Jean Racine historiographe de Louis XIV
Publié le 29/08/2013
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Une promotion aussi spectaculaire ne peut que susciter des jalousies : or, le cousin de madame de Sévigné, le comte de Bussy-Rabutin, a brigué le poste d'historiographe du roi! Il va de soi qu'une mission aussi capitale exclut tout autre activité, et la plupart des contemporains partagent l'avis selon lequel Racine « a abandonné le théâtre pour une occupation plus digne de lui «. Avec le sens critique qui la caractérise, Madame de Lafayette est une des seules à regretter « le meilleur poète du temps, que l'on a tiré de sa poésie où il était inimitable pour en faire, à son malheur, (...) un historien très imitable «.

«
madame de Thianges, qui ont
avancé les noms de ces auteurs
qu'elles protègent.
Dès l'été,
les
deux amis se mettent au
travail et le 1 1 septembre,
Louis XIV leur alloue chacun
six
mille livres « par gratifica
tion et en considération de di
vers ouvrages auxquels ils tra
vaillent par mon ordre ».
« Le
roi a
donné deux mille écus à
Racine
et à Despréaux, en leur
ÉLOGE ET HISTOIRE
Les manuscrits dans lesquels
Jean Racine a relaté !'Histoire du Roi-Soleil ont été
détruits dans un incendie en
1726.
En plus des notes
portées sur les documents
qu'il consultait, deux textes
sont communément attribués
au dramaturge devenu
historiographe : Relation
de ce qui s'est passé au siège de
Namur, en mai-iuin 1692,
imprimée anonymement en 1726, et Éloge ftistorique
du roi sur ses conquêtes
depuis l'année 1672 ;usqu'en
1678, d'origine plus assurée -même s'il a été imprimé en
1 730 sous le nom de Pellisson sans que le fils de Racine ne proteste.
Le titre de ce second ouvrage, rédigé en 1684, témoigne de la difficulté et
du paradoxe de la fonction d'historiographe, soulignés par Racine dans ses notes :
« L'éloge et l'histoire sont éloignés infiniment », au
point « que ce sont les deux
extrémités », l'historien
« doit être libre, n'espérant
ni ne craignant rien,
inaccessible aux présents et
aux récompenses ( ...
) ;
juge équitable et indifférent,
sans pays, sans maître et
sans dépendance ».
Racine
résout cette contradiction
par l'admiration réelle qu'il
porte à Louis XIV ...
Et
n'hésite pas à omettre de
signaler certaines défaites
militaires françaises !
commandant de tout quitter
pour travailler à son histoire »,
remarque la marquise de Sévi
gné , guère satisfaite par le
choix de ces « bourgeois » tout
«ébaubis » lors des combats .
« li n'appartient pas à ces gens
là de louer le roi ni d'écrire son
histoire .
Ce devrait être un
homme de Cour, de qualité et
de guerre », écrit-elle l'année
suivante.
Une promotion aussi specta
culaire ne peut que susciter
des jalousies : or, le cousin de
madame de Sévigné, le comte
de Bussy-Rabutin, a brigué le
poste d'historiographe du roi !
Il va de soi qu'une mission
aussi
capitale exclut tout autre ~
activité, et la plupart des con- c_
temporains partagent l'avis
selon lequel Racine « a aban
donné le théâtre pour une
occupation plus digne de lui » .
Avec le sens critique qui la ca
ractérise, Madame de La
fayette est une des seules à re
gretter « le meilleur poète du
temps, que l'on a tiré de sa
poésie où il était inimitable
pour en faire, à son malheur,
( .
..
) un historien très imitable ».
Le roi est
« fort content »
Racine écrira pourtant encore :
deux tragédies , Esther et Atha
lie, des Cantiques spirituels, un
Abrégé de /'histoir e de Port-Royal .
Mais, très consciencieusement,
il
se consacre pleinement à son
nouveau rôle.
li lit beaucoup ,
se forge
une vaste culture his
torique, géographique, navale
et militaire .
Il suit les campa
gnes royales, demandant des
explications sur tout, interro
geant sans relâche les chefs de
guerre comme les simples sol
dats, recherchant des témoins .
Puis il s'applique à recouper
les versions, à confronter les
informations recueillies .
Ce perfectionniste scrupuleux
veut tout connaître, tout sa
voir, il étudie en détail l'Euro-
pe de son siècle .
Ses notes se
rapportent aussi bien à une
chronologie de l'histoire de la
France , d 'Hugues
Capet à 1344,
qu'à une description des villes
de la Baltique .
En toute occa
sion -ainsi lors son premier
séjour à Marly -, il se docu
mente auprès de nombreuses
personnalités, y compris auprès
du ministre Louvois, qu'il
interroge sur les causes de la
marche sur
Charleroi.
li
acquiert des connaissances si
étendues et si profondes que
l'Académie des Inscriptions
tire régulièrement profit de ses
compétences.
A
sa mort, en
avril 1
699, elle lui rendra hom
mage en soulignant qu'il lui a
été « d'un grand secours (.
..
)
par la connaissance certaine
qu'il avait de tout ce qui regar
de l'histoire du roi ».
Louis XIV, pour sa part, appré
cie le travail de ses historio
graphes : il « s'est fait lire dans
ses
dernières après-dînées
l'histoire que font Racine et
Despréaux et en paraît fort
content », note en mars 1686 le
marquis mémorialiste Philip
pe de Dangeau .
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