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LA LITTÉRATURE ROMAINE (Exposé – Art & Littérature – Collège/Lycée)

Publié le 16/05/2016

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Recherche documentaire, Pistes de travail & Axes de recherches pour exposé scolaire (TPE – EPI)

Le grand débat qui va opposer occidentalistes et autochtonistes constitue une sorte de remake de la grande querelle des Anciens et des Modernes. Tout au long des années 1920 et 1930, ce clivage va polariser la scène littéraire. En un sens, ce sont les mêmes débats qu'au XIXe siècle qui font rage : s'abandonner à l'influence étrangère ou s'en retirer ? Comment faire pour s'approprier et assimiler certaines valeurs de la culture universelle tout en demeurant soi-même ? Cette controverse, qui eut de fortes répercussions politiques, envenime jusqu'aux rapports personnels des écrivains entre eux. Leurs chefs-d'œuvre illustrent pleinement et contradictoirement, tantôt l'une, tantôt l'autre de ces thèses.

 

Dès les années 1920, le modernisme trouve en Eugen Lovinescu (1881-1943), auteur d'une monumentale Histoire de la littérature roumaine contemporaine (1926-1929), son chef de file incontesté. Ce grand critique littéraire favorable à l'influence française et à une évolution « synchronique » avec l'Europe, violemment attaqué pour son cosmopolitisme, défend la liberté artistique et s'attache à dissocier clairement les critères esthétiques, d'une part, des critères moraux

 

et nationaux, de l'autre.

 

Autour de Lovinescu et de Sburatorul (L'Homme volant), la revue qu'il fonde en 1919, gravitent de nombreux écrivains pour qui la quête d’un fond roumain éternel n'a guère de sens.

 

Ainsi du romancier Paul Zarifopol (1874-1934), chez qui l'on sent l'influence de Proust et de Joyce,

 

du poète Perpessismus (1891-1971) ou de Pompiliu Constantinescu (19011946), auteur d'un essai au titre programmatique, L'Humanisme érudit et esthétique (1934).

 

Face aux modernistes, la mouvance autochtoniste évolue, au tournant des années 1930, vers un nationalisme antidémocratique exacerbé. Pour les uns, l'esprit de la civilisation roumaine ne peut être que byzantin ; d'autres, oubliant que leurs pairs avaient autrefois combattu l'influence russe au nom de la latinité, conseillent de ne pas négliger le « fonds slave » ; d'autres encore croient découvrir l'essence du « roumanisme »

 

dans la Thrace préhistorique.

 

Ces thèses s'incarnent notamment dans les œuvres du dramaturge et poète lyrique Octavian Goga (1881-1938), qui, en 1937, s'illustrera en politique en dirigeant le premier gouvernement ouvertement antisémite de l'entre-deux-guerres. Même type d'évolution chez le romancier Virgi! Cheorghiu (1905-1977), bien connu en France pour son best-seller, La Vingt-

 

Cinquième Heure (1959), mais qui est aussi l'auteur de textes beaucoup moins avouables. Ainsi en est-il du volume Les rives du Dniestr brûlent (1942), qui réunit ses reportages sur le front de l'Est et dans lequel il se félicite de voir les juifs déportés dans les camps

LE MICHELET ROUMAIN

 

Nicolae lorga (1871-1940), parfois qualifié de Michelet roumain, est très célèbre pour son abondante œuvre d'historien. Également poète, critique et dramaturge, il incarne au début du siècle l'aile droite et passéiste du populisme roumain. En 1901, il fonde dans cet esprit, avec les poètes George Cosbuc (1866-1918) et Alexandru Vlahuta (1858-1919), la revue Samanatorul (Le Semeur), qui donnera naissance à l'école dite « samanatoriste ». Selon sa conception, la littérature se doit d'exprimer « l'âme du peuple » et travailler à l'exaltation des valeurs paysannes traditionnelles. Ennemi acharné de la littérature dite « décadente », symboliste ou moderniste, lorga deviendra, entre les deux guerres, l'un des maîtres à penser du nationalisme ethnique. Tragique ironie de l'Histoire : il mourra assassiné par les fascistes roumains de la Garde de fer en 1940.

« LE MICHELET ROUMAIN Nicolae Iorga (1871-1940), parfois qualifié de Michelet roumain, est très célèbre pour son abondante œuvre d'historien .

Également poète, critique et dramaturge, il incarne au début du siècle l'aile droite et passéiste du populisme roumain.

