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LA BOÉTIE Étienne de : sa vie et son oeuvre

Publié le 08/01/2019

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LA BOÉTIE Étienne de (1530-1563). Né à Sarlat, il est issu d’une famille de petite noblesse de robe. Il fait ses humanités au collège de Guyenne, que fréquentera par la suite Montaigne. Après avoir étudié le droit à Orléans, où professe Anne du Bourg (qui sera en 1559 l’un des premiers martyrs de la Réforme en France), il est reçu licencié en droit civil (1553). Agé de vingt-trois ans à peine, il est nommé conseiller au parlement de Bordeaux. Montaigne devient son collègue en 1557, et c’est alors que s’établit entre eux une indéfectible amitié. Lors des premiers troubles civils, La Boétie réagit avec sang-froid et fait preuve d’une relative modération, comme en témoigne son Mémoire sur l'édit de janvier composé en 1562. Soucieux de voir préservées l’unité et l’harmonie du royaume, il juge difficilement concevable, en dépit de sa tolérance, l’existence de deux religions et de deux partis. Emporté par la maladie à l’âge de trente-trois ans, il confie à son inconsolable ami Montaigne ses ultimes volontés. Son œuvre, entièrement posthume, comprend des traductions de Xénophon {la Ménagerie)

« que s'établit entre eux une indéfectible amitié.

Lors des premiers troubles civils, La Boétie réagit avec sang-froid et fait preuve d'une relative modération, comme en témoigne son Mémoire sur L'édit de janvier composé en 1562.

Soucieux de voir préservées 1' unité et 1' harmonie du royaume, il juge difficilement concevable, en dépit de sa tolérance, l'existence de deux religions et de deux partis.

Emporté par la maladie à l'âge de trente-trois ans.

il confie à son inconsolable ami Montaigne ses ultimes volontés.

Son œuvre, entièrement posthume, comprend des traductions de Xénophon (la Ménagerie) et de Plu­ tarque (les Règles de mariage), des poèmes latins et français d'un pétrarquisme des plus tempérés et, surtout, un traité politique écrit avec la fougue de l'adolescence et dont la fortune allait être considérable : le Discours de la servitude volontaire ou Contr'un.

En relation avec les membres de la Pléiade, Jean­ Antoine de Baïf et Jean Dorat, La Boétie s'était essayé avec succès au métier des Muses.

De «sa plus verte jeunesse » datent les Vingt-Neuf Sonnets insérés par Montaigne au centre exact du livre I des Essais qui leur servent d'« encadrement maniériste» (Michel Butor).

Suivent les Vers françois, qui, au dire de l'ami jaloux, se ressentent déjà de quelque « froideur maritale>).

Insp i­ rés par une flamme amoureuse aussi rude que sincère, ils sont dédiés à l'épouse fidèle, Marguerite de Carle, sœur du controversiste catholique Lancelot Carle.

Une traduc­ tion versifiée de l'Arioste (Chant XXXII des Plaintes de Bradamant) commandée par la compagne exigeante, et à laquelle le poète a passé mainte veille «en se rongeant les ongles », inrroduit à un canzoniere de vingt-cinq son­ nets qui déclinent la vue, le nom, 1' absence et la constance de celle pour qui il a nourri une sage et réci­ proque affection.

Composé à l'âge de dix-huit ans, au temps de la grande révolte paysanne de Gascogne contre la gabelle et à une époque où La Boétie n'avait en tête que les Moralia de Plutarque et les illustres exemples de Tite-Live, le Discours de la servitude volontaire a suffi à assurer la gloire posthume de l'écrivain.

Très tôt consi­ déré comme un pamphlet antimonarchique invitant au tyrannicide, ce texte a été publié d'abord dans un recueil d'inspiration protestante, le Réveille-Matin des Français (1574), puis repris, toujours à des fins de propagande réformée, dans les Mémoires des états de la France sous Charles le Neuvième (1577).

Réimprimé à chaque période de lutte pour la démocratie, il devait être plagié par Marat dans les Chaînes de l'esclavage ( 1774), réédité et préfacé tour à tour par Lamennais ( 1835), Pierre Leroux (1847), Auguste Vermorel ( 1863).

Drapeau de la cause républicaine, puis socialiste, le Contr'un a pu ser­ vir les principales révolutions des deux derniers siècles, de 1789 à la Commune.

La phrase célèbre, qui en résume la thèse : « Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres », a été comprise comme un mot d'ordre.

Prudemment, Montaigne avait proposé de ne voir dans cet écrit de jeunesse qu'une « exercitation >> rhétorique, une déclamation à l'antique prenant pour prétexte ce paradoxe : il est impossible à un homme seul, « nud et deffait », d'as5ervir un peuple si ce peuple ne s'asservit pas d'abord lui-même.

Or, «c'est le peuple qui s'asser­ vit, qui se coupe la gorge, qui, ayant le choix ou d'être serf ou d'être libre, quitte sa franchise et prend le joug >).

Ce discours enflammé et oratoire, qui analyse ensuite les moyens -et notamment la « pyramide )> des intérêts - dont s'aide le tyran pour demeurer au pouvoir et faire que, de complicité en complicité, le corps social s'en­ chaîne lui-même, constitue sans doute une réplique aux écrits de Machiavel.

Il reste que, par la logique fulgu­ rante qu'il déploie, le Discours dépasse de beaucoup les usages partisans et souvent intéressés auxquels il a pu prêter.

Son objet, c'est, fondamentalement, la politique comme telle.

A l'instar du Cannibale de Montaigne, La Boétie s'étonne du spectacle de l'obéissance.

Vue de l'extérieur et en toute ingénuité, celle-ci cesse d'aller de soi.

Contre les sociétés étatiques de son temps et du nôtre, le jeune La Boétie a peut-être rêvé, à mi-chemin entre la nostalgie d'une fraternité égalitaire à l'antique et le modèle des peuples réputés sauvages que son siècle découvrait, d'une « société contre l'Etat» (Pierre Clastres).

BIBLIOGRAPHIE Œuvres complètes d'Estienne de La Boétie, éditées par P.

Bonnefon, Bordeaux et Paris, 1892; Œuvres complètes, éd.

L.

Desgraves, Bordeaux, W.

Blake, 1991; Vers François de feu Estienne de La Boetie.

Six Sonnets.

Vingt-Neuf Sonnets, dans Poètes du xvi' siècle, éd.

A.

M.

Schmidt, Paris, Gallimard.

La Pléiade, 1953: Œuvres politiques, prés.

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Paris.

Édi­ tions Sociales, 1963: Discours de la servitude volontaire, éd.

P.

Léonard, Paris.

Payot, 1976.

Le même volume contient : La Boétie er la question du politique, textes de Lamennais.

P.

Leroux , A.

Vermorel, G.

Landauer, S.

Weil et de Pierre Clas­ tres et Claude Lefort: De la servitllde volontaire, éd.

par S.

Goyard-Fabre, GF.

1983; id., éd.

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par M.

Smith, Genève.

Droz, 1987: id ., Payot.

1993; Mémoire sur la pacification des troubles.

éd.

crit.

par Malcolm Smith.

Genève, Droz, 1983.

A consulter.

-P.

Bonnefon, E.

de La Boétie.

Sa vie, ses œuvres et ses relations avec Montaigne, Bordeaux, 1888; Pierre Mes­ nard.

l'Essor de la philosophie politique au xvi' siècle, Paris.

J.

Vrin.

1951: Cl.

Paulus, Essai sur La Boétie.

Bruxelles, 1949: Jean Lafond, >, Mélanges à la mémoire de V.-L.

Sc111 lnier, Genève, Droz, 1984, p.

735-745 (étude fondamentale qui renouvelle la question).

F.

LESTRINGANT. »

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