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La comédie de caractères et de mœurs : la peinture des personnages - LE MISANTHROPE de MOLIERE

Publié le 02/03/2020

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moliere

• Un être contradictoire

Son comportement est donc marqué par la contradiction. Ces effets d'opposition, qui en font un continuateur des personnages pittoresques de la comédie d'intrigue, se manifestent constamment dans sa façon d’agir. Ils prennent place dans ses relations sentimentales : avide de sincérité, il est tombé amoureux de la coquette Célimène ; brûlant pour elle d'une passion extrême, il émet constamment le souhait paradoxal de ne plus l’aimer. Ils s’étendent à tous les domaines : ils triomphent dans son désir de perdre son procès, pour avoir le plaisir d’être victime d'une injustice. Ils éclatent dans sa démarche face à la médisance ; par exemple, à la scène 1 de l’acte II, Alceste peint un portrait très cruel de Clitandre, mais s'indigne à la scène 4 du même acte des évocations peu charitables que les invités de Célimène font de leurs familiers ; la jeune femme le relèvera d'ailleurs justement, en notant :

« L’honneur de contredire a pour lui tant de charmes, Qu'il prend contre lui-même assez souvent les armes ; Et ses vrais sentiments sont combattus par lui, Aussitôt qu'il les voit dans la bouche d'autrui »

(v. 677-680).

L’exclusivisme est aussi une des marques essentielles de son caractère. Pour lui, un sentiment n’est vrai et précieux que s’il est rare, réservé à un petit nombre, voire à une seule personne. Alceste n’entend pas partager. Cette conception apparaît aussi bien dans les relations amicales que dans les rapports amoureux. Dès le début de la pièce, elle éclate dans sa fureur de voir Philinte offrir son amitié au premier venu, et il fait cet aveu significatif :

« Je refuse d’un cœur la vaste complaisance

Qui ne fait de mérite aucune différence ;

Je veux qu’on me distingue ; et pour le trancher net, L’ami du genre humain n’est point du tout mon fait »

(v. 61-64).

A la scène 2 de l'acte V, la démarche est comparable, lorsque, parlant de Célimène, il avertit Oronte :

« Je ne veux point, Monsieur, jaloux ou non jaloux, Partager de son cœur rien du tout avec vous »

(v. 1611-1612).

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« bile, la bile noire ou atrabile, ou mélancolie.

Dans l'état normal, un certain équilibre s'instaure entre ces quatre influences, même si l'une d'elles assure sur les autres une certaine prépondérance qui permet de distinguer les sanguins à la nature gaie et ouverte, les flegmatiques caractérisés par leur calme et leur pondération, les bilieux au tempérament colérique, les mélancoliques ou atrabilai­ res enclins à la tristesse et au repliement.

Il se produit parfois des dérèglements qui aboutissent à la domination excessive d'une de ces humeurs.

Alceste souffre d'une telle anomalie ; elle est d'ailleurs signalée dès la première scène de la pièce où lui-même parle de son «humeur noire» (v.

91), où Philinte renchérit en évoquant ses« noirs accès» (v.

98) et va même jusqu'à assimiler les comportements de son ami à une «maladie» (v.

105).

Alceste est donc malade, malade de vivre, incapable de supporterl'existence, l'existence des autres, mais aussi sa propre existence.

Il souffre en fait d'une affection nerveuse proche de la neurasthénie.

Cette difficulté de s'adapter aux autres se concrétise, de manière symptomatique, par une alternance de périodes d'excitation et de périodes d'abattement que Molière a exploitée pour créer des effets comiques.

Il arrive à Alceste de bouillir véritablement d'indignation, comme à la scène 2 de l'acte 1, lorsque Philinte se répand en éloges sur le sonnet d'Oronte: son élocution devient alors heurtée ; ses phrases sont hachées par les interruptions, ponctuées d'exclamations, parsemées de jurons.

Et puis, à ces crises d'énervement intense qui ont usé son dyna­ misme, succèdent des moments de dépression : il ne veut plus voir personne, il se replie sur lui-même.

Il abandonne tout projet d'action.

Il refuse ·par exemple de lutter davantage pour gagner son procès ; ou bien il enjoint, à la scène 3 de l'acte I, à Philinte de ne pas le suivre; ou encore il lui demande à la scène 1 de l'acte V: «Allez-vous-en Jal voir, et me laissez enfin Dans ce petit coin sombre, avec mon noir chagrin» (v.

1583-1584).

l.

Eliante.

49. »

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