En 1901 , il fonde dans cet esprit, avec les poètes George Cosbuc (1866-1918) et Alexandru Vlahuta (1858-1919}, la revue Somonotorul (Le Semeur), qui donnera naissance à l'école dite « samanatoriste ».Selon sa conception, la littérature se doit d'exprimer« l'âme du peuple » et travailler à l'exaltation des valeurs paysannes traditionnelles .

Ennemi acharné de la littérature dite « décadente », symboliste ou moderniste, Iorga deviendra , entre les deux guerres, l'un des maîtres à penser du nationalisme ethnique.

Tragique ironie de l'Histoire : il mourra assassiné par les fascistes roumains de la Garde de fer en 1940.

« 0CCIDENTALISTES ll CONTRE « AUTOCHTONISTES ll Le grand débat qui va opposer occidenta listes et autochtonistes constitue une sorte de remake de la grande querelle des Anciens et des Modernes .

Tout au long des années 1920 et 1930, ce clivage va polariser la scène littéraire .

En un sens , ce sont les mêmes débats qu'au XIx' siècle qui font rage : s'abandonner à l'influence étrangère ou s 'en retirer ? Comment faire pour s'approprier et assimiler certaines valeurs de la culture universelle tout en demeurant soi­ même? Cette controverse, qui eut de fortes répercussions politiques , envenime jusqu'aux rapports personnels des écrivains entre eux.

Leurs chefs-d'œuvre illustrent pleinement et contradictoirement tantôt l'une , tantôt l'autre de ces thèses .

• Dès les années 1920 , le modernisme trouve en Eugen Lovinescu (1881-1943) , auteur d 'une monumentale Histoire de la littérature roumaine contemporaine 1-------------1 (1926-1929}, son chef de file incontesté.

Ce grand critique littéraire favorable à L'ENTRE·DEUX·GUERRES L'tPOQUE DU GRAND ROMAN Du point de vue romanesque, la période de l'entre-deux-guerres voit éclore plusieurs grands talents.

À Bucarest qu'on appelle alors le « petit Paris des Balkans », des auteurs comme Proust, Gide ou Cocteau font école.

D'une manière générale , tous les grands courants de la littérature européenne s'y retrouvent : surréalisme et dadaïsme , poésie pure, roman social ou psychologique, théâtre symboliste, naturaliste, expressionniste.

• Liviu Rebreanu (1885-1944} ouvre ainsi la voie du grand roman avec quelques œuvres majeures, dont lon (1920), La Forêt des pendus (1922) ou La Bête immonde (1938} .

Tudor Arghezi {1880.1967}, à la fois baudelairien et poète du terroir , invente , lui, une langue poétique nouvelle , tandis que Camil Petrescu (1874-1957} se lance dans des romans stendhaliens qui reflètent admirablement la société roumaine de l'époque, comme Le Lit de Procuste (1933}.

l'influence française et à une évolution «synchronique » avec l'Europe , violemment attaqué pour son cosmopolitisme, défend la liberté artistique et s'attache à dissocier clairement les critères esthétiques, d'une part , des critères moraux et nationaux , de l'autre.

• Autour de Lovinescu et de Sburotorul (L'Homme volant) , la revue qu'il fonde en 1919 , gravitent de nombreux écrivains pour qui la quête d 'un fond roumain éternel n'a guère de sens .

Ainsi du romancier Paul Zarifopol (1874-1934) , chez qui l'on sent l'influence de Proust et de Joyce , du poète Perpessismus (1891 -1971} ou de Pompiliu Constantinescu (1901 - 1946}, auteur d'un essai au titre programmatique, L'Humanisme érudit et esthétique (1934}.

• Face aux modernistes, la mouvance autochtoniste évolue , au tournant des années 1930, vers un nationalisme antidémocratique exacerbé .

Pour les uns, l'esprit de la civilisation roumaine ne peut être que byzantin ; d 'autres, oubliant que leurs pairs avaient 1---------------1 autrefois combattu l'influence russe L'ÉCRIVAIN VAGABOND Jllrluif lstrtlti (1884-1935) occupe, dans ce paysage , une place à part .

Fils d'une paysanne et blanchisseuse roumaine et d'un épicier grec, contrebandier à ses heures , qui mourra alors que Pana ·ll n'est âgé que de quelques mois, il mène une vie vagabonde autour de la Méditerranée.

Son œuvre, directement écrite en français , relate avant tout des histoires de haïdoucs, ces bandits de grand chemin qui, au XIx' siècle, luttaient pour défendre les pauvres et les opprimés : Kyro Kyrolino (1924}, Domnitza de Snogov (1926), Les Chardons du Boragon (1928).

