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La littérature française du XVIIIe siècle: L'éloquence

Publié le 18/10/2011

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La chaire n'eut point de très grand prédicateur depuis Massillon. En revanche, la Révolution, avec éclat, devait donner naissance à une forme de l'art oratoire qui n'avait guère pu se manifester jusqu'à elle : l'éloquence politique. Il est certain que la grandeur des événements en amplifie pour nous la résonance. Cependant, trois célèbres orateurs firent preuve à la tribune d'une personnalité certaine.

« Saint-Just (1767-1794).

Ce gamin fut le sphinx de la Révolution.

Saint-Just a déconcerté tous ceux qui se sont penchés sur son cas.

Mignet voyait en lui un c monstre peigné :t, Taine un c glaive vivant :t, Barrès une c lampe dans un tom­ beau :t, et Collot d'Herbois l'appelait iro­ niquement c la boite à apophtegmes :t.

Comment un psychiatre d'aujourd'hui le qualillerai t-il? Ne parlons ici que de son éloquence.

Elle­ même fut un paradoxe, et son succès, en ce temps où régnait si souverainement l'em­ phase, reste un mystère.

c Il est impossible que l'on gouverne sans laconisme :t, aimait­ il à dire.

c Laconisme :t, ce mot résume aussi l'étrange caractère du style oratoire de Saint-Just, tout sécheresse et concision.

Sa parole avait la raideur de sa personne.

Et cependant, quand ce jeune homme, en­ core inconnu, monta pour la première fois à la tribune pour soutenir avec la logique glacée qui lui était propre que Louis XVI - Louis Capet - devait être jugé non en roi mais en simple citoyen, légitimant ainsi le régicide, devant lequel nombre de ses collègues hésitaient encore, l'assemblée saisie subit aussitôt l'insolite prestige de cette éloquence jamais entendue.

L'éloquence de Saint-Just devait-elle vrai­ ment sa force à l'implacable rigueur de son argumentation? Il est probable que ses col­ lègues sidérés ne le suivaient pas toujours, car la logique de cet enfant dangereux était aussi spécieuse qu'elliptique.

Mais de temps en temps il laissait tomber quelque sen­ tence à sa façon ( c J'ai oublié ma plume et n'ai apporté que mon é:>ée :t - c La République française ne reçoit de ses enne­ mis et ne leur envoie que du plomb :t) qui luisait comme un couperet dans l'obscurité générale du discours, et alors Saint-Just devenait irrésistible.

A côté de ces trois figures si caractérisées, les autres orateurs de la Révolution nous semblent manquer de style.

Robespierre lui­ même parait artificiel, malgré son incontes­ table vigueur et la composition serrée de ses discours à la Convention.

Parmi les Girondins, Vergniaud usa certes avec s"ience des ressources de la rhétorique classlquf' du discours.

Du côté des défenseurs de la monarchie, le pondéré BARNAVE, le désabusP CAZALàs, le grossier MAURY surent se faire écouter.

Mais les discours de ces person ­ nalités éteintes supporteraient-ils encore la lecture, sans l'intérêt des graves evéne­ ments que de temps en temps ils reflètent? Citations de Mirabeau DISCOURS DU 23 MAI 1789 A LA SALLE DU JEU DE PAUME.

J'avoue que ce que voua venez d'entendre pourrait être le 11lut de la patrie al les préaents du deapo· tiame n'étalent paa toujours dangereux.

Quelle est cette Insultante dictature? L'appareil dea armes, la violation du temple national, pour vous commander d'être heureux ? Qui vous fait ce commandement ? Votre mandataire.

Qui vous donne dea lola Impérieuses ? Votre mandataire.

Lui qui doit les recevoir de vou•; de noua, Meuleura, qui sommes revêtus d'un IIC&:rdoce politique et Inviolable, de noua, enlln, de qui aeull vingt-cinq millions d'hommes attendent un bonheur certain, parce qu'Il doit être conaenti , donné et recu par voua.

Mala la liberté de nos délibérations est enchalnée, une force militaire environne l'aaaemblée 1 Je demande qu'en vous couvrant de votre dignité, de votre puissance législative, vous voua renfermiez dans la religion de votre serment ; Il ne noua reste de noua séparer qu 'après avoir fait · la constitution ...

(Au marquw de Brésd, Grand-Maître d e.• Oérémoniea, qui vient de rappe~r l'ordre du roi :) Oui, Monsieur, nous avons entendu les Intentions qu'on a augaoéréea au roi.

Mala voua qui ne 11urlez être 1011 organe auprèe de l' Auemblée nationale, voua qui n'avez ni place, ni volx, ni droit de parler, vous n'êtes pas fait pour nous rappeler son discours.

Ce· pendant , pour éviter toute équivoque et tout délai, je voua charge que al l'oo voua a charlfé de noua faire 10rtlr d'Ici, voua devez demander dea ordrea pour em· ployer la force.

Allez dire !1.

votre maitre que noua sommes Ici par la pui111nce du peuple, et qu'on ne noua en arrachera que par la force des baionnettea 1 DISCOURS DU 12 AVRIL 1790 (DEBAT SUR LES BIENS ECCLESIASTIQUES).

J'obleneral !1.

eelul dea préoplnants qui a parlé avant mol, qu'Il n'y a aucun doute que, aoua ce règne al· gnalé par la révocation de l'édit de Nantes, ce que je ne qualUieral pas, on ait con11cré toute sortes d'ln· tolérances; mals, puisqu'on se permet dea citations his· torlquea dana cette matière, je voua supplierai de ne pas oublier que d'Ici, de cette tribune où je voua parle, on aperçoit la fenêtre d'où la main d'un monar · que francais, armée contre aea aujeta par d'exécrable• factieux qui mêlaient les Intérêts temporels aux inté · rêts de la religion , tira l'arquebuse qui fut le signal de la révolution .

Je n'en dia paa davantage .

Il n'y a paa !leu de délibérer.. »

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