la condition humaine de andré malraux
Publié le 04/02/2013
Extrait du document


«
• « Une scène à faire », de l'aveu même de Malraux, d'après le manuscrit du roman.
Un des temps forts de
l'oeuvre : tout concourt dans cet incipit à créer une atmosphère tendue, mystérieuse, angoissante qui rappelle
celle des films en noir et blanc des années 30-50 comme La Dame de Shanghaï d'Orson Welles qui commence
par une agression nocturne dans un parc ou bien Citizen Kane qui s'ouvre sur la mort d'un homme solitaire, et
d'abord les films sombres de Murnau, Faust et Nosferatu ou de Fritz Lang tels Le docteur Mabuse ou M.
le
maudit.
• L'entrée se fait « in medias res » : le lecteur est plongé au coeur de l'action, du drame, par deux verbes
d'action « lever « et « frapperait » (l.1), et même dans l'intériorité du personnage nommé Tchen sans
informations ni explications préliminaires sur les circonstances, le mobile de l'acte, sans présentation du
personnage.
Malraux transgresse là le protocole d'ouverture des oeuvres romanesques écrites à la manière de
Balzac.
La future victime désignée deux fois par « cet homme » (l.
15 et 17), reste anonyme : réduite à un corps
immobile, et par une synecdoque, à un pied (l.5, 8 et 16) conformément aux limites de la perception de Tchen,
donc en grande partie invisible (comparaison l.
4-5), elle est identifiée seulement comme ennemie de la
révolution.
A ce stade, le meurtre en soi importe plus que le mobile ou la victime.
• Le temps semble arrêté, comme suspendu, alors que l'action devrait être minutée comme le suggèrent
les indications précises au- dessus du texte dans le style d'un reportage.
Paradoxalement, l'action reste en
suspens et l'acte est différé.
Ainsi s'instaure une tension entre d'une part, des indications ponctuelles, une date
et une heure précise, « minuit et demi » et d'autre part, des imparfaits dans le récit qui inscrivent l'action dans
une durée pesante.
Les quelques passés simples (l.11, 13, 30) ne parviennent pas à remettre en mouvement le
récit ; au contraire, ils soulignent par contraste son immobilisation.
On a une sorte d'arrêt sur image : un
homme brandissant un couteau au- dessus d'un lit....
L'attente du lecteur devient pénible, son impatience est
exacerbée.
Dès ce moment se cristallise la disjonction entre le temps objectif de l'histoire, « 21 mars 1927 » à
« Minuit et demi » et le temps subjectif, celui que perçoit Tchen.
Pour lui, le temps s'est un moment arrêté
« dans cette nuit où le temps n'existait plus. » (l.14).
»
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