On lui doit aussi l 'un des premiers récits de retour d'URSS , Vers une outre flamme (1927), un témoignage extraordinairement lucide qui lui vaudra bien des déboires , des ruptures et de nombreuses calomnies.

au nom de la latinité, conseillent de ne pas négliger le « fonds slave » ; d ' autres encore croient découvrir l'essence du« roumanisme » dans la Thrace préhistorique .

Ces thèses s'incarnent notamment dans les œuvres du dramaturge et poète lyrique Octavian Goga (1881 -1938} , qui, en 1937, s'illustrera en politique en dirigeant le premier gouvernement ouvertement antisémite de l'entre­ deux-guerres .

Même type d 'évolution chez le romancier Virgil Gheorghiu (1905-1977} , bien connu en France pour son best-seller , La Vingt­ Cinquième Heure (1959}, mais qui est aussi l'auteur de textes beaucoup moins avouables.

Ainsi en est-il du volume Les rives du Dniestr brûlent (1942}, qui réunit ses reportages sur le front de l'Est et dans lequel il se félicite de voir les juifs déportés dans les camps de Transnistrie par les troupes roumaines et allemandes.

• En philosophie, ce courant fascisant et antisémite pour lequel l'art et la littérature devaient se mettre au service d'une politique visant à la « réalisation de l'être ethnique » s'est enorgueilli de plusieurs mentors , comme le très charismatique Nae lonescu (1890- 1940) , maitre à penser incontesté de la « Jeune Génération ».

LA NAISSANCE DE LA « JEUNE GÉNÉRATION ll : CIORAN, ELIADE, IONESCO La naissance de la «Jeune Génération » contestataire qui s'affirme en 1927 est l'un des phénomènes culturels les plus remarquables de l'entre-deux-guerres .

Elle présente de frappantes similitudes avec l'apparition de groupes comme Esprit ou Ordre nouveau en France .

• À Bucarest , ce groupe rassemble les écrivains les plus brillants, dont certains jouiront , après 1945 , d 'une renommée internationale : il y a ainsi l'historien des religions Mircea Eliade (1907- 1986) , le leader du groupe , dont le roman Les Hooligans parait en 1935.

Il y a encore Emil Cioran (1911-1995) et Eugène Ione sco (1909-1994), qui, en 1934, publient respectivement Sur les cimes du désespoir et Non.

On y trouve également des philosophes de l'« être national », dont deux des plus importantes figures de la philosophie roumaine au xx' siècle : Mircea Vulcanescu (1904 -1952 ) , pour La Dimension roumaine de l'existence (1938}, et Constantin Noïca (1907- 1987) , auteur d'un ouvrage intitulé Le Sentiment roumain de l'être (1987) .

Mihail Sebastian, romancier et dramaturge d'origine juive , à qui l'on doit un extraordinaire Journal (1935-1944) racontant le basculement de ses amis dans le fascisme , fait lui aussi partie de la «Jeune Génération », ou « Génération 1927 ».

• Ces jeunes écrivains anticonformistes vantent la «primauté du spirituel », disent leur révolte contre l 'ordre établi et communient dans le culte de l'irrationnel, du concret , de l'expérience -raiso n pour laquelle on les appellera aussi les « expérienciers », sortes d 'existentialistes avant la lettre .

La politisation du groupe survient à partir de 1933-1934, quand la majorité de ses représentants apporteront leur soutien à la Garde de fer.

Cette évolution vaut notamment pour l'historien des religions Mircea Eliade et pour le moraliste Emil Cioran .

Si leurs écrits nettement fascisants de l'époque restent inaccessibles en français , leur basculement vers l 'extrême droite sera décrit par Eugène Ionesco dans sa pièce la plus célèbre, Rhinocéros (1959}.

LE JEUNE IONESCO À PROPOS DELALnn1RATUREROUMAINE DES ANNÉES 1930 «Je ne cesse d'être stupéfié par l'Intransigeance , l'acharne ment avec lesquels nous tenons à notre spécificité de Roumain plutôt qu'à celle de poète , de romancier, de philosophe[ ...

].

Je sais très bien qu'on ne peut pas rejeter une nation comme on jette une chemise ou une vieille chaussette .

Mais on peut la dépasser.

Dépasser ne signifie pas abandonner mais englober, maîtriser .

Se vouloir autochtone et rien d'autre, c'est véritablement mettre sa chemise sur son costume[ ...

].

C'est parce que nous sommes si entêtés de notre authenticité et de notre spécificité que nous sommes si inauthentiques et si peu spécifiques.

Perdons-nous donc pour mieux nous trouver .

[ ...

] Et d'ailleurs , cette interrogation sans fin -voilà cent ans que nous butons dessus -et cet interminable discours sur nous -mêmes se sont avérés parfa itement inutiles et oiseux.

[ ...

] Pour naître , une culture doit contredire le spécifique national, s'opposer à lui, car elle commence toujours par être un éloignement.

,, Extraits de Non (Bucarest, 1934 ; Gallimard , 1986 ).

profondément subjective où la voie du rêve et de l'imaginaire permettait de déjouer la censure .

Beaucoup seront finalement poussés à l'exil.

Tel est le cas de Virgil Tanase (Zoïa, 2003) ou de la romancière Maria Ma·11at (La Cuisse de Kafka , 2003) qui écrit désormais en français .

• Il faut à ce propos citer Gheorghe Craciun, dont le Composition aux parallèles inégales (1999) révéla la puissance d'évocation de la réalité d'une époque .

Professeur de théorie littéraire à Brasov (Réduction à l'échelle, 1999) , il est le principal théoricien de la Génération 80, prônant le jeu avec la syntaxe et la réinterprétation des grands mythes transposés dans un contexte moderne (La Belle sans corps , 1993 ; La Poupée russe , 2004).

• Le début de la décennie 80 fut également marqué par la parution de deux grands romans en forme de réquisitoires contre la période stalinienne, épuisés en quelques jours : Le Plus Aimé d 'entre les mortels, de Marin Preda, et Les Voix de la nuit, d'Augustin Buzura .

• Un grand nom de la poésie marque également cette époque: il s'agit d'Ana Blandiana.

Née en 1942 à proximité de Timisora, elle fut selon ses propres dires, « d'abord connue comme poète interdite avant de l'être comme poète » .

Ses œuvres , qui furent bannies par le pouvoir communiste de Ceausescu, sont aujourd'hui unanimement saluées pour leur « dimension supratemporelle » 1-------------1 ainsi que les salua le jury Herder, qui LES SURRÉALiffiS Le mouvement surréaliste fut très important en Roumanie .

Il y trouva même quelques-uns de ses pionniers : Urmuz {1883 - 1923) et surtout Tristan Tzara (1896-1963).

Parmi les autres écrivains surréa listes roumains de grand talent mentionnons encore Gherasim Luca (1913-1994), l'auteur de Héros-Limite (1953), ainsi que ses amis Gellu Naum (1915-2001} et Paul Paun (né en 1916), avec qui Luca animera encore un groupe surréaliste dans l'immédiat après-guerre -avant que le régime communiste ne s'empare du pouvoir.

La plupart de ces auteurs s 'exileront alors en France .

SOUS LE COMMUNISME (1945 ·1989 ) ET DEPUIS • Après la longue nuit des années 1950, la décennie 1960, période de relatif dégel, connaîtra une sorte d'explosion lyrique .

En témoignent L'Hiver des hommes (1965) , de Stefan Banulescu , En l'absence des maitres (1983 pour l'édition française), de Nicolae Breban , ou encore les « oniristes », courant littéraire animé par le prosateur Dumitru Tsepeneag.

Après les années 1970, dominées par l'entrée en dissidence du romancier Paul Goma (Gherla , 1973 ; Les Chiens de mort, 1981 ), les années 1980 seront les plus noires de l'époque Ceausescu .

S 'y affirme toutefois la « Génération 80 » , une littérature de l'interstice lui décerna son prix.

Auteur , entre autres, de Scripto hostilio (1985} et de L'Étoile de proie (1991), elle a fondé l'Académie mondiale de poésie , dont le siège est à Vérone.

• Depuis la chute du régime communiste en 1989, l e nom qui se détache le plus nettement est sans doute celui de Mircea Cartarescu , né en 1956 et ancienne figure emblématique de la Génération 80, avec Rêve (1989) , Lulu (1996}, Orbitor (2002} et Pourquoi nous aimons les femmes (2004) .

Son impressionnante puissance imaginative , sons sens du spectaculaire et son génie de la langue en font, aux yeux de certains, un fils roumain de Jorge Luis Borges.

Lui aussi fin théoricien littéraire , il est notamment le promoteur de la « !existence », conception fondatrice du postmodernisme roumain prônant un nouveau rapport avec le réel.

• Parmi la toute jeune génération, on peut enfin citer Ceci lia Stefanescu, née en 1975, dont le premier ouvrage, Liaisons maladives (2002), qui fit grand bruit en Roumanie , parait en langue française en 2006.

Très influencée elle aussi par la Génération 80 et le cercle animé par Mircea Cartarescu, elle en revendique les conceptions littéraires et socia les, opérant , au cœur d 'une œuvre incandescente conçue comme un conte , un parcours autobiographique et initiatique très novateur .. »

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