LA LITTÉRATURE NÉGRO-AFRICAINE DE LANGUE FRANÇAISE
Publié le 30/03/2012
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A côté de l'épopée et de ces romans d'un passé proche, il faut placer, dans le genre du roman-enquête, un certain nombre de romans autobiographiques relatant l' expérience d'Africains placés au croisement de deux civilisations, africaine et occidentale, représentées respectivement par le village et la ville : Karim ( 1935) du Sénégalais Ousmane Socé, Ville cruelle ( 1954) du Camerounais Eza Boto ( 1956) de l'Ivoirien Bernard Dadié, Maïmouna ( 1958) du Sénégalais Abdoulaye Sadji et Sous l'orage ( 1963) du Malien Seydou Badian. Partant du schéma ville-village, ces récits sont surtout des témoignages sur une époque transitoire, où le village traditionnel est moins intact et moins accueillant qu'on ne voudrait le croire, et où la ville, malgré les déboires qu'elle inflige aux Noirs, qui y sont considérés comme citoyens de seconde zone, continue d'exercer sur eux une fascination. L'invention romanesque joue ici un rôle plus limité; l'écrivain observe, note, il contribue à l'avènement d'une conscience sociale qui va éclater, ou a déjà éclaté, chez d'autres romanciers....
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822 HISTOIRE LITTÉRAIRE DE LA FRANCE
ou moins grande réussite esthétique attestera le degré d'achèvement.
L'exercice du rituel de l'écriture lui permettra, à l'intérieur même de la langue d'emprunt qui l'hébergera, d'effectuer une mise en évidence de sa réalité individuelle et sociale, quotidienne et spirituelle.
Loin que les deux pôles de
sa qualité soient un handicap, il pourra alors assumer sa
spécificité, en mettre en lumière les traits essentiels ; il pourra
aussi accueillir, sous le contrôle de la «justesse» de l'écriture, tout élément extérieur, toute valeur « étrangère » utiles à la poursuite de sa propre démarche.
Menacé qu'il était dans son être au moment où le
français venait supplanter sa langue natale - langue africaine
ou langue créole elle-même déjà substituée à des langues
africaines -, l'écrivain négra-africain possède désormais son
propre territoire à l'intérieur de la langue française.
Il se retrouve ainsi dans la situation de tout écrivain ; celle d'un « moi » acceptant de se soumettre au rituel de l'écriture comme à une épreuve de vérité ; et acceptant de s'engager plus ou moins profondément dans ce rituel, jusqu'à s'y métamorphoser.
jusqu'à l'infléchir sous le poids de son propre langage intérieur.
L'histoire de la littérature négra-africaine est celle de l'appropriation de ce rituel, des expériences et des prises de conscience successives auxquelles il a conduit.
Au début du xx• siècle, elle est en pleine période de mise en place : une abondante production de poésie néo-classique, teintée d'exotisme, continue son cours aux Antilles, depuis plusieurs
décennies déjà ; en Afrique, des instituteurs rédigent en
français des monographies sur l'histoire et les mœurs de l'Afrique ancienne ; un Haïtien, Antoine Innocent, publie en 1906 un roman régionaliste : Mima/a.
Si ingrate que soit cette période, de telles tentatives, tout comme d'autres non citées, permettent à de premiers auteurs d'apprivoiser les
mécanismes de l'écriture, et, déjà, d'orienter celle-ci vers la connaissance de soi ...
serait-ce à travers l'exotisme, démarche trouble et lointaine, mais, nonobstant, démarche vers soi.
Puis, vient 1920 : de premières œuvres originales, et une littérature qui s'improvise, se coordonne.
et se développe jusqu'à éclater presque, aujourd'hui, en un ensemble de littératures négra-africaines distinctes d'un pays à l'autre, d'une région du monde à l'autre ...
Le passage d'une poésie néo-classique et exotique - poésie d'imitation- à une poésie d'inspiration plus personnelle.
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