La langue française au XVIIe siècle
Publié le 10/02/2012
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Pour caractériser le sort fait à la langue française au xviie siècle, un
orateur s'exprimait ainsi : «Sortie des agitations du xvie siècle, un peu
rude sans doute, mais charmante de grâce naïve, la langue a gardé quelque
chose de la finesse et de la verve gauloise de Marot; Ronsard lui a donné
le goût de l'antique qui lui va si bien; Malherbe et Balzac l'ont enrichie
de l'harmonie des sons, du nombre et des formes périodiques; sous la
plume géométrique et passionnée de Pascal, elle a atteint la justesse et
la vie; elle est parvenue à la plénitude de sa vigueur sous la touche énergique
de Corneille; ....
«
Ronsard la sauve en l'envoyant respirer l'air natal, aux pays antiques
de la Grèce et de Rome.
Elle en revient transformée au point qu'à peine
.pe·ut-on la recf,>nnaître .: débordante de !il\Dt~, pleine .d'un !leau mépris
pour les jeux d'osselets, naguère sa seule occupation, ne )urant plus que
par.
les anciens, ..
dont elle veut tenteP les vastes entreprises.
Seulement,
comme elle a pillé le temple delphique en
barbare, c'est-à-dire sans choix,
la voilà chargée d'un encombrant et quasi grotesque affublement de voca
ble.s ètranges, d'allusiQns érudites, de noms
propres issus de la mythologie.
Malherbe vient, censeur
grincheux et rude, qui lui arrache ce qu'elle tient
pour richesse et n'est qu'un poids; puis îl l'assujettit à des règles austères.
Elle
prend sous son étroite discipline une démarche ferme et noble.
A· ce
moment, Balzac la drape dans les plis savants de la toge cicéronienne qui
lui sied fort bien; m&is elle ne peut plus se décider à la quitter, et la garde
encore jusque dans la liberté familière de la lettre.
Alors on sent trop qu'elle
n'est fière
que de l'ordonnance majestueuse de ses périodes, et l'on est
choqué.
Pourtant, s'il reste vide, le moule est créé : Bossuet y viendra bientôt
verser son génie.
.
·
Tout au.
contraire· de celle de Balzac, la langue de Pascal s'ignore elle
même, occupée
uniquement de servir la pensée.
Aussi nul ornement factice;
mais quelle puissance 1 Comme eUe sait ramener aa jour ce que le moraliste
a
découvert au 'Plus profond, au plus obscur du cœur humain f Et que de
perspectives sur l'infini elle entr'ouvre à nos_ regards éblouis et effrayés!
Corneille semble
avoir trempé la langue française dans la virilité de ses
Romains
et lui avoir donné la vigueur sobre de la langue latine.
Nombre de
ses alexandrins éclatent comme des médailles sur une plaque de marbre; et
ce sont bien, en vérité, des médailles qui portent en effigie un profil héroïque
et sur l'exergue le mot : Volonté!
Racine a· l)èrité de la douceur harmonieuse des Grecs; mais sa doucell)'
recèle souvent une force peut-être égale à la force qu'affiche la rudesse cor
nélienne.
Par quelle magie obtient-il de si grands effets d'un arrangement
très simple de très simples mots? Il a des vers qUi sont de Pl.lrs sanglots, et
il en a èncore qui sont une âme tout entière projetée au.
dehors par la.
vio
lence de la passion.
Avec Boileau,
la langue et la raison cheminent toujours de compagnie,
au rythme un peu· mécanique des hémistiches; sur les routes unies· 'qu'a
tracées l'antiquité; Derrière, suivent bon gré; mal gré, ·de grands écrivains
et de
moindres; ils vont du même pas à la postérité.
.
.
.· .
..
Molière t)St du moyen âge; il est _de son siècle; .il est surtout lui~mê~e •.
S.I!
langue qui s'appro~isionntl à vingt !JOUrces _es~ la ,plus riche peut-être du
temps, la plus spontanée et la plus naturelle, trop naturelle parfois,
Quant à La Fontaine, il est l'ininiitlible; on a fait du Molière, du Voltaire,
du Lamartine, etc., qui fera: jamais du La Fontaine? Et lorsqu'on parle de sa
naïveté, de sa gaieté, de sa finèsse et de toutes ses qualités, on n'a rien dit.
Il faut savourer et se taire.
·.
»
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