Devoir de Philosophie

La mémoire dans les Confessions de Rousseau

Publié le 18/10/2013

Extrait du document

rousseau

Rousseau attire l'attention du lecteur sur l'originalité des Confessionsquand il écrit : «Comme en général les objets font moins  d'impression sur moi que leurs souvenirs, et que toutes mes idées sont en images, les premiers traits qui se sont gravés dans ma tête y sont demeurés, et ceux qui s'y sont empreints dans la suite se sont plutôt combinés avec eux qu'ils ne les ont effacés« (p.211).

rousseau

« propre existence se pressent en dehors de toute chronologie, une succession «d'affections secrètes» intervenant selon une nécessité toute poétique.

La volonté de prouver son innocence naturelle conduit Rousseau à rappeler le souvenir de sa tante Suzon.

C'est d'abord une vision qui se présente: «Je vois encore son air, son regard, son attitude » (p.48).

L'image évoque ensuite les romances chantées ou fredonnées qui remontent vers )'écrivain.

Mais la fugacité des moments de bon­ heur passés auprès de sa tante conduit Rousseau à essayer de reconstituer les airs perdus.

Le déclic qui s'opère(« Il y en a un surtout qui m'est revenu tout entier quant à l'air; mais la seconde moitié des paroles s'est constamment refusée à tous mes efforts » (p.49) est parfaitement inattendu au plan logique.

Le monde révolu et paradisiaque qui se recrée n'est perceptible que pour celui qui l'a connu.

La mémoire affective La réminiscence de la romance de Tircis amène Rousseau à s'interroger sur les raisons de l'émotion soulevée en lui quand il se rappelle l'air ou les paroles: «Je cherche où est le charme attendrissant que mon cœur trouve à cette chanson: c'est un caprice auquel je ne comprends rien » (p.49).

Un autre aveu montre que la chan­ son de Tircis attendrit Rousseau uniquement par réf~rence à la jeune femme qui avait su materner Jean-Jacques : « Le plaisir que je prends à me rappeler cet air s'évanouirait en partie si j'avais la preuve que d'autres que ma tante Suzon l'ont chanté» (p.49).

La mémoire affective offre donc à Rousseau l'occasion de retrou­ ver le paradis de l'enfance, où le rêve et la réalité communiquaient encore .

..

Ill -LE TEMPS RETROUVÉ La nostalgie du bonheur La capacité répétitive de la mémoire affective dans le Livre 1 s'exerce sur la période heureuse précédant l'injuste punition des enfants.

La réminiscence fait soudain irruption, sous l'effet d'une mémoire involontaire : « Près de trente ans se sont passés depuis ma sortie de Bossey sans que je ne m'en sois rappelé le séjour d'une manière agréable par des souvenirs un peu liés; mais depuis qu'ayant passé à l'âge mûr je décline vers la vieillesse, je sens que ces mêmes souvenirs renaissent» (p.58).

Le narrateur cesse de pactiser avec le temps pour faire jaillir, après une longue amnésie, les souvenirs heureux de Bossey.

La poétique du détail retrouvé Temps de la permanence, le présent de l'indicatif immobilise soudain le passé et le soustrait à l'éphémère : « Je vois la servante ou le valet agissant dans la chambre, une hirondelle entrant par la fenêtre, une mouche se poser sur ma main tandis que je récitais ma leçon» (p.58).

L'écrivain a inventé une poésie des détails infimes qui se cristallisent dans la mémoire : l'enfant voit « se poser sur [sa] main» une mouche, allégorie vivante de l'éphémère, mais ce souvenir ponctuel retrouvé permet à Rousseau de vivre le passé avec une intensité émotionnelle qu'il n'eut sans doute jamais et que n'aurait aucun présent.

Conclusion : Rousseau a découvert que, par la grâce de la mémoire affec­ tive, certaines sensations possèdent un pouvoir privilégié et entraînent derrière elles la chaîne des souvenirs.

Par leurs jeux de métaphores 1 de reflets, de signes et de récurrences, Les Confessions annoncent A la Recherche du temps perdu de Marcel Proust.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles