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Introduire ses idées, commentaire de l'introduction au Banquet de Platon

Publié le 27/01/2015

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Platon, Le Banquet, de 172 à 173 a 8???? Introduire ses idées Les quelques lignes de Platon que nous allons observer, entre autres points de commentaires différents bien entendu, ont une particularité, un petit quelque chose qui mérite d'être souligné, une question même que nous sommes donc amenés à nous poser. Bien sûr il y a souvent un début, et pareillement une fin, à une ?uvre (ou pas, prenez Bret Easton Ellis par exemple, quoiqu'on ne pourrait pas lui nier une intention délibérée dans le fait de commencer et de finir au beau milieu d'une phrase ses romans ; après tout, ce sont donc aussi des formes de début et de fin?n'y aurait-il donc que le point qui clôturerait une phrase ? Non bien sûr, il y a avant tout la volonté de l'auteur et son pouvoir sur son texte), mais il n'y a pas toujours d'introduction. Et pourquoi pas s'ouvrir nous-mêmes sur une question relative à ce sujet, qui anime chaque plume à l'aube de devoir structurer sa pensée. Comment réussir son introduction ? Comment présenter son sujet, attirer le chaland, s'assurer qu'il reste entre les pages de son ?uvre pour la voir se dévoiler à mesure qu'il en tournera les pages ? Ou qu'il écoute le discours qu'on lui propose, mode de communication qui sied sans doute davantage au corpus platonicien. Est-ce bien la fin d'une introduction (est-ce bien la fin d'un début ?...) ? N'est-ce pas une question que l'on peut se poser devant les lignes qui ouvrent Le Banquet de Platon ? Dans une émission de France Culture diffusée le 9 septembre 2012, intitulée Le Gai Savoir,(au moins avec un titre pareil on sait que ce n'est pas une émission de cuisine) animée par Raphael Enthoven, philosophe, on présente Le Banquet comme « le récit d'un récit d'un récit d'un récit d'un mythe ». Répétition qui va guider notre réflexion. Ainsi de manière linéaire mais un tant soit peu thématique, nous nous intéresserons d'abord à l'art de l'introduction selon Platon, très présent au début du texte. Ensuite on pourra s'intéresser au flou platonicien caractérisé par l'emploi du discours indirect (des discours indirects ?). Et puis nous terminerons en suivant l'auteur par une réflexion sur la philosophie au sein de la vie, sur la philosophie comme manière de vivre. C'est donc ainsi que nous commencerons à appréhender cette partie initiale du discours de Platon : comme un véritable incipit de roman. En effet Platon se livre véritablement à une annonce de la nature, du genre, et du style de son texte, en intégrant très rapidement des éléments clefs. A 172 a 8 et 9 les personnages sont de suite présentés : Alcibiade, Socrate , Agathon et « ??? ?????» . Les noms sont importants, mais que vont-ils faire ? Très rapidement aussi, Platon dévoile le mot clef du genre : « ????????? ». Donc, on a les protagonistes principaux, et ils ont participé à un banquet. Et de quoi vont-ils parler ? « ???? ??? ???????? ????? », à 172 b 2. Des acteurs nommés, un lieu mais qui a aussi valeur d'action (le banquet antique est une pratique culturelle et sociale, le mot comporte donc différents sens, on sait avec le mot que les acteurs se réunissent quelque part pour littéralement « boire ensemble » et aborder des sujets de discussion)., et un sujet : l'amour. Tout est dit pour présenter ce qui va suivre, c'est une introduction qui comporte de réels éléments précis et clairs d'annonce. Mais Platon cherche aussi à attirer l'attention, à séduire le lecteur, dans son approche première déjà. La première phrase du Banquet est ainsi à elle seule un modèle d'adresse au lecteur « directe », même si ce n'est pas Platon qui parle lui-même, et que le narrateur lui-même ne s'adresse pas véritablement au lecteur (mais cela fait partie de la complexité du discours rapporté platonicien, que nous aborderons dans une autre partie). Les traductions sont intéressantes à ce titre, car le traducteur doit rendre la double négation « ??? ?????????s », dont Jespersen dit qu'elle a un effet cumulatif, renforçant l'expression (dans Negation in English and other langages, 1917), et autant il est possible en anglais de rendre le sens par un « not unprepared », autant en français on peut hésiter. Philippe Jaccottet dans l'édition du Livre de Poche collection Les classiques de la philosophie traduit par « je ne suis pas mal placé pour », restituant la double négation, alors que Paul Vicaire dans l'édition des Belles Lettres lui choisit « je crois être assez bien préparé », optant donc pour un renforcement clair sans négation. Les deux néanmoins montrent une volonté certaine du narrateur de capter de suite l'attention par un propos liminaire qui dit « vous qui m'écoutez, ne vous inquiétez pas, je gère mon sujet comme personne, vous n'allez pas en revenir tellement cela va être incr...
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« rapporté platonicien, que nous aborderons dans une autre partie).

