Jacques le fataliste de Diderot : Plaisir du texte
Publié le 30/06/2015
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Lecture princière, lecture prem1ere, ce festin aristocratique
fait figure de commencement absolu : un plaisir du texte à l'état natif, précédant toutes les gloses...
Cette lecture
enthousiaste n'est pourtant pas intemporelle : conseiller à la
cour de Weimar, l'auteur de Werther (1774) appartient à cette jeune intelligentsia allemande qui se démarque du
rationalisme des Lumières, qui aspire à une jouissance ima
ginative de l'univers dont elle crédite volontiers -quitte à la dissocier du mouvement philosophique -l'œuvre nour
ricière dt! Diderot.
Lisant Diderot, Goethe se lit, lit sa situa
tion historique, lit ses fantasmes, s'il est vrai que lire un texte avec amour, c'est y projeter son propre désir.
Sans être
prince ni génie, le lecteur actuel peut, lui aussi, savourer
jacques, le dévorer ou se laisser joyeusement engloutir par
le mouvement d'un livre dont la cadence saisit dès les
premières lignes : Jacques voyageur et fataliste, Jacques
rossé, enrôlé, blessé, boiteux, amoureux
...
Ce goût du texte,
nous pouvons l'éprouver, mais nous ignorons ce qui le rend
possible : les conditions de notre plaisir nous échappent,
inscrites dans l'inconscient personnel et dans les déter
minismes d'une culture que nous n'avons pas choisie.
Ainsi, pour Goethe, Diderot était un contemporain capital.
Mais pour nous, lecteurs de la fin du
xx" siècle ?
L'œuvre de Diderot est gratifiée d'une réputation de
modernité qui est subtilement récupératrice : sous couleur
de la dépoussiérer,
on y privilégie ce qui l'apparente aux
courants actuels.
Et on pratique en même temps cette suren
chère aux grands précurseurs qui permet de désamorcer l'un
par l'autre les textes explosifs :
« Diderot l'avait dit avant
Marx, avant Freud, Platon et Montaigne avant Diderot.
~ L'illusion rétrospective escamote le scandale de la nouveauté.
Ainsi, au lieu de s'interroger sur la spécificité de jacques en
son temps, on y a cherché un roman réaliste avant la lettre : un tableau de mœurs paysannes, une « physiologie » de
l'amour aristocratique ; et si, de nos jours, on met l'accent
sur le discours de l'auteur dans le texte, c'est pour annexer
Jacques à « l'ère du soupçon » (N.
Sarraute), pour y lire
un anti-roman au sens moderne du terme, le roman d'un
roman qui ne peut pas
se faire.
Or Jacques n'est ni un roman balzacien, ni un récit de
Butor ou de Sollers.
Replacé, comme il doit l'être, dans.
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