu'il
porte l'émotion à son point culminant; l'auteur use pour cela du
moyen le plus fort, la représentation de la mort. Certes, le spectateur
a été ému, déjà, par la mort d'Hippolyte, mais cette mort n'a
été que racontée. Par un effet de crescendo, l'auteur produit le
pathétique absolu en nous montrant la mort sur scène.
Point de sang cependant, ni de violence : le cheminement de la
mort, sous la forme du poison, est tout intérieur et sa présence s'affiche
comme il convient dans le genre noble de la tragédie, par le
seul recours au langage, dont ce dénouement marque le pouvoir
pathétique à son point culminant.
«
1625 Le Ciel mit dans mon sein une flamme funeste ;
La détestable Œnone a conduit tout le reste.
Elle a
craint qu'Hippolyte, instruit de ma fureur,
Ne découvrît un feu qui lui faisait horreur.
La perfide, abusant de ma faiblesse extrême,
1630 S'est hâtée à vos yeux de l'accuser lui-même.
Elle s'en est punie, et, fuyant mon courroux,
A cherché dans les flots un supplice trop doux.
Le fer aurait déjà tranché ma destinée ;
Mais
je laissais gémir la vertu soupçonnée.
1635 J'ai voulu, devant vous exposant mes remords,
Par un chemin plus lent descendre chez les morts.
J'ai pris, j'ai fait couler dans mes brûlantes veines
Un poison que Médée apporta dans Athènes.
Déjà jusqu'à mon cœur le venin parvenu
1640 Dans ce cœur expirant jette un froid inconnu;
Déjàje ne vois plus qu'à travers un nuage
Et le ciel et !'époux que ma présence outrage ;
Et la mort à mes yeux dérobant la clarté,
Rend au jour, qu'ils souillaient, toute sa pureté.
(THÈMES DE COMMENTAIRE)
L'enjeu du texte
Scène de dénouement, la dernière de la pièce, ce moment revêt
une importance majeure dans la structure tragique parce qu'il
porte l'émotion à son point culminant; l'auteur use pour cela du
moyen le plus fort, la représentation de la mort.
Certes, le specta
teur a été ému, déjà, par la mort d'Hippolyte, mais cette mort n'a
été que racontée.
Par un effet de crescendo, l'auteur produit le
pathétique absolu en nous montrant la mort sur scène.
Point de sang cependant, ni de violence : le cheminement de la
mort, sous la forme du poison, est tout intérieur et sa présence s'af
fiche
comme il convient dans le genre noble de la tragédie, par le
seul
recours au langage, dont ce dénouement marque le pouvoir
pathétique à son point culminant.
Le commentaire suivra dans ses trois moments l'ordre du discours..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Phèdre, Scène 7, Acte V (Vers 1622 À 1644) - RACINE
- Racine, Phèdre, Acte I, scène 3
- Racine, dans sa Préface de Phèdre, écrit que le caractère de son héroïne est peut-être ce qu'il a "mis de plus raisonnable sur le théâtre". Commentez d'après ce que vous savez de Phèdre, de Racine et de l'idéal classique. ?
- Conclusion du Commentaire Littéraire de la Scène 7 de l’Acte V de Phèdre de Racine.
- PRADON, Jacques (1644-1698) Poète, il fait représenter, en même temps que Racine, une tragédie sur Phèdre.