Les traductions sont intéressantes à ce titre, car le traducteur doit rendre la double négation « ουκ αμελετητοs », dont Jespersen dit qu’elle a un effet cumulatif, renforçant l’expression (dans Negation in English and other langages , 1917), et autant il est possible en anglais de rendre le sens par un « not unprepared », autant en français on peut hésiter.

Philippe Jaccottet dans l’édition du Livre de Poche collection Les classiques de la philosophie traduit par « je ne suis pas mal placé pour », restituant la double négation, alors que Paul Vicaire dans l’édition des Belles Lettres lui choisit « je crois être assez bien préparé », optant donc pour un renforcement clair sans négation.

Les deux néanmoins montrent une volonté certaine du narrateur de capter de suite l’attention par un propos liminaire qui dit « vous qui m’écoutez, ne vous inquiétez pas, je gère mon sujet comme personne, vous n’allez pas en revenir tellement cela va être incroyable ».

Ou quelque chose approchant…une autre interprétation est possible, comme nous le verrons plus loin.

A n’en pas douter, Platon nous plonge d’emblée au cœur du récit.

On est bien dans le in medias res .

Comme souvent chez Platon.

Sur le blog de philosophie Pensées pour nous- mêmes , on trouve cette réflexion : « Ceux-là (les Dialogues) sont écrits en dépit de tout ordre, de toute structure, de toute cohérence ; ils commencent bien souvent in medias res (un dialogue entre Socrate et Céphale), et se terminent, pour la majorité d’entre eux, par l’évocation d’une aporie (dans le Théétète ), si ce n’est par le départ impromptu de Socrate (c’est le cas du Protagoras ) ».

Cet avis n’est pas remis en question par notre point de vue, mais plutôt augmenté.

Pour ne pas discréditer d’ailleurs l’auteur de ces lignes, il explicite par la suite ce qu’il entend par l’absence d’ordre et de structure chez Platon ; il ne faut pas prendre au pied de la lettre ses mots introductifs.

Car l’introduction, donc, pour en revenir à notre texte, est tel un discours qui viendrait se rajouter sur le discours réel en filigrane, comme un palimpseste mélangeant l’action qui ne souffre pas de délai pour commencer et un texte qui suit néanmoins une véritable volonté introductive.

En fait on peut même avoir l’impression qu’il n’y a pas d’introduction, car l’action commence dès la deuxième phrase.

Le récit ponctué d’éléments de temps et de localisation ainsi démarre de suite, dès la phrase qui fait suite à l’accroche liminaire.

Permettons nous ici une comparaison avec une œuvre romanesque récente, dont un chapitre s’intitule In medias res ( Last night in Twisted river , de l’auteur américain John Irving), pour souligner l’à propos romanesque de cette méthode.

Citons : « C'était lui ( l’apprenti écrivain ) qui lui avait appris la formule in medias res, parce que ses récits commençaient souvent au beau milieu de l'histoire, sans suivre l'ordre chronologique des évènements, ce que M.

Leary ( son professeur ) appréciait en tant que lecteur ».

Cet extrait nous permet juste de souligner l’attention stylistique que porte Platon à son texte pour qu’il soit appréhendé, perçu, compris par le lecteur.

Et de constater qu’à travers le temps les lecteurs continuent à apprécier que l’on témoigne pour eux de l’attention, notamment par l’utilisation de procédés narratifs qui concourent à la création d’une œuvre d’art ouverte au plus grand nombre.

Introduction donc, cette partie dynamique, rythmée par le jeu des questions réponses entre Apollodore et son public d’amis, crée les conditions du récit du banquet.

Il donne à voir très rapidement le cadre de cet événement.

Le décor est posé par Platon pour dérouler ensuite son discours.

Mais aux questions préalables auxquelles un incipit didactique peut ou doit répondre pour faire son office (qui, quand, quoi, comment, pourquoi), Platon s’amuse à ne pas donner toutes les clefs, ou à nous donner des clefs qui restent floues, imprécises, ouvertes à interprétations.

Car le banquet s’est-il bien déroulé, comme raconté par Apollodore, avec ces protagonistes-là, autour de ce sujet précis, à ce moment là ? Et surtout, cette question est-elle bien importante (voire indispensable) dans le cadre strict de la narration d’un récit dont le but est d’être lu, apprécié, compris ?. »

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